Inflation : un Européen sur quatre se dit en situation de précarité

Une enquête réalisée dans cinq pays de l'Union européenne (Allemagne, France, Grèce, Italie, Pologne) et au Royaume-Uni dresse le portrait de la pauvreté et de la précarité sur le Vieux continent. Le constat est sans appel : la flambée des prix de l'énergie et des biens de consommation, survenue à la sortie de la crise Covid et renforcée par le déclenchement de la guerre en Ukraine, a fragilisé les ménages européens. Ce sentiment concerne même 63% des Français, selon ce sondage Secours populaire français / Ipsos.
Coline Vazquez
« l'inquiétude face au risque de se retrouver en situation de précarité est aujourd'hui majoritaire chez les Européens interrogés », selon un sondage du Secours populaire français réalisé en partenariat avec Ipsos.
« l'inquiétude face au risque de se retrouver en situation de précarité est aujourd'hui majoritaire chez les Européens interrogés », selon un sondage du Secours populaire français réalisé en partenariat avec Ipsos. (Crédits : Reuters)

Hausse des prix de l'électricité, du gaz, du carburant, hyper inflation... Les motifs d'inquiétude pour l'Europe sont nombreux alors que l'hiver approche. Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine qui a entraîné une crise énergétique sur le Vieux continent, nombreux sont les ménages qui voient leur pouvoir d'achat se réduire avec des conséquences concrètes dans leur quotidien. C'est ce qu'illustre le sondage réalisé dans six pays (Allemagne, France, Grèce, Italie, Pologne et Royaume-Uni), auprès de 6.000 personnes âgées de plus de 18 ans européen, par le Secours populaire français (SPF) en partenariat avec Ipsos, et dévoilé ce vendredi. L'étude, la première de l'association à l'échelle européenne, s'est penchée sur « la manière dont la pauvreté et la précarité sont définies et redoutées par les Européens mais aussi vécues par une partie de la population ».

Et le constat est sans appel : un Européen sur quatre se dit en situation précaire et plus d'un sur deux a le sentiment que son pouvoir d'achat a diminué au cours des trois dernières années. Un chiffre qui monte à 63% en France et 68% en Grèce.

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« Des choix compliqués » à faire ces six derniers mois

Preuve que la situation s'est aggravée en 2022, 53% des sondés ont indiqué avoir dû se résoudre à « faire des choix compliqués du fait d'une situation financière difficile » au cours des six derniers mois. Ainsi, 36% ont été contraints de restreindre leurs déplacements (en voiture ou en transports en commun), 22% de ne pas augmenter le chauffage au sein de leur domicile et donc avoir froid, 14% de faire appel à des proches pour leur prêter ou leur donner de l'argent, 14% de renoncer à soigner un problème de santé, 13% de cumuler plusieurs emplois ou d'en accepter un qui ne leur plait pas (11%), 11% de sauter un repas malgré la faim ou 6% de faire appel à l'aide d'amis, de famille pour être hébergés ou à une association pour se nourrir et s'habiller (6%).

Si les Européens doivent se serrer la ceinture pour pouvoir assurer les dépenses alimentaires, mais aussi de chauffage alors que l'hiver approche, ces restrictions empiètent également sur le budget destiné à leurs enfants. Ils sont 16% à avoir répondu ne pas pouvoir leur donner une alimentation suffisamment variée, 12% à ne pas pouvoir payer la cantine ou les fournitures scolaires et 13% à continuer à les habiller avec des vêtements trop petits. De même, 23% des personnes interrogées ont dit avoir eu peur de ne pas pouvoir subvenir aux besoins de leur progéniture (repas, frais de santé, de scolarité, vêtements...) au cours des six derniers mois.

L'inflation, principale responsable pour les Européens

Selon les 6.000 Européens interrogés, c'est « l'augmentation des prix » qui « explique le plus la diminution de leur pouvoir d'achat, loin devant les taxes et la baisse de revenu liée à leur activité ». Ils sont, en effet, 89% à le penser. Plus particulièrement, ils sont 92% en Allemagne et 91% au Royaume-Uni, deux pays où les factures d'énergies ont considérablement augmenté. Fin août, le régulateur britannique Ofgem a, en effet, annoncé un relèvement de 80% du plafond tarifaire à partir d'octobre, à 3.549 livres (4.210 euros) par an pour un ménage moyen contre 1.971 livres (2.335 euros) actuellement. Selon les prévisions les plus pessimistes, le seuil pourrait même monter jusqu'à 6.000 livres (7.100 euros) début 2023. Une situation qui pourrait plonger 58% des ménages britanniques dans la pauvreté énergétique l'an prochain, selon l'université de York.

Au sein de la zone euro (les 19 pays à avoir adopté la monnaie unique), l'inflation s'est de nouveau accélérée en octobre à +10,7% sur un an contre 9,9% en septembre, selon les chiffres annoncés, le 31 octobre, par Eurostat. C'était déjà, en septembre, le plus haut niveau depuis qu'Eurostat a commencé à publier l'indicateur en janvier 1997. Signe positif toutefois, le taux de chômage dans la zone euro est tombé en septembre à son plus bas niveau historique, soit 6,6% de la population active.

