La BNP, favorite de Berlin pour fusionner avec Commerzbank ?

Le gouvernement allemand préférerait le groupe français à l'italien UniCredit pour lui céder ses 15% du capital de la deuxième banque du pays. No comment chez BNP Paribas.
Delphine Cuny
Les deux banques viennent de se séparer dans le crédit à la consommation en Allemagne. Mais le marché allemand est l'une des priorités de développement du groupe français.

[Article publié à 13h40 et mis à jour à 17h05]

L'Etat allemand semble bien vendeur de sa participation dans la deuxième banque du pays, Commerzbank, mais veut choisir son acquéreur. Approché par le groupe italien UniCredit selon l'agence Reuters, le gouvernement d'Angela Merkel privilégierait une solution franco-allemande, une fusion avec le français BNP Paribas, selon l'hebdomadaire financier WirtschaftsWoche  (WiWo), citant des sources dans "les milieux financiers de haut rang". Le ministère allemand des Finances a déclaré qu'aucun mandat officiel n'a été accordé pour la vente des 15,6% qu'il détient et n'a pas souhaité s'exprimer sur des acheteurs potentiels.

"Nous voulons parvenir à un bon résultat pour le contribuable allemand", avait déclaré à la presse la veille un porte-parole du ministère.

Dans l'après-midi, le ministère a démenti favoriser une fusion de Commerzbank avec BNP, ajoutant :

"L'article du Wirtschaftswoche n'est pas correct. Il n'y a aucune négociation"

Contacté, BNP Paribas ne fait aucun commentaire.

L'action Commerzbank bondit de plus de 3,5% ce jeudi à la Bourse de Francfort. Celle de BNP Paribas s'adjuge 1,3%, dans un contexte porteur pour les valeurs bancaires européennes au lendemain des annonces de la Fed sur les prochaines hausses de taux d'intérêt.

Un Airbus de la banque ?

L'Etat allemand cherche-t-il à faire monter les enchères pour sa participation actuellement valorisée 2 milliards d'euros ? En 2008-2009, en pleine crise financière, Berlin avait injecté au total 18 milliards d'euros dans Commerzbank, qui en a remboursé 14,3 milliards en 2011. Ou bien rêve-t-il de construire "un Airbus de la banque" ? Le WiWo indique que la création d'une "solide institution franco-allemande pourrait signaler un approfondissement de l'union bancaire européenne".

Sa préférence pour BNP Paribas tient peut-être aussi aux fondamentaux du groupe français, qui a l'avantage d'être la première banque de la zone euro en actifs - seule la britannique HSBC la devance - et la deuxième en capitalisation boursière (83 milliards d'euros, derrière Banco Santander), avec un total de bilan de 2.076 milliards d'euros, proche du PIB annuel de la France. De son côté, UniCredit est engagé dans un vaste plan de transformation : les analystes de Jefferies estiment qu'une opération de fusion avec Commerzbank, aux lourds risques d'exécution, semble peu probable à court terme.

BNP Paribas connaît bien le marché allemand, qu'il cite comme "une cible de développement" dans son plan stratégique 2020, notamment dans le segment des entreprises du Mittelstand, la clientèle de Commerzbank. Le groupe a d'ailleurs nommé en janvier dernier un nouveau patron pour l'Allemagne, Lutz Diederichs, venu de HypoVereinsbank (filiale d'UniCredit) afin de renforcer le positionnement de BNP sur ce "marché prioritaire pour le groupe".

BNP en Allemagne

[Plan 2017-2020 de BNP Paribas, mars 2017.]

Une surcharge en fonds propres ?

BNP possède aussi la banque en ligne Consors bank!, qu'il a fusionnée avec DAB, qui compte 1,5 million de clients. Le groupe français a aussi récemment acquis, avec PSA, 50% des activités de financement auto d'Opel. En revanche, dans le crédit conso, la co-entreprise qu'il avait créée en 2010 avec Commerzbank, vient d'être dissoute, la banque allemande souhaitant développer seule cette activité sur le numérique ; BNP poursuivant la sienne désormais sous la marque Consors Finanz. Une séparation dont la suite logique ne semblait pas forcément un mariage...

Les analystes de Jefferies estiment qu'il y a une complémentarité stratégique entre les deux acteurs, hissant BNP au rang de premier financeur des PME allemandes et apportant des synergies aussi en Pologne. Cependant, ils relèvent que l'ensemble fusionné aurait un bilan de 2.630 milliards d'euros, ce qui la ferait grimper sur le podium des banques d'importance systémique mondiale, aux côtés deJP Morgan et Citigroup, et devrait se traduire par un relèvement des contraintes imposées en matière de surplus de fonds propres à immobiliser (mesure prise après la crise financière pour renforcer les banques "too-big-to-fail", trop grosses pour faire faillite), de 2% à 2,5%, soit 2 milliards d'euros de plus. Exactement ce que veulent éviter les banques européennes afin de ne pas diminuer le rendement de leurs capitaux propres.

Delphine Cuny

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