Pourquoi BPCE ne lancera pas une vraie banque mobile en France

Le groupe Banques Populaires Caisses d'Epargne, qui avait acheté la banque mobile allemande Fidor en 2016, a finalement décidé de la lancer en version light, sans licence bancaire, et de prendre son temps.
Delphine Cuny
Fidor Bank, la banque mobile communautaire allemande rachetée par BPCE il y 18 mois, compte 250.000 clients en Allemagne.
Fidor Bank, la banque mobile communautaire allemande rachetée par BPCE il y 18 mois, compte 250.000 clients en Allemagne. (Crédits : Fidor)

Il y a un an, François Pérol, le président de BPCE (Banques Populaires Caisses d'Epargne), avait annoncé le lancement « courant 2017, plutôt au deuxième semestre, en France et dans un certain nombre de pays européens » de Fidor, la banque mobile allemande rachetée à l'été 2016, qui compte 250.000 clients en Allemagne. Décrite comme une « startup technologique avec une licence bancaire », elle était vouée à devenir « un des leaders européens sur le segment de la banque mobile communautaire. » Ce mercredi, François Pérol a reconnu que le deuxième groupe bancaire français, le seul à ne pas disposer de banque en ligne, avait du retard.

« Tout le monde a du retard quand on lance une banque », a-t-il plaidé, en s'exprimant au Paris Fintech Forum juste après le Pdg d'Orange, qui avait dû repousser le lancement d'Orange Bank de plusieurs mois l'an dernier.

Surtout, le patron de BPCE, qui s'interrogeait il y a tout juste un an sur « la façon dont nous faisons en France » avec Fidor, a choisi un lancement en mode profil bas.

« Fidor ne sera pas une banque, tout au moins en France, et dans une première phase. Ce sera un modèle plus léger, moins coûteux, sans licence bancaire, un modèle DSP2 [la nouvelle directive européenne sur les services de paiements, ndlr], sans une énorme équipe de conformité, avec un peu moins de discussions avec le régulateur », a-t-il justifié.

| Lire aussi : Paiement : la directive DSP2 entre en vigueur, c'est quoi ?

François Pérol BPCE  Fintech Fidor

[François Pérol au Paris Fintech Forum. Crédits : DC]

Etablissement de paiement, non de crédit

Plusieurs raisons à cela : il existe déjà une multitude de « néobanques ». Outre la récente Orange Bank (50.000 comptes à fin 2017), il y a Compte Nickel (racheté par BNP Paribas, qui totalise 814.000 comptes ouverts depuis son lancement), l'allemande N26, qui revendique désormais plus de 200.000 clients en France, l'appli britannique Revolut (150.000 clients annoncés en France), la toulousaine Morning (rachetée par la Banque Edel) qui communique sur 103.000 utilisateurs, ou encore le compte C-Zam de Carrefour Banque (90.000 comptes ouverts en six mois en octobre). Orange Bank a une licence bancaire, N26 aussi (en Allemagne, utilisable dans toute l'Europe, comme Fidor), Revolut en a demandé une auprès du régulateur lituanien.

| Lire aussi : « Revolut veut être l'Amazon de la banque »

Compte Nickel et Morning ont le statut d'établissement de paiement, ce qui les empêche de proposer de prêt, ou tout simplement un découvert, un chéquier ou une carte à débit différé : c'est sans doute ce statut qu'adoptera Fidor en France. Moins de contraintes mais moins de possibilités aussi, à moins de réaliser des partenariats.

| Lire aussi : Orange Bank débarque après une multitude de "néobanques"

« Il y aura des outils de gestion de compte, mais pas de crédit. L'idée est de ne pas s'embarrasser de toutes les contraintes d'une banque de plein exercice, alors que le besoin n'en a pas été exprimé par la communauté », explique une source au sein du groupe mutualiste.

Une communauté de bêta-testeurs sera lancée formellement sous peu, l'offre elle-même dans le courant de cette année.

Cannibalisation et rentabilité

Ensuite, l'activité peut s'avérer difficile à rentabiliser, notamment en France. Les frais de marketing pour se faire connaître peuvent être élevés, les coûts d'acquisition (primes de bienvenue) aussi, sans parler des coûts de fonctionnement (690 salariés chez Orange Bank, dont une partie repris de Groupama Banque, à peu près autant chez Boursorama).

Orange a prévenu qu'il comptait perdre 100 millions d'euros la première année d'activité d'Orange Bank et ne prévoyait pas l'équilibre avant plusieurs années. Boursorama (Société Générale), leader de la banque en ligne en France avec plus de 1,2 million de clients, est déficitaire. Le Crédit Agricole prépare une recapitalisation de BforBank (180.000 clients). Fortuneo (Crédit Mutuel Arkéa), avec 670.000 clients en France, Belgique, Suisse et Luxembourg, affirme être rentable depuis 2004.

Enfin, BPCE ne souhaite pas cannibaliser l'activité de détail de ses deux réseaux. Le sujet de l'éventuelle concurrence des Banques Populaires et Caisses d'Epargne par Fidor est ultra-sensible en interne, nous confirment plusieurs sources.

« Fidor et les réseaux de BPCE sont diamétralement opposés et complémentaires : Fidor ne s'adresse pas au même public, notre communauté a un autre style de vie, nous apportons à BPCE un positionnement supplémentaire », nous confie Matthias Kröner, le fondateur et directeur général de Fidor. « Nous sommes une plateforme européenne et nous avons l'ambition d'être une banque digitale européenne », assure-t-il.

Chez BPCE, on insiste surtout sur les atouts technologiques de la startup allemande, notamment ses outils d'ouverture de compte ultra-rapide et de gestion des dépenses, qui sont aussi commercialisés sous marque blanche. Le patron du groupe bancaire mutualiste a également annoncé un partenariat  avec la Fintech islandaise Meniga  dont l'agrégateur de comptes sera déployé auprès des 15 millions de clients particuliers des Banques Populaires et des caisses d'Epargne.

Delphine Cuny

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Commentaire 1
à écrit le 12/02/2018 à 11:06
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Quel bordel sur ce sujet dans BPCE, entre ce que laisse sur ce dossier Marguerite et d'autres...

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