La Fintech Moment s’attaque aux retards de paiement qui fragilisent les PME

Née dans le laboratoire d'innovation d'Eulers Hermes (filiale du groupe Allianz), Moment a développé une assurance contre les factures impayées spécifiquement dédiée aux TPE et PME. Ces petites structures, très affectées par les retards de paiement, sont paradoxalement peu couvertes contre ce type de risque. Moment n'est pas la seule Fintech à s'y intéresser.
Juliette Raynal
(Crédits : Moment)

S'assurer contre les factures impayées. C'est le concept de l'assurance crédit et le créneau sur lequel s'est spécialisée la Fintech Moment, née en juin 2018 et dont l'offre est disponible depuis quelques jours.

Peu connue du grand public, cette assurance dédiée aux entreprises comprend une analyse financière des clients d'une société pour prévenir le risque d'un impayé, la prise en charge des opérations de recouvrement et le versement d'une indemnité en cas de non paiement, explique sur son site Euler Hermes (Allianz), un des poids lourds du secteur, avec 53% des parts de marché en France, aux côtés notamment de Coface, dont Natixis (groupe BPCE) détient 41,7% du capital.

Les TPE-PME très exposées et pourtant peu équipées

L'assurance crédit vise donc à protéger la trésorerie des entreprises, qui peut être affectée par les retards de paiement. C'est le cas notamment des TPE et PME. Dans son dernier rapport, le think tank Terra Nova rappelle que, pour ces dernières, le coût des retards de paiement en termes de trésorerie est passé de 11 milliards d'euros en 2013 à 19 milliards en 2018, citant les chiffres de l'Observatoire des délais de paiements de la Banque de France. Par ailleurs, 25 % des faillites qui touchent les TPE PME sont dues aux retards de paiement.

Paradoxalement, ce produit financier qui permet d'optimiser la gestion des fonds immédiatement disponibles, est peu utilisé par les plus petites structures, leur conception et leur mode de distribution étant pensés pour les entreprises de plus grandes tailles. Le taux de pénétration de l'assurance crédit parmi les PME stagne ainsi aux alentours de 0,25%.

Partant de ce constat, la startup Moment a développé une plateforme en ligne permettant de s'assurer à la facture. Une approche plus flexible que le modèle traditionnel où l'entreprise est obligée de confier la totalité de son chiffre d'affaires à un assureur sur une période définie.

Une assurance à la facture

Avec Moment, une fois inscrite en ligne, l'entreprise cliente n'a qu'à télécharger sa facture. Si cette dernière est éligible à une assurance, l'entreprise percevra 90% du montant de sa facture dès le retard de paiement observé, sans qu'elle ait à attendre un délai de carence. Moment se charge ensuite des relances pour le recouvrement, puis l'entreprise cliente perçoit les 10% restants une fois la facture réglée. La Fintech, elle, se rémunère en prélevant une commission de 2% du montant de chaque facture assurée.

Pour l'heure, Moment a testé son offre auprès d'une vingtaine d'entreprises clientes, dont la plateforme de recrutement Talent.io. "En moyenne, grâce à notre solution, un client économise 19 jours de trésorerie par facture. Autrement dit, s'il n'avait pas assuré sa facture, il enregistrerait 19 jours de retard de paiement en plus par facture", explique Raphael Kakon, le cofondateur et directeur général de Moment.

Des relations étroites avec l'innovation d'Euler Hermes

La jeune Fintech n'est pas née ex nihilo. Le projet a germé dans le laboratoire d'innovation d'Euler Hermes.

"Au sein d'Euler Hermes, je menais des recherches sur le besoin des petites entreprises. Le projet est finalement sorti du groupe pour devenir une entreprise à part entière", raconte Raphael Kakon.

Malgré cette indépendance, la startup entretient des liens étroits avec la filiale du groupe Allianz. Euler Hermes est ainsi l'assureur partenaire de Moment qui n'a que le statut de courtier en assurance. Autrement dit, lorsqu'une entreprise se protège d'un retard de paiement via la plateforme Moment, une assurance est systématiquement souscrite auprès d'Euler Hermes.

Le géant de l'assurance crédit soutient également financièrement la jeune pousse. "Il ne s'agit toutefois pas d'un investissement de corporate venture", tient à préciser Raphaël Kakon. "Eurler Hermes a investi 1,5 million d'euros par l'intermédiaire du fonds IDinvest qui gère cette enveloppe. Nous avons donc à notre board un associé d'IDinvest", détaille-t-il.

Une autre Fintech concurrente

Moment, qui emploie aujourd'hui une dizaine de personnes, ambitionne de devenir le partenaire de référence des petites entreprises sur le retard de paiement. Pour se faire connaître, elle mise sur des intégrations dans des logiciels de facturation populaires chez les TPE et PME, comme Sellsy et Zervant. Pour attirer de nouveaux prospects, elle compte également s'appuyer sur un produit d'appel. "Nous allons proposer gratuitement notre service de relance à l'amiable", indique l'entrepreneur.

Grâce à cette stratégie, Moment entend se différencier d'une autre jeune pousse concurrente, portée également par un ancien salarié d'Eurler Hermes. Née à Londres mais cofondée par le français Louis Carbonnier, la Fintech Hokodo s'est elle aussi spécialisée dans l'assurance crédit à la facture pour les TPE et PME. Hokodo a déjà levé 2 millions d'euros et a bénéficié d'une aide équivalente de la part de la Commission européenne dans le cadre du programme H2020. Elle vise 100 millions d'euros de factures assurées d'ici juin 2020. Moment, elle, ne communique pas d'objectif chiffré.

Juliette Raynal

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Commentaire 1
à écrit le 30/10/2019 à 9:58
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l'enfer est pave de bonnes intentions j'attend de voir la suite

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