De Snap à Aramco, des introductions en Bourse géantes en 2017

Après une année en chute libre, le nombre des entrées en Bourse et les montants levés devraient repartir en flèche dans les prochains dix-huit mois, en particulier dans le secteur du pétrole et de la technologie.
Delphine Cuny
La maison-mère de l'appli Snapchat, qui a cartonné à Noël avec ses lunettes-appareil photo Spectacles à 130 dollars, devrait être la plus grosse IPO depuis Facebook en 2012.

La pire année depuis la crise financière ! Le marché des introductions en Bourse (IPO) a connu une forte baisse en 2016, tant en nombre d'opérations qu'en montants de capitaux levés, tant aux Etats-Unis qu'en Europe. C'est la grande volatilité des marchés financiers, accrue par les incertitudes et surprises politiques (Brexit, Trump), qui a dissuadé les candidats, bien que les indices, américains et britanniques, aient fini l'année à des niveaux proches de leur plus-haut. Même en Asie, où ont eu lieu 60% des opérations, la tendance est au recul.  

Selon les chiffres du cabinet EY, ce sont 16% d'introductions en moins qui se sont déroulées l'an passé dans le monde et les sommes levées en cumulé ont chuté de 33%, à 132,5 milliards de dollars. Seulement 21 opérations ont dépassé le milliard de dollars, contre 35 l'année d'avant. Aux Etats-Unis, les montants sont retombés à leurs niveaux de la crise financière (-37% par rapport à l'année précédente).

IPO aux US récession 2016

[Les montants levés aux Etats-Unis sont au plus bas depuis la crise financière. Crédit : Bloomberg]

La plus massive revient à la banque postale chinoise (7,6 milliards de dollars à Hong Kong en septembre). C'est aussi une entreprise chinoise, la société de livraison ZTO Express, qui a signé la plus grosse IPO des marchés américains (1,4 milliard), devant la messagerie coréo-japonaise Line (1,3 milliard) et le géant de l'assurance-vie américain Athene Holdings (1,08 milliard).

IPO dans le monde 2016

[Répartition géographique du nombre d'opérations et des montants levés, Europe-Moyen-Orient-Inde-Afrique, Amériques, Asie-Pacifique sur l'année à fin 2016. Crédit : EY]


Méga-opérations dans l'énergie en Europe

En Europe aussi, la baisse est très marquée, en nombre d'opérations et en montants levés, réduits de moitié quasiment, à 28,4 milliards d'euros, selon les chiffres du cabinet PwC. Pourtant, le Vieux continent a connu quelques méga-introductions, du jamais-vu depuis 2000, notamment celle du danois Dong Energy (2,3 milliards d'euros) et celle d'Innogy, la filiale d'énergie verte de l'allemand RWE (5 milliards).

Londres en a perdu sa première place, avec 6,4 milliards d'euros levés (-60%), détrônée par Copenhague (7,7 milliards d'euros au total), tout en restant devant Francfort (5,5 milliards), grâce à son marché alternatif non réglementé AIM. L'effet Brexit a joué, en particulier au second semestre, même si la plus grosse opération (le fabricant de matériel médical Convatec pour 1,7 milliard d'euros) a été réalisée au quatrième trimestre.
 
En France, après deux années fastes (avec l'entrée de Spie et d'Amundi), les introductions ont nettement marqué le pas à la Bourse de Paris : seulement 9 opérations sur le marché réglementé d'Euronext (contre 22 l'année précédente) plus 11 sur Alternext (contre 20), le tout pour 1 milliard d'euros de capitaux levés au total, selon les chiffres d'Allegra Finance. Fin novembre, la chaîne d'optique Alain Afflelou, qui espérait lever 200 millions d'euros, a préféré repousser l'opération à 2017. Selon PwC, il y aurait eu 34 abandons ou reports en Europe l'an passé, comparés à plus de soixante en 2015.

intros IPO Paris

 [Les introductions sur Euronext en 2016. Crédit : Allegra Finance]

Des "licornes" au galop en 2017

Les perspectives semblent bien meilleures et tout laisse croire en un net rebond cette année. Plusieurs opérations sont d'ores et déjà dans les tuyaux. En particulier à Wall Street, où Snap Inc, la maison-mère de l'appli de partage de photos et vidéos éphémères Snapchat, a discrètement déposé son prospectus et viserait une entrée sur le Nasdaq dès le mois de mars.

