Alstom : une "victoire", "une trahison", l'alliance avec General Electric vue par la presse étrangère

Alors qu'outre-atlantique comme outre-manche les journaux saluent la victoire de General Electric, le ton est plus désabusé de l'autre côté du Rhin.
Selon The Economist, l'enjeux de la bataille pour Alstom était de savoir comment de telles sociétés "peuvent au mieux assumer les défis de la globalisation". (Photo: Reuters)

Les journaux français ne sont pas les seuls à avoir rempli leurs colonnes de l'affaire Alstom ces derniers jours. La saga des offres croisées sur le fleuron de l'industrie française a aussi été amplement traitée par la presse étrangère. L'américain General Electric et l'allemand Siemens étant en lice, les titres anglosaxons et la presse d'outre-rhin se sont particulièrement épanchés sur le dossier.

Sans surprise, un accueil particulièrement élogieux est réservé au résultat de la compétition aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.

  • Une alliance adaptée aux défis de la globalisation, souligne The Economist

"La bataille pour Alstom, (qui) est perçue par certains comme un point essentiel pour l'industrie française", concerne "bien plus que le prix", analyse The Economist: l'enjeux est plutôt de savoir "comment des sociétés telles qu'Alstom peuvent au mieux assumer les défis de la globalisation".

A cette fin, "la solution d'Airbus (d'un partenariat franco-allemand) pourrait être moins appropriée aujourd'hui, dès lors que les sociétés européennes cherchent des partenaires plus éloignés, en partie afin de mieux accéder à leurs marchés", considère le journal américain. C'est bien pour cette raison d'ailleurs que "le Conseil d'administration d'Alstom était heureux de vendre à la société américaine en avril", souligne l'article, qui rappelle: celui-ci "n'a été dissuadé que par les véhémentes objections d'Arnaud Montebourg".

 

"Le succès de l'offre de General Electric pour l'activité dans l'énergie d'Alstom est une revanche personnelle pour Jeffrey Immelt, le PDG souvent critiqué de la société", estime le Financial Times. L'Américain est parvenu à obtenir un accord qui, sans être révolutionnaire, "est généralement regardé par les analystes comme attrayant pour GE", souligne le quotidien britannique. Et ce, bien que ses qualités d'orateur n'aient pas pu s'exprimer en France - l'article rappelle qu'en s'adressant à la commission économie du Parlement en mai, le PDG, après un laconique "Madame, Monsieur, bonsoir, je suis Jeffrey Immelt", avait poursuivi son discours en anglais.

"L'accord est aussi une importante avancée dans sa stratégie de réduction de la dépendance du groupe de GE Capital, son département financier. Un échec aurait soulevé des questions tant sur son efficacité que sur sa vision", souligne le quotidien.

Le ton est en revanche plus sceptique outre-rhin - voire outre-alpes, dès lors que la parole est donnée à un journaliste basé à Berlin.

  • Pour Die Welt, la bataille pour Alstom "n'a pas de gagnant clair"

Bien que le "Mont Blanc" (comme était dénommée la bataille pour Alstom chez Siemens, selon Die Welt) "n'ait pas tout à fait été grimpé", "un premier coup d'oeil montre qu'il n'y a pas de perdants clairs dans le poker du rachat, et que le vainqueur a l'air bien ébouriffé", estime le journal allemand. Sans doute, General Electric renforce sa position sur le marché européen, aux dépens de son principal concurrent, Siemens, ainsi que sa leadership mondiale dans l'activité des turbines à gaz. "Cependant, l'affaire Alstom comprend également quelques pilules empoisonnées pour GE", souligne Die Welt: notamment, le droit de veto attribué à l'Etat français ainsi que la menace d'amende en cas de non respect des engagements pris en matière d'emploi.

D'autre part, non seulement la défaite n'a pas véritablement affecté la réputation de Joe Kaeser, mais l'acquisition d'Alstom aurait risqué de "dépasser les capacités de gestion de Siemens, causant encore plus d'incertitude", analyse Die Welt. Par ailleurs, remarque le journal allemand, en France non plus la nouvelle "alliance" n'est pas unanimement saluée:  "on ne sait pas encore qui aura le dernier mot", insiste Die Welt.

Particulièrement féroce est le commentaire du correspondant de Berlin du quotidien italien. "La France, toujours prête à se vanter de ses idéaux européens, choisit finalement (...) un pacte avec l'Amérique, qu'elle décrit pourtant comme antagoniste depuis les temps de de Gaulle (ou, mieux, depuis l'époque de Vichy, des collaborationnistes Petain et Laval)", écrit-il. Ce qui impliquera, souligne La Repubblica, de "nouvelles dépenses publiques malgré Maastricht, le pacte de stabilité et le pacte budgétaire, dans le cadre d'un choix qui est un mix entre protectionnisme et solde aux US".

"Un choix du faible et peu populaire président français François Hollande" par lequel "la France - 'Grand malade' d'Europe - trahit l'Europe et l'affaiblit", insiste le quotidien italien, y voyant carrément un "nouveau signe de crise entre l'Allemagne d'une Angela Merkel qui désormais s'entend mieux avec Renzi et la France en déclin, devenue dangereuse pour tout le monde depuis l'envol des populistes de Marine Le Pen". Le journal italien admet toutefois l'existence d'une certaine logique: le pays étant à la dérive, "l'Etat-patron, typiquement français depuis les temps de Colbert, cherche le meilleur acheteur", déplore La Repubblica, soulignant toutefois qu'un risque guette: "les Américains, quand ils arrivent, arrivent pour décider".

