Les banques britanniques encore un peu plus sous pression

La décision de la Banque d’Angleterre d’abaisser son taux directeur d’un quart de point pourrait élaguer de 2% à 3% les résultats des banques britanniques les plus présentes au Royaume-Uni, selon Citigroup.
Christine Lejoux
RBS a prévenu qu'un éventuel passage du taux directeur de la BoE en territoire négatif pourrait la conduire à facturer les dépôts de sa clientèle professionnelle.

On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs. C'est peut-être ce que se sont dit les membres du Comité de politique monétaire de la Banque d'Angleterre, jeudi 4 août, en décidant à l'unanimité de baisser d'un quart de point le taux directeur de l'institut d'émission, à 0,25%, son plus bas niveau historique. Cet abaissement du loyer de l'argent, une première au Royaume-Uni depuis la crise économique et financière de 2009, a certes pour objectif de relancer des dépenses d'investissement et de consommation que le vote en faveur du Brexit, avec son cortège d'incertitudes, est en train de gripper. Mais, revers de la médaille, la baisse de 0,25 point du taux directeur de la Banque d'Angleterre va mettre encore un peu plus sous pression la rentabilité de l'industrie bancaire britannique, qui, comme celle de l'ensemble du secteur en Europe, commence à payer un lourd tribut aux politiques monétaires accommodantes des banques centrales.

Tout simplement parce qu'une grande partie des revenus des banques provient de la marge nette d'intérêt, c'est-à-dire de l'écart entre les taux longs, auxquels elles prêtent, et les taux courts, sur la base desquels elles se financent. Or l'aplatissement de la courbe des taux, qui fait qu'il n'est pas beaucoup plus onéreux d'emprunter à long terme qu'à court terme, détruit cette belle mécanique. Surtout au Royaume-Uni, où la plupart des prêts aux particuliers et aux entreprises étant à taux variable, une baisse des taux de la banque centrale se transmet rapidement à l'économie via le circuit bancaire. Selon les analystes de Citigroup, la décision de la Banque d'Angleterre pourrait amputer les résultats des grandes banques britanniques les plus exposées au Royaume-Uni de 2% à 3%, dans un premier temps.

Lloyds va procéder à 3.000 nouvelles suppressions de postes

Les experts de Citigroup estiment en revanche l'impact à 1% « seulement » sur les comptes de HSBC, compte tenu du profil beaucoup plus international de la banque sino-britannique. Dès le 3 août, soit la veille de l'annonce de la décision de la Banque d'Angleterre, HSBC avait néanmoins averti qu'une diminution d'un quart de point du taux de la BoE (Bank of England) lui coûterait 100 millions de dollars (90 millions d'euros) de revenus d'intérêt, cette année. Et que cet impact s'élèverait à 200 millions de dollars en 2017, sous réserve que la BoE n'abaisse pas à nouveau son taux directeur. Barclays estime de son côté que le geste de la Banque d'Angleterre devrait élaguer de 82 millions de livres (97 millions d'euros) les revenus d'intérêt de ses activités au Royaume-Uni.

Quant à Lloyds Banking Group, elle évalue le retentissement sur sa marge d'intérêt à 100 millions de livres, pour les douze prochains mois. Il faut dire que cette dernière va devoir réviser rapidement les prix de 70 milliards de livres de crédits à taux variable. Une contrainte qui n'est pas étrangère à sa récente décision de supprimer 3.000 emplois supplémentaires. Lloyds, outre les changements de comportement des consommateurs, de plus en plus friands de services bancaires à distance, avait en effet invoqué « le maintien d'un environnement de taux d'intérêt bas pendant plus longtemps que prévu. »

Le remède en même temps que le mal ?

De fait, les banques n'ont pas beaucoup d'autres alternatives aux réductions de coûts pour tenter de compenser l'effet négatif des taux ultras bas sur leur rentabilité. RBS a bien prévenu qu'un éventuel passage du taux directeur de la BoE en territoire négatif, à l'image de ceux de la Banque centrale européenne et de la Banque du Japon, pourrait la conduire à facturer les dépôts de sa clientèle professionnelle. Mais il s'agirait d'une première au Royaume-Uni, pareille initiative pouvant être lourde de conséquences sur le plan commercial.

En définitive, c'est peut-être la BoE, qui, en même temps que le mal, a apporté un remède éventuel : outre la baisse de 0,25 point de son taux directeur et l'injection de liquidités supplémentaires dans l'économie, la Banque d'Angleterre a créé le « Term Funding Scheme », qui permettra aux banques britanniques d'avoir accès à un total de 100 milliards de livres de prêts auprès de la banque centrale, à des conditions très avantageuses, et ce, sur une période de quatre ans. Reste à savoir si cela permettra de contrebalancer les conséquences négatives de la baisse du taux directeur sur les marges d'intérêt des banques.

Christine Lejoux

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Commentaires 5
à écrit le 09/08/2016 à 12:17
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Il est de plus en plus évident que nous sommes à la fin d'un cycle. Rien ne va plus dans l'économie mondiale globalisée parce que la mondialisation a été raté. La dérégulation financière en est la cause principale. Les banques ont bien profité, trop,...

à écrit le 09/08/2016 à 9:41
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La BoE suit le même processus que les autres banques centrales, Brexit ou pas, c'est à dire lutter contre la dépression économique par des taux directeurs bas et injecter des liquidités. Bon article qui montre, en fait, la fragilité du système bancai...

à écrit le 08/08/2016 à 14:09
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Je ne pense pas que la Banque d’Angleterre abaissera encore ce taux, sauf circonstance exceptionnelle imprévisible, d’autant qu’il n’y a pas de souci sur la dette d’État puisqu’il y a aussi un quantitative Easing renforcé de la Banque d’Angleterre su...

le 08/08/2016 à 15:43
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Aujourd'hui dans une circonstance exceptionnelle, le Brexit, personne ne peut avoir une vision de la finance de la GB. Demain cela dépendra des accords de sortie si ceux ci ont un impact fort sur lA finance alors la GB a de gros soucis à se faire car...

à écrit le 08/08/2016 à 9:23
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Le remède n'est certainement pas en tout cas de virer des salariés qui fera uniquement que faire plonger encore un peu plus le pouvoir d'achat et donc la croissance. Nous payons vraiment très cher la dictature de l'économie sur la politique.

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