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« Une inquiétude sous-jacente » qui monte en Europe

Néanmoins, « l'inquiétude face au risque de se retrouver en situation de précarité est aujourd'hui majoritaire chez les Européens interrogés », indique le sondage Ipsos/SPF. Pour 55% des sondés, ce risque est soit « plutôt important » soit « très important » dont 70% chez les Italiens, en tête du classement des six pays concernés par l'étude, 68% chez les Grecs. Selon Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire, si cette crainte est « devenue extrêmement forte depuis ces six derniers mois », elle est, au regard des réponses du sondage, bel et bien « présente chez les Européens depuis deux ou trois ans ».

Ces chiffes inquiètent particulièrement le Secours populaire. « Cela devrait faire un déclic auprès des pouvoirs publics », interpelle ainsi Henriette Steinberg. « Il est impossible de ne pas voir que cela préoccupe grandement les Européens et il est temps de s'occuper à sa juste mesure de cette inquiétude sous-jacente qui monte, car une fois à son paroxysme, il est très difficile d'y répondre », prédit-elle, espérant que ce sondage fasse office de « signal d'alarme ».

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ZOOM - Les Grecs particulièrement touché par la précarité

Alors qu'une grande majorité des Européens sondés par l'étude Ipsos/SPF confient rencontrer des difficultés financières causées par la flambée des prix, pour les Grecs, la situation semble particulièrement critique. En effet, si un Européen sur quatre se dit en situation précaire, ce chiffre monte à un sur deux (51%) en Grèce. En outre, 68% des Grecs craignent « de se retrouver en situation de précarité ».

Par ailleurs, 88% des sondés en Grèce affirment que, souvent ou parfois, ils ne savent « plus sur quelles dépenses faire des compromis car (ils ont) déjà réduit tout ce qui pouvait l'être ». De même, « les parents grecs sont de loin les plus nombreux (parmi ceux des six pays interrogés, ndlr) à avoir connu récemment » une situation telle que « ne pas pouvoir donner à votre enfant une alimentation suffisamment variée (fruits, légumes, protéines...) », « renoncer à ce que votre enfant parte en vacances » ou encore « continuer à habiller votre enfant avec des vêtements trop petits ».

Et pour cause, en Grèce, l'inflation a enregistré une augmentation de 12% sur un an au mois de septembre et le prix du gaz a plus que quadruplé (+332%). Pour tenter d'aider sa population à y faire face, le gouvernement a annoncé, le 2 novembre, l'obligation pour les supermarchés du pays de constituer « le panier du ménage », une liste d'au moins 51 catégories de produits de consommation courante à des prix plus bas. Outre les produits d'alimentation de base allant du pain et du lait au sucre, en passant par le café et les aliments pour bébés, cette liste comprend également des produits d'hygiène et de nettoyage, a indiqué le ministère du Développement et des Investissements, Adonis Georgiadis. « Notre but est de protéger le consommateur face à la crise inflationniste mondiale », a écrit ainsi le ministre sur Twitter.

Coline Vazquez
Commentaires 9
à écrit le 05/11/2022 à 17:41
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Pendant ce temps : Non ce n’est pas en Chine. Les Pays-Bas veulent obliger leurs banques à stocker toutes les transactions supérieures à 100 euros dans une grande base de données. Ce projet du gouvernement néerlandais de suivre la quasi-totalité d...

à écrit le 05/11/2022 à 9:41
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"Hausse des prix de l'électricité, du gaz, du carburant, hyper inflation.." Donc ,c'est bien lié aux sanctions contre les russes.

à écrit le 05/11/2022 à 9:18
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"dont 70% chez les Italiens, en tête du classement des six pays concernés par l'étude" En parlant d'italien : C’est une nouvelle qui pourrait faire réagir certains soignants non vaccinés et toujours suspendus en France. Ce lundi 31 octobre, la Pr...

à écrit le 04/11/2022 à 22:04
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C'est pas ce que disent les médias télévisuels ..Les Francais n'ont pas à se plaindre avec tout ce que fait l'état pour les aider .100 milliards de l'argent de leurs enfants que l'état à mis dans le tonneau des danaides des differentes bourses mondi...

le 05/11/2022 à 8:21
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L'ETat, c'est toi. A chaque fois que le gouvernement dit "L'Etat va prendre ceci en charge, ou cela ou va subventionner tel secteur ou activité", c'est de ta poche qu'il s'agit. C'est toi, tes enfants, petits enfants qui vont payer les dettes accumul...

à écrit le 04/11/2022 à 15:06
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"et plus d'un sur deux a le sentiment que son pouvoir d'achat a diminué " Le mot "sentiment " est à la mode en ce moment

à écrit le 04/11/2022 à 6:51
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impossible!! ce sont des propos d'ultraneo monetaristes intolerants!!! tout le monde sait a gauche que l'inflation permet au contraire de faire de la bonne depense publique gratuite ' payee par personne', et des bons services publics bienveillants......

à écrit le 04/11/2022 à 6:38
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Le traité européen devait créer de la richesse et améliorer notre qualité de vie. Autant revenir au marché commun qui fonctionnait largement mieux. Les anglais l'ont compris, eux !

le 04/11/2022 à 10:38
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"les anglais " sont en bien plus mauvaise posture que la population de l'UE !

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