Le satellite espion Luch Olymp démasqué... par ArianeGroup

Le démonstrateur opérationnel GEOTracker d'ArianeGroup a suivi et surveillé le satellite espion russe Luch-Olymp venu à proximité du satellite de télécoms franco-italien Athena-Fidus.
Michel Cabirol
La traque du satellite espion russe Luch-Olymp par GEOTracker
La traque du satellite espion russe Luch-Olymp par GEOTracker (Crédits : DR)

Cocorico. L'honneur est donc sauf pour la France. Un système français a participé à la traque du désormais célèbre satellite espion russe Luch-Olymp, qui pensait "butiner" en toute impunité les communications du satellite de télécoms franco-italien Athena-Fidus. C'est plus précisément le démonstrateur GEOTracker d'ArianeGroup, qui a suivi et surveillé les "vagabondages" de Luch-Olymp pour le compte du ministère des Armées. GEOTracker n'était d'ailleurs pas le seul système à avoir vu puis surveillé ce satellite espion. Ceux qui pensaient que la France n'était pas capable de surveiller ses satellites en seront pour leurs frais. Même si les Etats-Unis restent évidemment d'une aide très précieuse quand ils ne nous espionnent pas eux-mêmes et quand ils souhaitent aider les Français.

"Nous dépendons partiellement d'autres nations", a d'ailleurs reconnu vendredi à Toulouse la ministre des Armées, Florence Parly. D'où son message insistant pour que la France, voire l'Europe, parviennent un jour à une autonomie stratégique, un concept peu compris par de nombreux pays européens. Florence Parly a sciemment tapé un grand coup de poing sur la table en dévoilant pour la première fois l'espionnage d'un satellite français par une puissance étrangère. Pourquoi ? Pour faire prendre pleinement conscience à l'opinion publique des menaces venant de l'espace, qui se militarise un peu plus d'année en année. Cet exercice à vocation pédagogique pourrait être décisif quand il faudra que la France investisse fortement pour se protéger de ces menaces.

"La France est et sera une puissance spatiale, avait-elle expliqué vendredi dernier. Cela signifie que nous allons garder notre liberté d'accès à l'espace. Cela signifie que nous nous donnerons les moyens d'agir et de surveiller. Cela signifie que nous construirons une véritable autonomie stratégique spatiale".(...) Comment prétendre maîtriser notre outil de défense spatiale si nous ne sommes pas capables d'observer le ciel seul et avec précision ? Nous devons être en mesure d'apprécier en autonomie la situation spatiale à tout instant, de comprendre les manœuvres qui s'y jouent. J'ai donc décidé de renforcer notre capacité nationale de surveillance spatiale et de renseignement".

Des systèmes peu coûteux

ArianeGroup a signé il y a un an environ un contrat avec le ministère des Armées pour lui fournir une surveillance des objets en orbite moyenne (MEO) et géostationnaire (GEO) grâce à GEOTracker en vue de protéger les satellites français d'éventuelles collisions et de tentatives d'espionnage. Ce système complète le radar Graves (ONERA), qui surveille quant à lui l'orbite basse (LEO), essentiellement au-dessus de la France. Le démonstrateur opérationnel GEOTracker est avant tout une prouesse humaine et un système très peu onéreux sur lequel ArianeGroup a investi sur fonds propre.

Mais c'est bien ce système qui a permis dans un premier temps de suivre sur "plusieurs mois" le satellite russe grâce à un réseau de six télescopes à travers le monde (trois en Europe, un en Australie et un au Chili). In fine, l'humain, grâce à l'analyse et l'expertise des équipes d'ArianeGroup, a été décisif pour démasquer Luch-Olymp et mettre un nom sur l'espion qui venait... de l'est. "ArianeGroup sait trier les points que l'on observe dans l'espace. C'est là notre valeur ajoutée", assure Alain Charmeau. Ces objets spatiaux sont maintenus au sein d'un catalogue actualisé et les données sont exploitées au profit de clients institutionnels et commerciaux sous la forme de différents services et produits opérationnels gérés de manière sécurisée.

"Alors que la plupart des nations spatiales prennent progressivement conscience des risques portant sur les systèmes spatiaux, devenus indispensables au fonctionnement de nos sociétés modernes, la France s'est dotée d'un service performant de surveillance et de protection de ses avoirs spatiaux stratégiques", souligne Alain Charmeau.

