Grèce, Suisse, Croatie, Finlande, Inde, Indonésie, Égypte et Émirats Arabes Unis... Ces huit pays, qui sont intéressés à des degrés divers par le Rafale, pourraient sélectionner l'avion de combat tricolore en 2021. En revanche, l'intérêt du Bangladesh a semble-t-il fait pschittt... Depuis plusieurs mois, c'est silence radio de Dacca. Après 2015 (Égypte, Qatar et Inde, qui a finalisé son contrat début 2016), l'année 2021 pourrait être pour Dassault Aviation et pour toute l'industrie aéronautique militaire française, une très belle année Rafale sur le plan commercial. Elle permettrait à cette industrie de souveraineté nationale de traverser plus sereinement les turbulences économiques générées par la Covid-19.
Grèce, confirmation imminente pour le Rafale ?
Ce n'est plus qu'une question de jours. La ministre des Armées Florence Parly est attendue début janvier à Athènes pour signer un contrat portant sur l'acquisition par la Grèce de six Rafale neufs et douze d'occasion. Soit une commande évaluée par la presse grecque à 2,4 milliards d'euros, dont 400 millions d'euros pour les missiles de MBDA (Meteor, Scalp, Exocet). "D'ici quelques jours, le contrat d'acquisition de 18 avions Rafale de France sera signé ici à Athènes", avait annoncé mi-décembre le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis devant les députés. Une commande qui a pris un peu de retard en raison d'une procédure juridico-financière un peu plus longue à régler entre les ministères des Finances et de la Défense grecs.
Feu vert ou orange pour le Rafale en Indonésie ?
Selon nos informations, le ministre de la Défense indonésien Prabowo Subianto pourrait revenir à Paris en début d'année. Avec une bonne nouvelle ? En tout cas, les industriels français (GIE Rafale) ont remis leur offre début décembre et attendent désormais un retour de Djakarta, qui a besoin d'avions de combat dès 2023. Florence Parly est de son côté confiante dans la concrétisation du dossier, qui a "très bien avancé", avait-elle expliqué début décembre sur BFM TV. La France a fait le job mais elle ne maîtrise pas le jeu politique local entre un ministre de la Défense, très allant sur les Rafale, et un président de la République Joko Widodo, qui ont été adversaires lors des deux dernières élections présidentielles.
Le ministère de la Défense et celui des Finances doivent également se coordonner pour définir comment la facture sera réglée (crédits budgétaires, emprunt ?). Ce qui semble-t-il est loin d'être encore le cas. Enfin, le ministère des Finances devra trouver un accord avec son homologue français sur les taux d'intérêt. Le dossier n'est pas aussi simple d'autant que les Etats-Unis n'ont pas lâché l'affaire et les Russes restent très présents en Indonésie. "Plus l'affaire prend du temps, plus cela fait l'affaire des concurrents", note un observateur.
La Croatie, une "occase" pour le Rafale ?
Ce n'est pas le contrat du siècle pour la France. Loin de là (12 Rafale d'occasion au standard F3R) mais cela reste néanmoins un contrat de plus pour le Rafale. Et il serait obtenu dans un pays européen. Ce qui est clairement la priorité de la ministre des Armées même si cela pose un certain nombre de difficultés à l'armée de l'air française. Les évaluations des offres dans trois domaines (stratégique, capacitaire, financier) ont été réalisées jusqu'au 12 décembre dernier. La Commission en charge des évaluations a retenu quatre offres (France, Etats-Unis, Suède et Israël).
La France, via la Direction générale de l'armement (DGA), a proposé à Zagreb dans le cadre d'un appel d'offres 12 Rafale d'occasion pour remplacer les vieux MiG-21 de l'armée de l'air croate en service jusqu'en 2024. Les États-Unis proposent du F-16 Block 70 neuf tandis que la Suède pousse le Gripen C/D. Outre la France, Israël a présenté une offre de F-16 Block 30 d'occasion. Le dossier doit être présenté au Parlement croate, puis le gouvernement prendra la décision finale sur le choix du futur avion de combat de 4e génération. Enfin, la rédaction d'un accord intergouvernemental avec le pays sélectionné devrait être conclu d'ici à la fin de 2021 au plus tard.
Suisse, la balle du bonus pour le Rafale ?
C'est la balle du bonus. Dassault Aviation et ses concurrents internationaux peuvent à nouveau rejouer la compétition en Suisse, qui avait été gagnée en 2012 par Saab avec le Gripen contre toute attente face au Rafale. Mais une votation (référendum) sur l'achat d'avions de combat a vu le "non" gagner en 2014 au grand dam des Suédois. Cette fois, le conseil fédéral a engagé un référendum avant le résultat de la compétition. Les Suisses ont finalement donné d'une très courte tête le 27 septembre lors d'une nouvelle votation leur feu vert à Berne pour l'acquisition de nouveaux avions de combat. Au cours du deuxième trimestre 2021, le Conseil fédéral suisse procédera à la sélection des nouveaux avions de combat des forces aériennes suisses, qui seront livrés entre 2025 et 2030.