La jeune société californienne, qui a cartonné à Noël avec ses lunettes-appareil photo Spectacles à 130 dollars, envisagerait de lever 4 milliards de dollars et pourrait être valorisée entre 20 et 25 milliards de dollars (19 et 24 milliards d'euros). L'opération, pilotée par Morgan Stanley et Goldman Sachs, serait la plus importante IPO de l'Internet depuis celle de Facebook en 2012 - le réseau social avait été valorisé 90 milliards et avait levé 16 milliards dans des circonstances chaotiques.

Une entrée réussie de cette star de la Silicon Valley pourrait servir de baromètre et ouvrir les marchés à d'autres « licornes », ces entreprises en forte croissance valorisées plus d'un milliard de dollars avant leur introduction en bourse. Plusieurs sont attendues de pied ferme, telles que le mystérieux géant du big data Palantir (auquel a recours la CIA), valorisé dans les 20 milliards, le service de cloud Dropbox, la messagerie d'entreprise Slack, et surtout le très conversé service de VTC Uber dont la dernière levée de fonds l'a valorisé quelque 68 milliards de dollars !

Le suédois Spotify pourrait aussi se décider. En début d'année dernière, la société de streaming musical avait émis pour un milliard de dollars d'obligations convertibles sur la base d'une valorisation de 8,5 milliards de dollars.

Si certaines entreprises ont reporté leur projet d'introduction, à l'image de la Fintech américaine SoFi qui a préféré attendre, après les turbulences créées par l'affaire LendingClub, d'autres vont plutôt accélérer le mouvement de peur d'une flambée de la volatilité après quelques mois de présidence Trump: plusieurs sociétés de logiciels d'entreprises, à l'image d'Avalara, MuleSoft, ForeScout Technologies, AppDynamics et Yext, selon Reuters, sont déjà dans les starting-blocks.


Pleins feux sur l'or noir

En dehors de la tech, le secteur de l'énergie devrait fournir des bataillons garnis de candidats à une entrée en Bourse. Aux Etats-Unis, on évoque déjà une quarantaine de (plus ou moins) petites pétrolières qui veulent profiter de la remontée des prix du baril, de la baisse de production décidée par les pays de l'Opep et de la probable déréglementation à venir sous l'administration Trump.

Sans oublier ce qui pourrait être la plus importante introduction en bourse de l'histoire, le joyau de l'Arabie saoudite, la société Aramco. La compagnie pétrolière, qui avait été nationalisée en 1980, aurait une valorisation astronomique comprise entre 2.000 et 3.000 milliards de dollars ! Le royaume wahhabite, qui cherche à diversifier ses sources de revenus, envisage d'en céder moins de 5% dans un premier temps (et non 49% comme indiqués dans certains médias), d'ici à 2018. Soit tout de même une opération à 100 ou 150 milliards de dollars ! La place boursière n'a pas été encore arrêtée et Riyad n'exclut pas Londres, Hong Kong ou New York. Toutes les banques d'affaires de la planète sont sur le coup, alléchées par de prometteuses commissions.

Delphine Cuny

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Commentaire 1
à écrit le 03/01/2017 à 8:54
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Une rengaine récurrente, tandis que les peuples se paupérisent doucement mais surement, les riches deviennent plus riches. "Oui il y a bien une lutte des classes mais c'est ma classe qui la fait et nous gagnons." W. Buffet

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