Pfizer, un géant de la pharmacie pas si puissant

L'américain Pfizer, qui, tente de mettre la main sur le britannique AstraZeneca, s'est vu opposer un nouveau refus à la veille du week-end. Un rachat pourtant nécessaire pour assurer son avenir, assez incertain

Le numéro deux mondial de la pharmacie, l'américain Pfizer, qui cherche à s'emparer du britannique AstraZeneca, est un géant aux pieds d'argile qui a besoin de se muscler pour ne pas perdre de terrain sur ses rivaux.

Depuis une dizaine de jours le monde de l'industrie pharmaceutique retient son souffle: Pfizer va-t-il réaliser la plus grosse acquisition de l'histoire du secteur en rachetant pour plus de 100 milliards de dollars AstraZeneca, né en 1999 de la fusion entre le suédois Astra et le britannique Zeneca ?

Si le mariage présente des avantages fiscaux non négligeables pour Pfizer, qui serait ainsi domicilié au Royaume-Uni où les taux d'imposition sont plus bas, il révèle surtout ses faiblesses, estiment les analystes.

 

Horizon voilé 

"Quand on regarde les perspectives de croissance, Pfizer n'est pas dans une bonne position", assure à l'AFP Nick Turner, analyste chez Mirabaud Securities à Londres. "Les perspectives de croissance de Pfizer à moyen terme sont voilées", renchérit Alex Arfaei chez BMO Capital Markets.

L'un et l'autre pointent une érosion du chiffre d'affaires, une présence faible dans les secteurs à fort potentiel de croissance (le diabète, l'oncologie, l'immunologie) et dans les pays émergents, sans oublier la concurrence des génériques. Le laboratoire new-yorkais a perdu environ 10 milliards de dollars de chiffre d'affaires en deux ans: celui-ci est passé de 61,03 milliards de dollars en 2011 à 51,6 milliards fin 2013, au point qu'il a abandonné le premier rang mondial au suisse Novartis (57,92 milliards de dollars).

Du surplace aux Etats-Unis et au Japon

Pfizer fait du surplace dans ses deux premiers marchés, les Etats-Unis et le Japon, qui représentent ensemble environ la moitié de son chiffre d'affaires. Dans les pays émergents, il court derrière ses rivaux comme Sanofi, avec des revenus de 10,21 milliards de dollars, contre 15,2 milliards pour le groupe français.

Pfizer n'a réalisé que 1,64 milliard de dollars de chiffre d'affaires l'an dernier dans l'oncologie, soit une hausse de 323 millions de dollars en trois ans. Le marché de l'immuno-oncologie devrait peser entre 30 et 50 milliards de dollars d'ici 2023, estime Alex Arfaei.

Des brevets en fin de vie

Dans le même temps la liste de ses médicaments dont les brevets expirent s'allonge.

Les ventes de l'anticholestérol Lipitor, dont Pfizer a perdu l'exclusivité sur les plus gros marchés occidentaux, sont tombées de 9,6 milliards de dollars en 2011 à 2,3 milliards en 2013. Les recettes sont en baisse aussi pour la célèbre pilule bleue Viagra contre les troubles de l'érection, dont les brevets tombent dans le domaine public au Japon cette année après l'Europe en 2013.

Suivront l'anti-inflammatoire Celebrex cette année aux Etats-Unis et en Europe, l'Enbrel (polyarthrite rhumatoïde) en Europe, le Zyvox (antibiotique) en 2015 aux Etats-Unis et en 2016 en Europe, le Lyrica (antalgique) en 2014 en Europe et en 2018 aux Etats-Unis.

"Nous estimons que jusqu'en 2019, Pfizer a 18 milliards de dollars de revenus à la merci de la concurrence des génériques", fait remarquer M. Turner.

Se restructurer

En s'emparant d'AstraZeneca, le laboratoire new-yorkais comblerait une bonne partie de ses faiblesses et pourrait entamer sa réorganisation à l'instar de Novartis qui a pris une longueur d'avance.

"AstraZeneca a des perspectives de croissance certaines, particulièrement dans l'immuno-oncologie", avance M. Arfaei. Le groupe britannique apporterait à Pfizer ses médicaments prometteurs en développement dans ce secteur ainsi que son traitement en cardiologie Brilinta ou des traitements du diabète et des maladies respiratoires. "Ce pourrait être un prélude à une réorganisation importante du groupe", avancent les analystes de la banque Jefferies.

Pfizer se restructurerait, renchérit Shubhomoy Mukherjee, analyste chez Barclays, en trois grandes branches: une activité consacrée aux produits innovants, une division regroupant les vaccins, l'oncologie et la santé grand public ou pharmacie, et une dernière focalisée sur les produits matures.

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