La nouvelle compétition oppose à nouveau les mêmes constructeurs à l'exception du Gripen de Saab recalé par la Suisse : l'Eurofighter Typhoon (consortium Eurofighter, Grande-Bretagne, Allemagne, Italie et Espagne), le F/A-18 Super Hornet (Boeing, États-Unis), le Rafale (Dassault Aviation, France), et, enfin, le F-35A (Lockheed Martin, États-Unis). Les quatre constructeurs ont déposé chez Armasuisse leur dernière offre le 18 novembre dernier. Ces offres devaient intégrer le prix pour 36 et 40 avions (6 milliards de francs suisses au maximum), y compris la logistique et l'armement, les propositions de coopération entre les forces armées et entre les offices d'armement des deux pays, et, enfin, les projets de compensation prévus ou d'ores et déjà engagés. C'est au cours du premier trimestre que les équipes d'Armasuisse vont élaborer des rapports d'évaluation sur les avions de combat en lice.
Finlande, une divine surprise pour le Rafale ?
En France en dépit des propos officiels, personne ne croit vraiment à un succès du Rafale en Finlande, qui doit remplacer dans le cadre du projet HX ses 64 F-18 C/D (Boeing), dont 55 sont encore en service. Un projet évalué à 12 milliards de dollars. La ministre des Armées a toutefois fait le job en allant en Finlande début décembre pour rencontrer son homologue Antti Kaikkonen. Ce pays nordique de l'Union européenne achète d'ailleurs très peu à la France (180 millions d'euros aux industriels français entre 2010 et 2019) mais a pris beaucoup plus l'habitude d'acheter de l'armement "made in USA". Les avions de combat en lice sont le F/A-18 Super Hornet Block III (Boeing), le Rafale F4 (Dassault Aviation), le Typhoon T3/4 (Eurofighter), le F-35 (Lockheed Martin) et le Gripen E (Saab). la Finlande devrait annoncer sa décision au premier trimestre 2021. Les premiers appareils devraient être livrés en 2025.
Les Américains disposent de deux avantages : l'armement qui équipe les actuels F-18 est récent et peut être installé sans problème sur un nouvel avion de combat américain ; la coopération est étroite entre la Finlande et les Etats-Unis en raison de l'entretien des F-18. Dernier point non négligeable, Helsinki pourrait lier ce projet d'achat à l'achat d'un nouveau système de défense sol-air de longue portée : Diehl Defence, Israel Aerospace Industries (IAI), Kongsberg Defence & Aerospace, MBDA UK et Rafael sont sur les rangs pour fournir cet équipement. Un appel d'offres a été lancé en octobre.
Égypte, le retour en grâce du Rafale ?
Si la visite à Paris du président égyptien, le maréchal Abdel Fattah al-Sissi, n'a pas donné lieu à des annonces fracassantes de contrats, certains dossiers ont pu être clarifiés à l'occasion de discussions informelles entre le président égyptien et certains industriels, dont Dassault Aviation. Avant l'arrivée d'Abdel Fattah al-Sissi, l'avionneur avait également un feu vert de Bercy pour relancer les négociations. Son PDG Eric Trappier serait d'ailleurs ressorti satisfait de ce rendez-vous précieux. Des équipes de l'avionneur sont d'ailleurs rapidement parties au Caire pour discuter d'une nouvelle commande, qui oscille entre 24 ou 27/30 Rafale.
Émirats Arabes Unis, nouvelle chance pour le Rafale ?
Les Émirats Arabes Unis (EAU) s'intéressent à nouveau à l'avion de combat tricolore, et plus particulièrement au standard F4 armé des missiles de croisière Scalp ainsi que des missiles air-air Meteor. Un standard très proche des demandes émiraties de 2010. Paris y croit à nouveau après l'arrêt des discussions en 2015. Au ministère des Armées, on espère vendre le Rafale aux EAU avant l'élection présidentielle de 2022. Cela passe par cette version du Rafale sinon le dossier n'arrivera même pas au prince héritier Mohamed Ben Zayed (dit MBZ), l'homme fort des EAU. Combien de Rafale ? Difficile à savoir mais on parle de 36 à 40 appareils, voire de 60.
Inde, la bonne surprise pour le Rafale en 2021 ?
Le Rafale n'est pas à l'abri d'une bonne surprise en Inde. En septembre lors de la cérémonie de livraison de cinq Rafale, le ministre de la Défense indien Shri Rajnath Singh avait été clair : "Les Rafale changent la donne pour la sécurité nationale indienne. Son introduction est un message fort pour le monde et, en particulier, pour ceux qui contestent la souveraineté de l'Inde", avait-il assuré dans son discours. Ils sont "la preuve de l'engagement du gouvernement à protéger nos frontières et maintenir la paix dans la région". La France peut-elle espérer une nouvelle commande de gré à gré de 36 Rafale avec de nouveaux offsets importants (transferts de technologies ou investissements en Inde de la part des industriels concernés) ? Ou bien Dassault Aviation devra-t-il passer par un appel d'offres international avec tous les aléas que cela comporte ? A Delhi d'y répondre. Dans ce cadre incertain, Dassault Aviation participe aux appels d'offres de l'Armée de l'Air indienne (110 avions) et de la Marine indienne (57 avions navalisés).
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