Crise aéronautique : Daher pourrait être contraint de prendre des mesures inédites

L'équipementier aéronautique pourrait être amené à se séparer de 30% de ses effectifs environ pour survivre à la crise inédite qui frappe violemment la filière. Selon la CFDT, Daher pourrait perdre 400 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2020.
Michel Cabirol
"Un redressement du chiffre d'affaires et un retour à l'équilibre ne semblent pas envisageables avant 2022 ou 2023", a précisé la CFDT Daher.

La crise est d'une violence inouïe pour la filière aéronautique. Si les maîtres d'oeuvre, notamment Airbus et Boeing, souffrent et doivent s'adapter en réduisant drastiquement la voilure, les sous-traitants vont trinquer. Le cortège des plans de suppressions d'emplois va aller en s'amplifiant tout au long des prochaines semaines. C'est déjà le cas d'une des très belles ETI françaises familiales du secteur, Daher, qui réalise 80% de son chiffre d'affaires dans l'aéronautique. L'équipementier plie fortement mais ne souhaite pas rompre face à la crise. Dans ce contexte d'urgence, les actionnaires, la famille Daher (87% du capital ) et Bpifrance (12,5%), ont donné, selon la CFDT, au directeur général Didier Kayat, "comme priorité, de sauver le groupe", très dépendant d'Airbus (près de 60% du chiffre d'affaires du groupe), qui va réduire sa production d'un tiers. L'heure est grave pour l'équipementier centenaire.

Face aux conséquences économiques de la crise sanitaire sans précédent du coronavirus, "Daher a réagi dès le 16 mars, en prenant les mesures garantissant la sécurité de ses collaborateurs et la continuité de l'activité pendant la période de confinement. Aujourd'hui, la baisse des cadences de production de nos clients, avionneurs et motoristes, entraîne une baisse d'activité de l'ordre de 30% pour 2020. Face à cette situation exceptionnelle, Daher a immédiatement lancé l'analyse de l'ensemble des mesures possibles, avec le souci de limiter les impacts sur l'emploi. Les plans d'action nécessaires à l'adaptation du groupe seront élaborés en concertation avec les représentants des salariés, sur la base d'un diagnostic partagé", a expliqué Daher.

La perte de chiffre d'affaires estimée à ce jour par Daher s'élèverait à 400 millions d'euros en 2020, dont 130 millions dans le domaine du nucléaire et 170 millions dans son activité industrielle, sur les 1,3 milliard d'euros attendus, a précisé la CFDT. Le constructeur ne devrait livrer que 32 petits mono-turbopropulseurs de la famille TBM et 15 Kodiak (contre 48 TBM et 20 Kodiak en 2019). Dans tous ses métiers, le groupe familial s'attend donc à beaucoup souffrir. "Un redressement du chiffre d'affaires et un retour à l'équilibre ne semblent pas envisageables avant 2022 ou 2023", a précisé le syndicat. L'équipementier aéronautique avait réalisé 1,2 milliard de chiffre d'affaires en 2019. Par ailleurs, selon la CFDT, la perte du résultat net pourrait s'élever à 70 millions d'euros pour le groupe (24,7 millions en 2018).

3.000 emplois menacés

Daher a annoncé lors d'une réunion le 10 avril avec les syndicats avoir d'ores et déjà pris plusieurs décisions pour tenter de limiter la casse : toutes les embauches au niveau du groupe sont gelées, les actionnaires ont renoncé à percevoir leurs dividendes pour cette année, la part variable, pour les salariés concernés, sera divisée par deux en 2020. Selon la CFDT, Didier Kayat a renoncé à la totalité de sa part variable. Mais cela ne sera pas suffisant pour maintenir à flot Daher.

Le directeur général doit rapidement mettre en oeuvre les premières actions de survie. Selon la CFDT, dès les mois d'avril et mai prochains. Il aurait annoncé aux syndicats que le nombre de salariés suffisants pour assurer la charge de travail de Daher en 2020 serait de 7.000 personnes. Le groupe emploie aujourd'hui 10.000 personnes environ, dont 8.500 en France. Environ 3.000 personnes, dont 1.300 CDI (contrat à durée indéterminée) et 1.700 en CDD et en intérim, pourraient être amenée à quitter Daher. Le groupe attend toutefois avant de lancer des mesures de réduction d'effectifs les derniers décrets du gouvernement de matière de chômage partiel, pour entamer les démarches et négociations avec les cinq organisations syndicales. "Très clairement des mesures seront engagées avant l'été", estime la CFDT.

Michel Cabirol

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Commentaires 6
à écrit le 17/04/2020 à 22:49
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Pourtant jusqu'à présent dans l aéronautique les employés sont surtout en congés imposés ou en télétravail, de plus les objectifs de livraison et de nouveaux appareils a créer sont toujours là

à écrit le 17/04/2020 à 12:49
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Voilà. Les conséquences concrètes de l'arrêt de l'économie vont très vite commencer à apparaître. Nous allons à très court terme devoir gérer un pays avec 15, 20 voire peut être 25% de chômage. Ça va être apocalyptique. Littéralement. Il est impossi...

le 27/04/2020 à 0:52
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Le volet économique est effleuré dans les médias, il est juste annoncé une estimation de la chute du PIB, que ce sera pire que la crise de 2008, que l'on a pas vu cela depuis la 2ème guerre mondiale.... A peine il est fait référence à la crise de 29 ...

à écrit le 17/04/2020 à 8:48
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Le confinement et sa prolongation ont aussi un prix qu'on va commencer à percevoir

le 17/04/2020 à 14:03
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Rien à voir avec le confinement . Même sans , le secteur aéronautique n'est pas prêt de repartir. Vous reprendriez l'avion aujourd'hui?

le 19/04/2020 à 10:13
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@Gilloup : bien sur que je reprendrai l'avion ! Je ne vois pas de raison objective et rationnelle de le refuser !

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