De la cardiologie à l'oncologie, le pari de l’Institut de Cancérologie de l'Ouest

L’Institut de Cancérologie de l’Ouest vient de fonder ICO Innov, une filiale destinée à encourager l’entreprenariat dans le secteur de la santé. Celle-ci vient d’entrer au capital de Naogen Pharma, dont les produits destinés à la cardiologie pourraient demain gagner le champ de l’oncologie.
(Crédits : dr)

« Nous sommes en quelque sorte le premier bourgeon de la filière radiopharmaceutique dans les Pays de la Loire annoncée, en 2011", s'amuse Sylvain Fanier, président de la biotech nantaise Naogen Pharma,

Fondée en 2016 par Jean-François Chatal, pionnier de la médecine nucléaire, la biotech nantaise Naogen Pharma, vient de lever 1,5 million d'euros et fait entrer au capital l'Institut de Cancérologie de l'Ouest, à travers sa filiale ICO Innov, créée en mai 2021.

« Un investissement modeste mais qui démontre la volonté de l'ICO de sortir de son champ habituel de compétences », explique Guillaume Mercusot, directeur du développement d'ICO Innov. Filiale à 100%, cette nouvelle structure s'est donnée une triple ambition : favoriser la création de startups en interne, prendre des participations minoritaires dans des jeunes pousses en phase d'amorçage et la mise en œuvre de d'opérations de co-développement ou de partenariat avec des startups, des PME ou des industriels.

« On veut accompagner les médecins, les chercheurs ou les paramédicaux qui pourraient avoir l'âme d'entrepreneur. On les aide à créer leur start-up, à mener une étude de marché, à formaliser leur business modèle, à obtenir leurs premières aides pour se lancer et intégrer un incubateur », explique le dirigeant ICO Innov où une startup est en cours de création.

Diversifier les recettes

Le deuxième objectif d'ICO Innov, c'est la prise de participation minoritaire dans des start-up, comme elle a pu le faire par le passé avec la nantaise Hera-MI, engagée dans l'accélération du diagnostic du cancer du seins, ou tout récemment avec Naogen Pharma.

« De nombreuses startups médicales investissent la e-santé, la télésurveillance... Ces domaines s'appliquent à de nombreuses disciplines dont l'oncologie. C'est le secteur où les investissements sont les plus forts. Les cancers restent une des premières cibles d'investissement dans la santé. Ça a vraiment du sens que l'on soutienne cette filière dont on est consommateur en aval. Pour nous, l'important, c'est que les applications puissent trouver un écho dans notre activité», témoigne Guillaume Mercusot dont la capacité d'investissement s'élève à 250.000 euros sur cinq ans.

Un budget modeste qui veut néanmoins contribuer à faire évoluer les ressources de l'ICO, Établissement privé d'intérêt collectif centenaire dont « l'ADN est le reste à charge nul pour le patient et une redistribution totale des profits dans les soins et la recherche ».

Avec un budget qui avoisine les 200 millions d'euros, le premier centre de lutte contre le cancer de province accueille chaque année 45.000 patients dans les centres hospitaliers Paul Papin à Angers et René Gauducheau à Nantes (Saint-Herblain).

« Si ce modèle économique est à préserver, un des enjeux est de diversifier nos recettes », reconnait Guillaume Mercusot, qui estime pouvoir, d'ici quatre ans, générer 1% à 2% de ses recettes grâce à l'innovation. Soit 2 à 4 millions d'euros de chiffre d'affaires supplémentaires par an en gagnant et offrant de la visibilité.

Des indications plus larges

Pour Naogen Pharma, spécialisée en imagerie médicale en cardiologie nucléaire, l'arrivée de l'ICO au capital, même de façon minoritaire, offre un véritable intérêt.

« La modalité en cardiologie, à elle seule, ne suffit pas pour apporter quelque chose de concurrentiel et réussir commercialement alors que les Américains sont déjà présents sur le marché depuis vingt ans et migre vers l'Europe. Donc l'idée est de trouver des sujets d'innovation de l'utilisation de cette modalité d'imagerie. Ce traceur de la micro-vascularisation peut, en réalité, être utiliser dans plein d'indications... », esquisse Sylvain Fanier.

L'oncologie lui a été soufflé par l'ICO. De nombreux patients traités pour des pathologies cancéreuses, via des produits de chimiothérapie ou d'immunothérapie ressentent des effets secondaires, de toxicités et favorisent des pathologies cardiaques. « Nous avions un sujet d'intérêt» reconnait le directeur général de Naogen Pharma.

De fait, l'ICO a depuis recruté trois cardiologues chargés de s'intéresser à l'oncocardiologie. « Une innovation majeure qui devient une nouvelle spécialité médicale », savoure Sylvain Fanier, satisfait que l'ICO s'implique dans une démarche industrielle.

Relocaliser en France

Depuis, Naogen Pharma a noué des partenariats avec l'Hôpital Européen Georges Pompidou (HEGP), des unités Inserm et l'Université de Paris pour développer des outils destinés à des extensions d'indications de cette modalité en cardiologie. « Et à l'avenir, il y a aura surement des associations entre HEGP et l'ICO. On le pressent déjà », assure Sylvain Fanier, qui a réussi à lever 1,5 million d'euros pour financer la demande d'AMM (Autorisation de mise sur le marché), l'été prochain, pour une indication de cardiologie ; l'Ischémie Myocardique dont la commercialisation pourrait être lancée en 2023.

Lauréat du plan de relance dans le cadre de projet de relocalisation, Naogen Pharma a ainsi pu financer les projets innovation lancés avec l'ICO et l'HEGP. L'entreprise étudie désormais la construction d'une usine radiopharmaceutique à Nantes.

« Jusque-là, le chargement des générateurs était confié à une société hongroise. L'idée, c'est d'avoir un deuxième site industriel pour avoir un back-up de production de nos générateurs, d'accélérer le développement industriel de ce premier bourgeon », indique Sylvain Fanier, qui étudie les terrains avec Nantes Métropole et espère convaincre de nouveaux investisseurs d'amener 3 millions d'euros pour permettre la construction d'une unité de production. Et concrétiser l'émergence d'une filière radiopharmaceutique en France.

Du co-développement pour l'espace

Enfin, le troisième objectif d'ICO Innov vise à mener des opérations de co-dévelopement ou de partenariat sur des cas d'usages qui puissent bénéficier aux médecins ou aux patients, prise en charge par l'ICO.

Là encore, ce peut-être un industriel, une startup, un partenaire à qui l'ICO met à disposition des jeux de données, une expertise, des références... « On va là où l'on peut avoir une plus-value pour nos médecins et nos patients. Ce que l'on cherche en priorité dans ce co-développement, c'est d'avoir un usage gratuit de ces solutions innovantes, mais aussi que la solution génère des royalties, même si l'on sait que par essence, la réussite d'une startup est potentiellement aléatoire », souligne Guillaume Mercusot.

Au cours du dernier trimestre, ICO Innov a ainsi noué trois partenariats avec les sociétés lyonnaise (Deeplink Medical) et parisienne (Quinten Health) et américaine (Tietronix). Intervenant pour la Nasa, cette dernière chercherait à développer un logiciel de cardiologie pouvant s'affranchir de cardiologue, de manière à être utilisé lors de missions spatiales

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