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Commentaires 20
à écrit le 25/06/2014 à 8:21
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Mais oui, la France va défendre ses intérêts, nous ne sommes plus des européens naïfs et nous allons reconstruire notre industrie, vous en déplaise messieurs les italiens!

à écrit le 24/06/2014 à 15:09
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Siemens n' en donnait que pour 3 ans pour les emplois , quid des futurs chômeurs.....autant dire demain . Les Italiens en achetant du F35 devraient être beaucoup plus discrets . Bref la France s' est comportée comme tous les état Européens qui font...

à écrit le 24/06/2014 à 14:57
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Concernant la réaction du journaliste italien il est bon de préciser que l Italie a fait le choix du F 35. Choix autrement destructeur pour l Europe que cette vente.

le 24/06/2014 à 19:54
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Atterrant cette prise de position italienne

à écrit le 24/06/2014 à 14:30
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Je suis atterré par les références de l'Italien à Vichy (!) pour dénoncer un choix en faveur de l'allié américain au détriment d'un "axe" germano-japonnais... Et de la part d'un Italien, cela semble extrêmement déplacé.

à écrit le 24/06/2014 à 13:52
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Paradoxal de la part des médias italiens de reprocher à la France de tourner le dos à l'Europe quand, il y a quelques années de cela, le gouvernement italien a tout fait pour empêcher la vente d'Alitalia à Air France.

à écrit le 24/06/2014 à 13:50
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pour mettre d'accord tout le monde il existe une solution: intégrer les usa à l’Europe. Les accords commerciaux prochains sont un premier pas.

à écrit le 24/06/2014 à 13:43
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De toute façon, les différents gouvernements ont bradé quasiment toutes les entreprises (anciennement d'état). On est gouverné par des incapables, des gens payés par nous et qui n'ont aucunes visions stratégiques d'avenir pour le pays!

à écrit le 24/06/2014 à 11:50
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Je le dis et je le répéte leur planche à billets n'a pas fini de nous racheter à la découpe. Et ce n'est pas terminé ( le plus fort c'est BNP) il faut leur donner l'argent pour racheter Alstom. Elle est pas belle la vie. Avec un tel gouvernement on...

à écrit le 24/06/2014 à 11:17
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m'a tuer. Il n' y a pas d'autres explication en dehors de la volonté de ce Patrick Kron ( Ex Pechiney ! ) de vendre a tout prix aux américains et tout le monde a obéi.

à écrit le 24/06/2014 à 10:45
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Vous dites traitres, c'est au social? On fait dans l'entreprise assistée... mais d'autres doivent fermer. Et 50% de la bourse et 2/3 des obligations vendues, c'est une réussite, comme l'austérité vu le déficit? Est-ce UNE BONNE POLITIQUE?

à écrit le 24/06/2014 à 10:36
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Alors altom, victoire ou trahison? Etat stratège dans toute sa splendeur s'illustre dans la démolition économique et sociale de la société française et c'est avec rage et passion qu'on fabrique le chômage et la pauvreté par le gel du social! Le syn...

à écrit le 24/06/2014 à 10:17
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INTERVENTIONISME, DIRIGISME, SUSPICION, etc ... Notre gouvernement se transforme en dictature du prolétariat et s'en met évidemment plein les poches comme toute dictature en augmentant taxes et impots. ATTENDEZ SEPTEMBRE AVEC LA FLAMBEE DES IMPOTS ...

à écrit le 24/06/2014 à 9:24
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C'est un peu sévère de taxer l'état de pro-américanisme : c'est bien son intervention qui a permis à Siemens de faire une offre. Sauf qu'apparemment, Alstom était très hostile, et n'a pas facilité les démarches. Toujours est-il que les journaux ital...

à écrit le 24/06/2014 à 8:52
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Le journaliste italien devrait relire ses mauels d'histoire : les USA avaient une ambassade à Vichy jusuq'en 1942..........

à écrit le 24/06/2014 à 8:38
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Le General De Gaulle a toujours refusé de commémorer le débarquement des américains, expliquant que ce débarquement n'était bien entendu pas "gratuit"...et aujourd'hui nous vendons nos fleurons industriels aux américains, bientôt nous seront locatair...

le 24/06/2014 à 10:18
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entiérement d'accord avec vous a qui le tour maintenant on verra si état peut continuer a faire son petit tripatouillage comme il vient d ela faire avec alsthom!!!

le 24/06/2014 à 10:23
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L'Europe n'est plus un espace du coopération. C'est bien triste. Voici l'europe des nations tant voulue par certains : la France a voulu sauvergarder les emplois en France et éviter de renforcer encore le conglomérat Siemens déjà fort pusisant. On pe...

le 24/06/2014 à 15:12
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De Gaulle n'a été prévenu du débarquement qu'au dernier moment - par Churchill dans sa résidence de Portmouth - au front en quelque sorte - qui l'a informé comme un sous-fifre; à cela s'ajoute la détestation entre de Gaulle et de Roosevelt.... d'où ...

à écrit le 24/06/2014 à 8:31
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la presse ne parle pas du rachat des parts de Bouygues au delà de la valeur réelle ! C'est scandaleux !!!!!!!!!!!!!!!!

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