Pacte migratoire de l'UE : le Parlement européen adopte cet accord majeur

Les eurodéputés ont voté ce mercredi le texte européen sur la vaste réforme de la politique migratoire européenne, fruit d'un difficile compromis sur un sujet qui a alimenté tensions et divisions entre les Vingt-Sept depuis des années.
Le nouveau texte, baptisé « Pacte sur la migration et l'asile », entend durcir les contrôles des arrivées aux frontières du bloc et mettre en place un système de solidarité entre États membres.
Le nouveau texte, baptisé « Pacte sur la migration et l'asile », entend durcir les contrôles des arrivées aux frontières du bloc et mettre en place un système de solidarité entre États membres. (Crédits : Reuters)

[Article publié le mercredi 10 avril à 17h38, mis à jour à 18h46] Après de nombreux débats et bras de fer, le « Pacte sur la migration et l'asile » a été adopté par le Parlement européen ce mercredi, en fin d'après-midi, lors d'une session plénière à Bruxelles, brièvement interrompue par les protestations de militants hostiles à cette réforme.

« Nous avons écrit une page d'histoire », s'est réjouie la présidente du Parlement européen Roberta Metsola. « Cela fait plus de dix ans que nous y travaillons. Mais nous avons tenu parole. Un équilibre entre solidarité et responsabilité. Telle est la voie européenne », a-t-elle réagi sur X.

 Le chancelier allemand Olaf Scholz y a vu un « pas historique indispensable (qui) limite la migration irrégulière et soulage enfin les pays qui sont particulièrement touchés ».  « Merci d'avoir eu le courage de faire des compromis », a salué la commissaire européenne aux Affaires intérieures Ylva Johansson, saluant une « grande réussite ».

Un texte majeur

Ce nouveau texte entend durcir les contrôles des arrivées aux frontières du bloc et mettre en place un système de solidarité entre États membres. Pour rappel, il a fait l'objet d'un accord politique en décembre et a été approuvé en février en commission parlementaire, avec l'objectif d'une adoption finale avant les élections européennes de juin.

Lire aussiImmigration : « accord historique » trouvé sur une vaste réforme de la politique migratoire dans l'UE

Dans le détail, la réforme met en place un « filtrage » obligatoire des migrants arrivant aux frontières de l'UE, consistant à les enregistrer dans la base de données commune, Eurodac. Une « procédure à la frontière » est prévue pour ceux qui sont statistiquement les moins susceptibles d'obtenir l'asile : ils seront retenus dans des centres le temps que leur dossier soit examiné de façon accélérée, dans le but de renvoyer les déboutés plus rapidement.

Avec des pour...

Depuis ce mardi, néanmoins, les différents rapporteurs de ces textes exprimaient leur inquiétude sur l'issue du vote. Finalement, la majorité a fait plier le vote en faveur du texte.

« Ce pacte ne résoudra pas tout, mais c'est un pas en avant, un pas de géant », a déclaré dans l'hémicycle l'eurodéputée française Fabienne Keller (Renew Europe, centristes et libéraux), par ailleurs rapporteure de l'un des règlements-clés, portant sur les procédures d'asile. Voter contre ce pacte c'est « offrir une victoire à l'extrême droite européenne », estime-t-elle.

L'ensemble des trois principales familles politiques européennes - PPE (droite), Socialistes et démocrates (S&D) et Renew Europe - étaient favorables à ce Pacte migratoire. Celui-ci est basé sur une proposition de la Commission présentée en septembre 2020 après l'échec d'une précédente tentative de réforme, dans la foulée de la crise des réfugiés de 2015-2016.

« C'est un moment historique. En tant qu'Européens, après huit ans de discussions intensives, nous avons trouvé un compromis entre une protection stricte des frontières contre les passeurs et la mafia, d'une part, et le maintien de nos valeurs, l'asile et la convention de Genève, d'autre part », a indiqué à l'AFP Manfred Weber, président du PPE, avant l'ouverture des débats, reconnaissant toutefois que le vote sera « serré ».

 ...et des contre

A l'opposé, s'inquiétant des « détentions de familles avec enfants » et une « criminalisation » des exilés, quelque 161 organisations de défense des droits humains - dont Human Rights Watch, Amnesty International, l'International Rescue Committee, ou encore Oxfam - ont appelé les eurodéputés à rejeter le Pacte. Mêmes griefs à gauche de l'échiquier politique. « C'est un effondrement des valeurs », a fustigé l'élu français Mounir Satouri (Verts).

En outre, la règle en vigueur selon laquelle le premier pays d'entrée dans l'UE d'un migrant est responsable de sa demande d'asile est maintenue avec quelques aménagements. Mais pour aider les pays où arrivent de nombreux exilés, comme l'Italie, la Grèce ou l'Espagne, un système de solidarité obligatoire est prévu. Les autres États membres doivent ainsi contribuer en prenant en charge des demandeurs d'asile (relocalisations) ou en apportant une contribution - financière ou matérielle - au profit du pays sous pression migratoire. Une façon de tenter de surmonter l'opposition de la Hongrie et la Pologne à tout quota de réfugiés - même si ces deux pays restent hostiles à la réforme. Une proposition toutefois fustigée par l'extrême droite. L'eurodéputé français Jordan Bardella (groupe Identité et démocratie), a ainsi accusé l'UE d'avoir choisi « la voie de la faiblesse et celle de l'appel d'air ».

Lire aussiLampedusa : Ursula von der Leyen présente un plan pour aider l'Italie face à l'immigration illégale

Zones d'ombre à éclaircir

Après le vote de ce mercredi, le Pacte devra encore être formellement approuvé par les États membres. La Commission européenne présentera d'ici juin un plan de mise en œuvre. Car de nombreuses questions sont laissées en suspens, suscitant des incertitudes sur le fonctionnement du système.

En parallèle de cette réforme, qui ne s'appliquera que courant 2026, l'UE multiplie les accords avec les pays d'origine et de transit des exilés (Tunisie, Mauritanie, Egypte) pour tenter de réduire le nombre d'arrivées à ses frontières. Ses membres font face à une hausse des demandes d'asile, qui ont atteint 1,14 million en 2023, soit leur plus haut niveau depuis 2016, selon l'Agence européenne pour l'asile. Les entrées « irrégulières » dans l'UE sont elles aussi en augmentation, à 380.000 en 2023, selon Frontex.

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 11/04/2024 à 8:30
Signaler
De belles paroles, peu d’actions. Les Européens s’opposent à leur manière en prétendant rendre le monde entier heureux. Les mesures prévues – comme toutes les mesures précédentes – ne résoudront pas le problème. Citation du regretté journaliste allem...

à écrit le 10/04/2024 à 19:21
Signaler
Mais ils sont tous déjà ici c'est trop tard

à écrit le 10/04/2024 à 18:42
Signaler
Ces reglèments ne changeront rien. Si on veut contoler l'immigration il faut devenir moins attractif sur le plan des prestations sociales(les reduire à zero), des aides (idem) et du travail au noir (sanctions et controles à multiplier). Il faudrait a...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.