Un GEOTracker plus performant

ArianeGroup a déjà dans ses cartons une amélioration de son système pour le rendre plus performant. Ce qui ne coûterait que "plusieurs dizaines de millions d'euros", précise à La Tribune le PDG d'ArianeGroup, Alain Charmeau. C'est d'ailleurs aussi le cas pour la modernisation du radar Graves, qui va s'élever à 36 millions d'euros. Le constructeur des lanceurs Ariane (Ariane 5 et 6) travaillerait sur trois axes, et notamment passer de six à trente télescopes pour améliorer la traque des objets spatiaux en orbite MEO et GEO. Il pourrait en outre développer un système de traitements des données le plus complet possible (big data) en introduisant de l'intelligence artificielle dans le système. Ce qui permettrait une mise à jour du catalogue des objets identifié en permanence. Enfin, l'utilisation d'un laser permettrait l'identification des satellites en temps réel.

La balle est dans le camp du ministère. Au-delà, Alain Charmeau vise des crédits de l'Europe fléchés sur la défense sur la période 2019-2020 (590 millions d'euros, dont 90 millions pour la recherche).

"La France aura besoin de l'Europe, elle en sera un pionnier, un moteur, avait affirmé vendredi Florence Parly. Des coopérations ont déjà été lancées, nous devons les poursuivre, les accentuer. Les moyens consacrés à la politique spatiale de l'Union européenne seront renforcés : nous soutenons cette ambition. Il nous appartient de faire des propositions concrètes pour que cet investissement permette de conforter l'autonomie stratégique européenne dans le domaine spatial".

Michel Cabirol

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Commentaires 28
à écrit le 24/09/2018 à 13:59
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Et non, ce n'est pas Ariane Groupe, mais bien le CNES qui a décelé en premier cette approche russe, et cela plusieurs semaines avant la médiatisation que l'on connaît. Mais s'agissant de la Défense, seules les autorités gouvernantes ayant à en connaî...

à écrit le 23/09/2018 à 13:07
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Il manque la localisation du 6e télescope dans l'article : ...de six télescopes à travers le monde (trois en Europe, un en Australie et un au Chili). Et au commentateurs précédent, n'ont ils pas lu dans l'article la paragraphe qu indique les ...

à écrit le 14/09/2018 à 15:20
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Oh, le vilain satellite qui s'est rapproché (sic) pour coller ses grandes oreilles contre la paroi du gentil . Il n'y a vraiment que Poutine pour de telles ignominies . Quand OBamah a promis à Merkel de ne plus écouter par inadvertance son téléphone ...

à écrit le 14/09/2018 à 10:56
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Cette affaire "d'espionnage" sent le réchauffé puisque déjà évoquée il y a 6 mois entre le ministère français des armées et l'ambassade russe à Paris. Depuis, lors de sa visite à Moscou en juillet dernier, Macron n'a pas soulevé non plus une affaire ...

à écrit le 13/09/2018 à 19:56
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Un laser pour déterminer son identité ?...Plutôt pour lui donner des maux de tête , ou brouiller son système de navigation . On veut armer nos policiers municipaux, il faudra faire pareil avec les satellites stratégiques .

à écrit le 13/09/2018 à 15:20
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Ou l'art d'espionner les espions....

à écrit le 13/09/2018 à 13:27
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Le problème de la défense européenne reste toujours le même : Personne ne veut payer pour quelque chose qu'il ne contrôle pas. Aucun État européen ne nous aidera à financer notre outil de défense si on ne partage pas un tant soit peu son contrôle ...

le 13/09/2018 à 18:25
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Il serait étonnant que la France et plus particulièrement les USA soit d accord avec ça..

le 14/09/2018 à 11:38
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@TOM Pour la gouvernance européenne, rien à l'horizon pour l'instant. L’EU semble quelque peu en vrac. Seul le couple franco-allemand peut maintenir l’UE, et espérer limiter et résorber la casse ! La France, puissance spatiale devra donc entraine...

à écrit le 13/09/2018 à 12:19
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L'image d'illustration ressemble plus à un photoshop qu'à un affichage de logiciel...

à écrit le 13/09/2018 à 12:13
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Ce n’était en fin de compte pas "une information" journalistique mais une simple publicité gratuite pour une entreprise! On est en permanence dans un bain de données qui n'a aucune importance! Entre parenthèse, dans tout ces domaines la France n'exis...

