Dans l'épineux dossier turc, « Aéroports de Paris ne sera pas lésé », assure son PDG

Le nouveau PDG d'ADP, Augustin de Romanet, évalue l'impact de l'ouverture d'un troisième aéroport à Istanbul en 2018 à 300 millions d'euros de manque à gagner. La Turquie s'est engagée à indemniser le groupe français qui détient 38% de TAV, l'actuel gestionnaire de l'aéroport d'Atatürk à Istanbul qui fermera. TAV et ADP sont candidats à la construction de ce nouvel aéroport.
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Augustin de Romanet, le nouveau PDG d'Aéroports de Paris (ADP) ne s'est pas défilé ce jeudi lors de la présentation des résultats financiers du groupe au moment de répondre aux questions concernant l'épineux dossier TAV, ce groupe turc, qui gère plusieurs aéroports dont celui d'Atatürk à Istanbul, dans lequel ADP a pris en mai 2012 une participation de 38% pour 700 millions d'euros. Une très belle opération vite ternie par la décision du gouvernement turc de construire à l'horizon 2016-2017 un troisième aéroport à Istanbul gigantesque, concurrent d'Atatürk. Un coup dur pour ADP : Atatürk apportait la très grande partie de la valeur de TAV. Une décision qui vise à pallier la saturation d'Atatürk. Un appel d'offres a été lancé en début d'année pour la construction de ce nouvel aéroport (assortie d'une concession de 25 ans) et les candidats doivent remettre leur copie avant le 3 mai.

Dette nette de 3 milliards d'euros

TAV et ADP vont postuler. Augustin de Romanet n'a pas souhaité donner de précisions sur le montant de l'investissement qui pourrait être à la charge d'ADP. Au regard de la taille du projet, il sera conséquent. Une facture qui s'ajoutera donc aux centaines de millions d'euros injectés pour l'acquisition de 38 % de TAV et 49% de TAV Construction. « L'investissement n'exigera pas d'ADP d'endettement supplémentaire et sera pour nous totalement supportable », a-t-il indiqué. Aujourd'hui, ADP affiche une dette nette de trois milliards d'euros pour un chiffre d'affaires de 2,640 milliards.

Atatürk fermera

Le vainqueur devrait être désigné en juin avec un commencement des travaux début 2014 dans le but de livrer une première tranche de cet aéroport (d'une capacité de 70 millions de passagers) 42 mois après, (avec une tolérance de 6 mois). Soit au plus tard début 2018. Pour rappel, la concession de TAV de l'aéroport d'Atatürk court jusqu'au 1er janvier 2021. Que deviendra cet aéroport quand le nouveau ouvrira ? Sera-t-il spécialisé sur certains types de trafic ? Fermera-t-il ? Dès lors que le nouvel aéroport sera ouvert, Atatürk fermera », a précisé Augustin de Romanet.

Compensations assurées

ADP sera-t-il impacté? « Même si nous remportions l'appel d'offres du troisième aéroport, la fermeture engendrerait un manque à gagner. Nous avons reçu une lettre des autorités turques précisant qu'elles s'engageaient à le compenser (...). Nous n'allons pas être lésés sur le plan économique », a expliqué le PDG d'Aéroports de Paris. La compensation couvrira le manque à gagner entre la date d'ouverture du nouvel aéroport et la fin de la concession de TAV à l'aéroport d'Atatürk, en 2021, sachant qu'ADP table plutôt sur une ouverture début 2019.

Pas de dépréciation de la valeur de TAV

Quels sont les montants en jeu? « Si le nouvel aéroport ouvre le 1er janvier 2018, nous perdrons près de 300 millions d'euros (100 millions par an). Nous sommes quasiment sûrs que nous serons remboursés à hauteur de 200 à 250 millions. Le manque à gagner serait donc de l'ordre de 20 millions d'euros par an. Le risque n'est pas si élevé que cela », a déclaré Augustin de Romanet. D'autant que selon lui « la perte éventuelle serait inférieure à la surperformance de TAV au moment où on l'a acheté ». « L'accroissement de la valeur de TAV est tellement rapide par rapport à ce qui était anticipé que pour Aéroports de Paris, même dans un cas où on ne serait pas bien remboursé par le gouvernement turc (...), notre bilan économique demeure positif », a-t-il assuré. En 2012 ADP tablait sur un résultat net de 70 millions d'euros pour TAV et il s'est élevé à 124 millions. « Il n'y a pas besoin de déprécier (la valeur de TAV dans les comptes d'ADP, ndlr) quel que soit le scénario », a indiqué à La Tribune Laurent Galzy, le directeur financier d'ADP, en aparté de la présentation des résultats annuels.

