Climat : une ONG néerlandaise obtient gain de cause face à l’État

La justice donne raison à quelque 900 Hollandais représentés par l’ONG Urgenda et contraint l’État à revoir à la hausse son objectif de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre. Une décision symbolique au lendemain de la publication d’un rapport du GIEC particulièrement alarmant.
Dominique Pialot
Aux Pays-Bas, les habitants ont l'habitude de vivre entourés d'eau comme dans ces maisons bâties dans les environs d'Amsterdam (vue aérienne du 20 avril 2018). Mais ce mode de vie est menacé par l'élévation continue du niveau des océans, comme par l'intensification des épisodes de tempêtes.
Aux Pays-Bas, les habitants ont l'habitude de vivre entourés d'eau comme dans ces maisons bâties dans les environs d'Amsterdam (vue aérienne du 20 avril 2018). Mais ce mode de vie est menacé par l'élévation continue du niveau des océans, comme par l'intensification des épisodes de tempêtes. (Crédits : Reuters)

Après l'attribution du prix Nobel d'Economie à deux chercheurs américains pour leurs travaux sur le climat, faut-il y voir le signe des transformations « rapides » et « sans précédent » réclamées par les auteurs du rapport intermédiaire du groupement intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC) rendu public le 8 octobre ?

La cour de la Haye a en effet rejeté l'appel interjeté en mai dernier par l'État néerlandais face à la première décision rendue en 2015 dans le procès qui l'opposait à près de 900 de ses administrés et l'ONG environnementale Urgenda. Ces derniers demandaient que leur pays revoie son objectif de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre de 17% à 40% en 2020 par rapport à 1990. La justice a tranché pour un objectif minimum de 25%, mais n'assortit alors cette exigence d'aucune contrainte.

Dans ce deuxième jugement, la justice invoque le rôle du climat dans la protection des droits humains.

Quelques jours auparavant, c'était la justice allemande qui déniait à l'énergéticien RWE le droit de déboiser la forêt de Hambach pour y opérer l'extension d'une mine de charbon.

Plus de 1.000 actions d'urgence climatique en justice dans le monde

Ces décisions s'inscrivent dans un contexte d'urgence climatique ravivé par la publication lundi 8 octobre d'un rapport intermédiaire du GIEC faisant la lumière sur la différence entre un monde de 2°C plus chaud que les températures pré-industrielles et une planète où l'on parviendrait à limiter ce réchauffement à 1,5°C.

La différence entre les deux situations est flagrante, avec des dizaines de millions de victimes climatiques en plus dans le premier cas (qui correspond à l'engagement pris à Paris en décembre 2015, lui-même nettement plus ambitieux que les trajectoires actuellement suivies par les États signataire). Mais le rapport permet aussi de constater l'ampleur des changements déjà à l'œuvre dans le monde entier.

Ces deux événements récents sont également symboliques d'une multiplication des actions en justice intentées ces dernières années en lien avec le climat. Selon une étude de la London School of Economics (LSE), on en dénombre aujourd'hui près de 280 dans plus de 25 cours de justice en dehors des États-Unis, et plus de 800 au pays de Donald Trump.

Accord de Paris et droits humains de plus en plus invoqués

Dans leur grande majorité (77%), elles sont liées au sujet des émissions de gaz à effet de serre, et souvent (40%) le fait d'entreprises s'opposant essentiellement (90%) aux États au sujet de l'obtention de permis et d'allocation de quotas de CO2.

Mais, notamment aux États-Unis, de plus en plus de villes (New York, Oakland, San Francisco ainsi que d'autres villes californiennes) attaquent les compagnies pétrolières qui ont poursuivi l'exploration et l'exploitation d'énergie fossiles tout en ayant connaissant des impacts de ces activités sur le climat.

Le rapport de la London School of Economics identifie certains cas « stratégiques » dont les retombées sont plus larges que la situation particulière qui en est à l'origine. Ils font de plus en plus souvent référence au non-respect de l'Accord de Paris et à la préservation des droits humains. C'est le cas notamment de l'action intentée par un paysan péruvien - lui aussi soutenu par une ONG environnementale allemande - contre l'énergéticien RWE dont l'action menace la pérennité de son activité, et jusqu'à sa survie.

Dans le même temps, d'autres arbitrages rendus sont moins favorables à l'environnement. Ainsi, dans le conflit opposant des paysans équatoriens au pétrolier américain Chevron, un tribunal international privé vient de donner gain de cause au pétrolier.

Pour la LSE, même s'ils sont encore peu nombreux, et même s'ils s'achèvent par des défaites, les cas symboliques d'actions en justice en lien avec le climat vont connaître un écho croissant au-delà des seuls tribunaux et faire progresser la prise de conscience autour de ces sujets.

Dominique Pialot

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Commentaires 2
à écrit le 10/10/2018 à 13:50
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Cela veut dire que l’on est de moins en démocratie puisqu’une ultra minorité aidée par la Justice peut faire valoir sa vision des choses... Très dangereux !!!

le 10/10/2018 à 17:14
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Pardon? On est justement en démocratie car la Terre appartient à nous tous et non pas à l’oligarchie au pouvoir!

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