à écrit le 13/09/2018 à 11:03
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Ca tombe incroyablement en harmonie, en synchronicité avec l'annonce par trump de la force de l'espace, c'est étonnant... ce suivisme.

à écrit le 13/09/2018 à 10:37
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La France qui prête le site de lancement de Guyane... à la Russie... Double triple quadruple discours, c'est bon on a compris, vous voulez capter une part importante du budget national pour naturaliser des technologies... de l'espace... vendue par d...

le 13/09/2018 à 18:21
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"La France qui prête le site de lancement de Guyane... à la Russie..." Pourriez vous argumenter sur cette formidable nouvelle? S'il s'agit des soyouz tirés de Kourou, ce n'est pas un prêt de la France à la Russie mais une vente de celle-ci à Arianes...

le 13/09/2018 à 20:04
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Vous voulez des faits en voici, travail de recherche : researchgate.net/publication Calculateurs_electroniques_et_nouveaux_systemes_d'armes_Interactions_Armees_Recherche_Industrie_1946-1959 "Dès la fin des années cinquante, l’essentiel du potent...

le 13/09/2018 à 21:10
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@alphonse La puissance de calcul de mon téléphone portable d'entrée de gamme écrase littéralement vos calculateurs électroniques des années 50. Et téléphone made in china, pas le genre de chose construite dans le plus grand secret avec la NSA et l'...

le 14/09/2018 à 1:24
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@johnmckagan C'est ça marcel! fallait juste connaitre la mecanique quantique et en inférer le transistor, both nowhere to be found in Francis kingdom.

le 14/09/2018 à 8:09
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Vous pouvez me prendre de haut si vous le voulez , libre à vous de rester dans l'ère informatique des années 50 .

le 14/09/2018 à 9:02
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Vous êtes bête à manger du foin, années 50 ou aujourd'hui moi y'en a dire que c'est systémique, endémique, que aujourd'hui comme hier la France à besoin de l'amerique pour faire des sauts quantiques qualitatifs pour faire les cakes en technologie. Le...

à écrit le 13/09/2018 à 9:56
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Pendant que le peuple russe crie famine Poutine continue de jouer à la guerre. On se demande comment on peut accorder une quelconque crédibilité à ce personnage aussi grotesque, et pire comment des politiciens français pensent que l'idéal serait ...

à écrit le 13/09/2018 à 9:34
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La France a besoin de l'Europe dit la ministre pour proteger les satellites français militaires .Mais qu'es ce que ils en ont a faire les européens des satellites militaires français .La France mene des guerres qui ne sont pas les leurs

le 13/09/2018 à 11:26
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Quand la France protège des satellites, des espaces aériens, dissuade d'un échange thermonucléaire ou évite que le Mali se transforme en nouvel Afghanistan, c'est toute l'Europe qui en bénéfice. Certains États européens peuvent aujourd'hui se perm...

à écrit le 13/09/2018 à 8:53
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De quoi ? Les européens se permettent d'espionner des satellites russes ??!! Mais c'est une atteinte à la sécurité nationale russe, ça. Bouh, les méchants européens... qui espionnent les Russes et la Terre entière mais ne supportent pas d'être très l...

à écrit le 13/09/2018 à 8:03
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Et pour les antennes de la NSA qui traquaient le portable d'Angela MERKEL, ou celles qu'on soupçonne sur le toit de l'ambassade américaine à Paris à côté du Palais de l'Elysée, on continue de regarder ailleurs parce que ce n'est pas Vladmir Poutine l...

le 13/09/2018 à 13:29
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L'un ne justifie pas l'autre, et l'Europe avait vivement réagi pour Merkel.

le 13/09/2018 à 19:46
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@Tom : une réaction "vive" de l'Europe ? Si vous voulez mais cela me fait surtout penser à un sketch de Coluche... Pour le reste, les antennes de la NSA et celle de l'ambassade américaine à Paris sont toujours là... On continue de ne pas vouloir voir...

à écrit le 13/09/2018 à 7:58
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Le jour où les politiciens de tous pays unirons les humains, nous aurons gagné du temps, de l argent, de la sérénité et nous pourrons peut être commencer à accomplir de grandes choses. Malheureusement ce ne sera pas pour ma génération...

le 13/09/2018 à 8:58
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rassurez vous,tout est fait pour que cela n'arrive pas,car le jour ou l'humanité feras qu'un,on risque gêner dans l'univers connu.

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