Squiz : les gourdes de compote qui conjuguent économie circulaire et made in Europe

Fondée par un couple franco-américain, la start-up Squiz commercialise des gourdes réutilisables et fabriquées le plus localement possible. Elle vient de décrocher le label américain de business éthique B Corp.
Giulietta Gamberini
Six autres entreprises françaises ont été distinguées par ce label "Best for the World" sur la trentaine de B Corp que compte l'Hexagone.

C'est un jeu d'enfants, mais de plus en plus dangereux pour la planète. Les gourdes de compote jetables, qui depuis la fin des années 90 simplifient le goûter des petits Français, alourdissent les poubelles des ménages ainsi que leur budget. Le type de plastique dont elles sont composées (polyéthylène et polytéréphtalate d'éthylène doublés d'une couche d'aluminium) n'étant pas encore trié en France, elles finissent en quasi-totalité dans les incinérateurs ou les décharges. Et le peu de programmes privés qui en permettent le recyclage - comme celui issu d'un partenariat entre Materne et Terracycle, qui affirme en avoir à ce jour collecté plus de 11 millions - nécessitent une importante consommation d'énergie et d'eau pour les transporter et les nettoyer.

Lire: Les pionniers du green (8/8) : TerraCycle s'attaque aux déchets qu'on dit "non-recyclables"

Pour y remédier, quelques solutions tentant de concilier confort et écologie voient le jour sur le marché. C'est le cas des gourdes réutilisables proposées par la start-up française Squiz, qui vient tout juste d'être sélectionnée parmi les 138 meilleures entreprises mondiales de l'année en termes de business éthique, et à ce titre distinguée par le label américain B Corp. Six autres entreprises françaises ont été distinguées par ce label "Best for the World" sur la trentaine de B Corp que compte l'Hexagone.

Le packaging devient un produit

Fondée par un couple franco-américain, les époux Elizabeth et Nicolas Soubelet, Squiz propose -au prix de 5,95 euros l'unité et de 15 euros le pack de trois- des gourdes lavables et utilisables une cinquantaine de fois, que les parents pourront donc remplir d'une compote faite maison ou achetée en grands pots - de 20 à 30% mois chères, souligne Squiz. En calculant qu'une gourde réutilisable en remplace une cinquantaine de jetables, pesant en moyenne 5g chacune, et que la start-up en a vendu 400.000 en deux ans, elle estime avoir ainsi évité 100 tonnes de déchets.

Seul le zip de fermeture en plastique, fabriqué en France et jusqu'à présent exclusivement utilisé  pour des produits jetables, limite la durée d'utilisation de la gourde, explique Nicolas Soubelet, qui remarque: "Avec nous, le packaging devient un produit". L'estimation est d'ailleurs purement empirique et indicative, la tenue du polyéthylène dont est fait le zip variant selon la chaleur et donc les usages (lavage, congélation etc.). Une fois jetée, la gourde pourrait enfin être assez facilement recyclée puisque, à la différence des jetables -qui doivent garantir une longue conservation de leur contenu- elle n'est pas doublée d'aluminium, ajoute l'entrepreneur, regrettant toutefois de ne pas produire encore de quantités suffisantes pour intéresser un recycleur privé.

D'une capacité de 130 grammes -l'équivalent d'un petit repas de bébé-, les produits de Squiz visent d'ailleurs un marché plus large que celui du goûter pour enfants, dans lequel les gourdes jetables, notamment à l'étranger, occupent une place croissante: celui du baby-food. "Aux Etats-Unis comme en Angleterre, des rayons entiers sont consacrés à des dizaines d'aliments pour bébés en gourdes, désormais présents quasiment à chaque repas", observe en effet Elizabeth. Cette texane mère de cinq enfants a eu l'idée de ce projet après avoir  personnellement constaté l'évolution de ce phénomène. 30% du chiffre d'affaires de Squiz sont d'ailleurs d'ores-et-déjà réalisés à l'étranger, notamment en Espagne et en Italie, dans les pays scandinaves et en Allemagne.

Un objectif éthique global

Mais l'objectif éthique poursuivi par les deux entrepreneurs, qui leur a valu la reconnaissance de B Corp -dans les trois catégories "environnement", "communauté" et "global"- va au-delà de la réduction des déchets. "Nous voulions créer le plus de valeur possible localement", soulignent-ils. Les encarts et les packagings sont ainsi imprimés dans les Yvelines, où se situe le siège de l'entreprise, et l'emballage est confié à l'Etablissement et Service d'Aide par le Travail (E.S.A.T.) -qui vise la réinsertion sociale et professionnelle des adultes en situation de handicap de la région. Le couple n'ayant pas pu trouver en France de fournisseurs prêts à modifier leurs standards de production pour de si petits volumes, le reste provient d'Europe: le bouchon anti-étouffement est fabriqué en Allemagne, le plastique constituant la gourde en Italie, et l'assemblage du tout est réalisé en Suisse.

"Tous nos concurrents fabriquent leurs produits en Chine", souligne Nicolas Soubelet, qui précise: "Ils peuvent néanmoins se prévaloir du label "made in Europe" à partir du moment où plus de 50% de leur produit (assemblage etc.) vient du Vieux Continent".

Un surcroît de coûts absorbé à tous les niveaux

Certes, cette approche implique des coûts de production plus élevés, "mais qui sont absorbés à tous les niveaux: les clients n'en paient qu'une petite partie", soulignent les deux entrepreneurs. Un jour, d'ailleurs, la certification B Corp -dont se prévaut par exemple outre-Atlantique Ben & Jerry's- sera peut-être reconnue par les consommateurs français comme elle l'est déjà par les Américains...

En attendant, les deux entrepreneurs veulent consolider leur réseau de ventes, aujourd'hui étendu à plus d'un tiers des magasins bio français (dont ceux des réseaux La Vie Claire, Biocoop et Naturalia) ainsi qu'à nombre de magasins spécialisés en puériculture. L'entreprise compte désormais trois salariés en plus des deux fondateurs. Si une expansion hors Europe (vers les Etats-Unis ou l'Asie), qui nécessitera une levée de fonds, est à l'ordre du jour, il n'est pas question d'abaisser le niveau d'exigence éthique de leur projet: au contraire, espèrent-ils, "le standard requis par B Corp est tellement élevé que des progressions sont toujours possibles".

Giulietta Gamberini

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