
Après l'adoption du projet de loi sur les énergies renouvelables, place au nucléaire. Ce mardi, le projet de loi visant à accélérer la construction des six nouveaux EPR voulus par Emmanuel Macron arrive en première lecture dans l'hémicycle du Sénat, où il sera discuté puis voté par l'ensemble des élus du palais du Luxembourg.
Avec ce texte, le gouvernement espère gagner entre deux et trois ans sur la réalisation de ce chantier pharaonique. Objectif : donner le premier coup de pioche du premier EPR 2 situé à Penly (Normandie) mi-2027, c'est-à-dire avant la fin du quinquennat en cours, pour une mise en service espérée entre 2035 et 2037. Tenir ce calendrier, signifie que le projet de loi aboutisse au premier semestre et que les travaux de génie civil débutent, eux, dès 2024, en parallèle de l'instruction du décret d'autorisation de création (le Dac dans le jargon).
Accélérer le déploiement des gros et petits réacteurs
Le texte doit faciliter l'installation de nouveaux réacteurs à proximité des sites nucléaires déjà existants, « là où nous sommes capables de capitaliser sur un tissu local propice à l'acceptabilité, » explique l'entourage de la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher. « Plus on est près d'une centrale nucléaire, plus les gens aiment le nucléaire », souligne-t-on.
Outre l'accélération des chantiers EPR 2 , le texte doit aussi permettre de faciliter le déploiement de petits réacteurs nucléaires, (les SMR pour small modular reactors). « Le texte permet d'accélérer tout réacteur électronucléaire, pas seulement l'EPR 2. Cela inclut aussi les SMR », précise-t-on.
Simplification vs programmation
« C'est un texte d'accélération et de simplification », insiste-t-on au sein du ministère de la Transition énergétique. Il vise à « rassembler des procédures administratives qui jusqu'à présent prenaient des formes disparates et pouvaient relever de contentieux distincts ». L'objectif est de « mieux paralléliser un certain nombre de gestes administratifs », explique-t-on encore. Accélérer le déploiement de ces nouveaux réacteurs, c'est aussi réduire leur coût de financement et donc le prix des futurs électrons, pointe le ministère.
Ces simplifications qualifiées « de bon sens », « ont aussi pour choix de ne pas réinterroger ni le cadre de sûreté, ni le niveau de protection de l'environnement, ni la profondeur du débat public » fait valoir le gouvernement, alors que le calendrier législatif du texte fait l'objet de nombreuses critiques.
Le projet de loi est, en effet, examiné alors que le débat public sur l'opportunité d'une relance nucléaire est toujours en cours (il doit se finir le 27 février prochain) de même qu'une grande consultation nationale sur le futur bouquet énergétique de la France.
« Mauvais coup politique »
Ce projet de loi « ne préempte en aucun cas les décisions qui seraient prises sur l'avenir du mix énergétique », assure-t-on au ministère. Pourtant, le texte a déjà largement été remanié dans ce sens en commission par les sénateurs LR. Le 11 janvier dernier, la Commission des affaires économiques du Sénat a, en effet, considérablement renforcé le projet du gouvernement en supprimant l'objectif de réduction de la part de l'atome dans le mix électrique. Impatients, les élus de la Chambre haute veulent acter au plus vite le renouvellement du parc français.
Une position que ne partage visiblement pas le gouvernement. « Ce texte n'est pas un texte de programmation », insiste l'entourage d'Agnès Pannier-Runacher, qui explique que le débat sur la part du nucléaire dans le mix énergétique doit avoir lieu « dans la loi de programmation énergie climat, qui arrivera à la mi-année seulement ». Ce qui permettra « d'aller au fond du débat public ». « Préempter ce débat, ça nous semble être un mauvais coup politique », juge les membres du ministère.
La question du financement du nucléaire n'a pas sa place, non plus, dans ce véhicule législatif estime le ministère, qui rapporte que plusieurs modalités de financement sont sur la table et actuellement en cours de discussions entre le gouvernement et EDF. Les grandes négociations devront, elles, avoir lieu avec Bruxelles.
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