
C'est une défaite magistrale pour l'Europe spatiale qu'elle devra à tout prix retenir. Mais aussi un terrible aveu de faiblesse, certes passager, de l'Europe, qui a vu s'enchaîner l'arrêt des opérations de Soyuz à Kourou en raison de l'invasion russe en Ukraine, puis les retards d'Ariane 6 qui n'ont pas été anticipés par une transition sans risque entre ce nouveau lanceur et Ariane 5. Car le cauchemar est bel et bien devenu cette triste réalité de ce jour. Et l'issue en définitive inéluctable pour l'Agence spatiale européenne (ESA) : faute de lanceurs européens disponibles, le satellite Euclid, dont la maîtrise d'oeuvre avait été confiée à Thales Alenia Space Italie, montera à bord de Falcon 9, le lanceur de l'américain SpaceX, qui se fera une joie immense de le lancer en 2023. Ce satellite, qui étudiera l'expansion de l'Univers, devait embarquer d'abord sur Soyuz au second semestre 2022, puis sur Ariane 6. Triste jour pour l'Europe spatiale, dont la souveraineté est aujourd'hui salement écornée.
« C'est une mesure temporaire que nous prenons en raison de l'interruption des tirs de Soyuz et en attendant la montée en puissance d'Ariane 6 », dont le vol inaugural a été retardé au dernier trimestre 2023, s'est justifié le directeur général de l'ESA, Josef Aschbacher.
Hera sur Falcon 9, EarthCARE sur Vega C
Outre Euclid, la sonde Hera doit être également lancée en novembre 2024 par SpaceX vers l'astéroïde récemment dévié par la NASA (mission Dart). Ariane 6 ne sera pas prête. Mais le maître d'œuvre de cette sonde (OHB) pourrait avoir du retard sur ce programme. Ce qui pourrait peut-être laisser une chance à Ariane 6. Malheureusement ce n'est pas la première fois que les Européens lancent avec SpaceX. En 2020, l'ESA avait déjà lancé un satellite Sentinel-6 du programme européen d'observation de la Terre Copernicus avec un lanceur réutilisable Falcon 9.
En revanche, le satellite d'observation de l'atmosphère terrestre EarthCARE, qui devait être tiré par Soyuz, sera lancé le 24 avril par le nouveau lanceur européen Vega C à partir du Centre spatial guyanais (CSG). Depuis plusieurs mois, l'ESA étudiait la possibilité de faire monter à bord du nouveau lanceur italien EarthCARE (Earth Clouds, Aerosols and Radiation Explorer), un satellite d'observation de l'atmosphère terrestre développé en coopération entre l'ESA et l'Agence spatiale japonaise (JAXA). « Je serai très content si on pouvait lancer EarthCARE sur Vega C mais les études sont en cours », avait déjà précisé en juillet à La Tribune, le directeur du transport spatial à l'ESA, Daniel Neuenschwander dans un entretien accordé à La Tribune.
Enfin, les deux lancements prévus pour la constellation Galileo pourraient être effectués avant la fin de 2023, voire en 2024, pour garantir la continuité des services, selon le directeur de la navigation à l'ESA, Francisco Javier Benedicto Ruiz. « Ariane 6 est notre option préférée mais nous devons aussi surveiller le planning d'Ariane 6 dans les mois à venir », a-t-il expliqué. « Nous avons lancé des actions pour rechercher des options de services de lancement non européennes ». Décision au premier semestre 2023 au regard de la maturité dans le développement d'Ariane 6. On comprendrait vraiment très mal que l'Union européenne utilise un lanceur américain pour compléter la constellation Galileo...
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