A Dunkerque, l’hydrogène stocke les énergies renouvelables

Héritière d’un lourd passé industriel, l’agglomération dunkerquoise fait acte de résilience en lançant le premier test grandeur nature en France de « Power-to-Gas », une technologie qui permet de valoriser les énergies renouvelables en les injectant dans les réseaux de gaz existants.
A Dunkerque, le power-to-gaz entre en service, permettant le stockage d'énergies verte grâce à l'hydrogène
A Dunkerque, le power-to-gaz entre en service, permettant le stockage d'énergies verte grâce à l'hydrogène (Crédits : Engie)

Hydrogène, hydrogène, hydrogène : tous les élus, la directrice générale d'Engie et les représentants des institutions comme l'ADEME n'avaient que ce mot à la bouche pour l'inauguration officielle de la première installation de power-to-gas en France, lundi dernier, à Cappelle-la-Grande près de Dunkerque. Et pour cause, c'est bien de l'hydrogène, issu d'énergies renouvelables comme l'éolien ou le solaire, qui est désormais injecté dans le réseau de gaz naturel d'un quartier de 100 logements.

Le projet GRHYD (Gestion des réseaux par l'injection d'hydrogène) a été lancé par la Communauté urbaine de Dunkerque en 2014 : il aura fallu deux ans de mise au point avec 11 partenaires, suivis de deux ans de démarches administratives pour enfin tester le procédé en grandeur nature. Autant dire que la Communauté urbaine de Dunkerque n'a pas attendu le plan hydrogène annoncé le 1er juin dernier par Nicolas Hulot pour étudier la manière de décarboner l'énergie.

La meilleure façon de stocker l'énergie

« Le caractère intermittent des énergies renouvelables reste un problème car le profil de production ne correspond pas au profil de consommation », a expliqué Isabelle Kocher, directrice générale d'Engie, partenaire du projet.

« On peut utiliser des batteries pour le stockage mais le coût reste élevé et inadapté aux périodes longues comme l'hiver. L'hydrogène est probablement la meilleure façon de stocker l'énergie ».

De son côté, l'ADEME a annoncé le lancement d'un appel à projets hydrogène dans les semaines à venir.

Grâce à l'électrolyse de l'eau, le surplus d'énergie produite par les énergies renouvelables et non consommée est transformé en oxygène et en hydrogène gazeux. Celui-ci est ensuite stocké à l'état solide grâce à une innovation technologique, les hydrures métalliques : aucune pression n'étant nécessaire, on gagne du volume par rapport aux bonbonnes de gaz. Pour injecter l'hydrogène dans le réseau de gaz, on le déstocke sous sa forme gazeuse. Le gaz ainsi obtenu se compose de 6 à 20 % d'hydrogène.

Hytane en test

A Cappelle-la-Grande, ce nouveau mélange d'hydrogène issu d'énergie renouvelable et de gaz naturel (baptisé Hythane®) va servir pour les réseaux domestiques de chauffage, de cuisson et d'eau chaude. Pendant deux ans, vont être recueillies précieusement toutes les informations permettant d'analyser la réaction du matériel et notamment les éventuels problèmes de corrosion des chaudières (qui dans le cadre de ce projet sont neuves), le pouvoir calorifique de l'Hythane® (qui est légèrement plus faible que le gaz naturel) mais aussi l'acceptabilité du procédé par le consommateur.

La prouesse technologique a nécessité un investissement de 15 millions d'euros et l'implication d'une dizaine de partenaires, à commencer par Engie et son centre de recherche Engie Lab CRIGEN mais aussi Engie Ineo, créateur de solutions pour les villes et territoires connectés, AREVA H2Gen, le CEA (Commissariat à l'Énergie atomique et aux Énergies alternatives), le CETIAT (Centre Technique des Industries Aérauliques et Thermiques) où a été testé le nouveau mélange, le réseau de distribution de gaz naturel GRDF, INERIS (Institut national de l'environnement industriel et des risques), McPhy PME française spécialiste des solutions de stockage d'énergie mais aussi la STDE, la société des transports de Dunkerque et GNVERT, qui commercialise le gaz naturel pour véhicule. Car la prochaine conquête de l'Hythane va concerner les transports.

Mutation du territoire

Le projet Althytude, mené entre 2015 et 2013 avait permis de tester l'Hythane pour les bus de villes : il a fallu trois ans de mise au point pour réussir à faire rouler deux bus pendant six mois... jusqu'à ce qu'un problème d'homologation s'en mêle. Ce qui a amené, entre autres, le territoire à devenir récemment une plate-forme d'expérimentation des énergies nucléaires et renouvelables à l'échelle européenne. Pour Patrice Vergriete, maire de Dunkerque et président de la Communauté urbaine de Dunkerque, « la transition énergétique se fait dans les territoires, on n'a pas envie de subir, les collectivités locales doivent percevoir la contribution climat énergie (CCE) ». Et de poursuivre :

« Ce projet est un beau symbole des mutationsNotre territoire a récolté les fruits avec notamment les 11 500 emplois d'Usinor (NDLR : devenu Arcelor Mittal) et porté les conséquences de l'industrialisation, en étant particulièrement touchée par les cancers liés à l'amiante ou la pollution de l'air : la voie de la transition énergétique est aujourd'hui toute tracée ».

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Commentaires 3
à écrit le 13/06/2018 à 8:14
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En stockage direct, y a l'installation prototype Myrte vers Ajaccio, H2 et O2 générés le jour avec le soleil/panneaux photovoltaïques, stockés en citernes, puis utilisés en pile à combustible + onduleur quand il faut aider le réseau électrique quand ...

à écrit le 12/06/2018 à 21:35
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Tout allait bien dans l'article jusqu'à ce qu'on y lise "nucléaire" !

à écrit le 12/06/2018 à 21:17
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Si Toyota commercialise depus 5ans une voiture à hydrogène, la Miraï, c’est que c’est la voie d’avenir.

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