Un recours contre les banques conseil envisagé

La prudence s'impose néanmoins. Car il y a évidemment un fossé entre une lettre et son exécution cinq ans plus tard avec un gouvernement turc qui aura forcément changé. Augustin de Romanet le sait. D'ailleurs il étudie la possibilité de se retourner contre les conseils d'ADP au moment de l'opération « dans l'hypothèse d'une compensation insuffisante ».

Car, lors du vote donnant feu vert à l'offensive sur TAV l'an dernier (début 2012) en conseil d'administration d'ADP, le risque d'un troisième aéroport était « réel mais non avéré ». «Il y a un élément de fait. Effectivement le conseil d'administration d'ADP n'a pas été conduit à se réunir entre l'annonce officielle du gouvernement turc (d'ouvrir un troisième aéroport d'ici la fin de la décennie, ndlr) dont fait mention la presse turque les 19 et 21 avril 2012, et le closing de l'opération le 15 mai 2012 », a expliqué Augustin de Romanet. Au moment de la décision du conseil d'administration, la question de la saturation aéroportuaire d'Atatürk à l'horizon 2018 était bien réelle, mais il était question d'y remédier par la construction d'une nouvelle piste de décollage.

 


 

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Commentaires 14
à écrit le 14/03/2013 à 18:24
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ADP a certainement été un peu pris au dépourvu dans l'affaire;mais il n'aura pas le choix:ou le groupe montre sa capacité à faire face dans la construction du nouveau et gigantesque aé roport;ou bien il s'en va,en laissant la place au groupe Emirates...

à écrit le 28/02/2013 à 20:39
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Aucun tribunal sensé ne devrait laisser ADP essayer de se défausser sur leurs banque-conseils. Ça en dit long sur l?incompétence et l'irresponsabilité qui règnent au sommet de la bureaucratie aéroportuaire qu'est ADP. N'oublions pas que ce sont les m...

le 28/02/2013 à 23:07
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+1 car les conseils ne sont pas des assureurs et que la décision ne leur appartient pas. Que les patrons assument leur responsabilité; qu'ils nettoient quand ils polluent, qu'ils renoncent a toute prime quand ils licencient, qu'ils démissionnent q...

à écrit le 28/02/2013 à 20:28
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Le contribuable et l'actionnaire francais vont encore prendre une grosse quenelle et une belle ardoise grace a vos superbes enarques !

le 14/03/2013 à 18:37
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Si la France ne s'inscrivait pas dans des "goûts de luxe" et top au niveau mondial,où en se rait-on aujourd'hui...?Faudra-t-il attendre que les Qataris ou la Chine prennent possesion d' ADP pour avancer...?Hors,les équipements aéroportuaires français...

à écrit le 28/02/2013 à 20:27
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Methode couet a la francaise alliee a la politique de l'autruche. Au fait les Turcs ils en disent quoi Mr le Noble DE Romanet ?

à écrit le 28/02/2013 à 16:56
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euh.....qui s'est qui va indemniser pour la connerie d'aéroport de Notre Dame des Landes du premier ministre ?

le 28/02/2013 à 17:18
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1) ce n'est pas une connerie, je vous invite à vous intéresser au projet de plus près 2) le premier ministre n'est pas le porteur du projet mais c'est Vinci, la CCI de Nantes-St Nazaire et les collectivités locales partie prenantes dans le projet (Ré...

le 28/02/2013 à 20:37
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Je connais le projet, notamment le décret n° 2010-1699 du 29 décembre 2010 comportant le PPP avec VINCI . Privé, vous êtes gagnant, public vous êtes perdant. Je ne crois pas que les turcs ont trois aéroports (Notre dame, Bouguenais, Montoir) dans u...

le 01/03/2013 à 10:15
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Si l'aéroport de Notre Dame des Landes étaient vraiment indispensable, d'après les études régulières effectuées par Vinci depuis 50 ans, l'existant serait déjà totalement engorgé. Ce n'est pas le cas, son inutilité est donc prouvée. Il serait bon d'é...

le 14/03/2013 à 18:12
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L'aéroport NDDL a été programmé pour laisser la place à Airbus Industries sur l'actuel aéro port de Nantes et pour permettre à Airbus Industries d'en disposer exclusivement.En atten dant,Airbus Industries est aussi implanté sur l'aéroport de St-Nazai...

à écrit le 28/02/2013 à 16:23
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Et le PDG de l'ADP dit que ADP ne va pas être lésé. Je pense que le nom de son sponsor est juste derrière sur la photo. Merci le contribuable français.

le 28/02/2013 à 17:13
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Ils nous prennent vraiment pour des jambons. Ils pensent qu'on va avaler leur histoire de lettre de garantie reçue du gouvernement Turc ! Quelle blague !! Heureusement que je n'ai pas d'actions dans ADP.

le 28/02/2013 à 19:25
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Ce serait bien que Montebourg réponde à la lettre du gouvernement turc, il a une belle plume...

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