Diminution des émissions de CO2 : la France en bonne voie pour 2030... mais ça ne suffit pas

Si la France sanctuarise les crédits anti-CO2 du plan relance, elle atteindra son objectif de réduction des émissions de CO2 en 2030, selon Rexecode. Mais ses efforts auront un impact très limité sur la trajectoire des émissions mondiales, qui elles continuent d'augmenter. L'institut plaide ainsi pour le développement « d'une offre de technologies pour le climat » afin d'assurer une production bas carbone en France et à l'étranger.
Juliette Raynal
En France, dans le cadre du plan de relance de 100 milliards d'euros, 30 milliards sont dédiés à la transition écologique.
En France, dans le cadre du plan de relance de 100 milliards d'euros, 30 milliards sont dédiés à la transition écologique. (Crédits : STRINGER Japan)

310 millions de tonnes. C'est le niveau d'émission de gaz à effet de serre (GES) que doit atteindre la France à l'horizon 2030 dans le cadre de sa stratégie nationale bas carbone (SNBC), fixée en avril dernier. Bonne nouvelle, selon les dernières estimations de l'institut Rexecode, l'Hexagone devrait y parvenir ou presque. Selon ses calculs, la France devrait émettre 315 millions de tonnes (équivalent CO2) à cet horizon, contre 441 millions de tonnes en 2019.

 « Ce n'est pas acquis d'avance », a toutefois prévenu Michel Didier, le président de l'institut, lors d'une conférence de presse la semaine dernière. « On y parviendra qu'à la condition de sanctuariser les crédits anti-émissions votés dans le cadre du plan de relance pendant les dix années qui viennent », explique-t-il.

Pour faire ses prévisions, Rexecode s'est appuyé sur trois hypothèses : un rythme plus faible de l'économie française après la crise sanitaire, la continuité de deux ratios (l'intensité énergétique du PIB et l'intensité en GES de l'énergie) et le maintien dans le temps des mesures anti-émissions prévues dans le cadre du plan de relance. Ce qui se traduirait par un investissement de 5 milliards d'euros par an.

Maintenir pendant dix ans les crédits « anti-CO2 » du plan de relance

Selon Rexecode, l'atteinte des objectifs de réduction des gaz à effet de serre tiendrait alors pour deux tiers à une croissance économique plus basse, qui impliquerait mécaniquement une consommation énergétique plus faible et donc de moindres émissions de CO2.

Les mesures du plan de relance, si elles sont maintenues jusqu'en 2030, expliqueraient pour un tiers l'atteinte de l'objectif. Sans le maintien des crédits anti-émissions de CO2 du plan relance, la France manquerait sa cible en 2030 avec 327 millions de tonnes équivalent CO2.

 « Dans le cadre du plan de relance de 100 milliards d'euros, 30 milliards sont dédiés à la transition écologique. Mais toutes les mesures [de cette enveloppe, ndlr] n'ont pas un impact sur les émissions. Nous avons fait un travail de classification et environ 12 milliards d'euros, prévus sur deux ans et demi (fin 2020, 2021, 2022), participent à la réduction des émissions », a détaillé Raphaël Trotignon, responsable de l'étude Rexecode.

Les principales mesures qui comptent sont la rénovation énergétique des bâtiments publics et privés, l'évolution du parc automobile, les mesures de soutien à la décarbonation de l'industrie ou encore le soutien aux technologies vertes comme l'hydrogène vert.

Lire aussi : Hydrogène : "La France a de quoi rivaliser avec la Chine", Agnès Pannier Runacher

Si la France est en bonne voie pour atteindre ses objectifs de réduction, ce n'est pas le cas pour les émissions à l'échelle mondiale. « Elles vont continuer d'augmenter jusqu'en 2030 alors qu'il faudrait qu'elles diminuent très fortement dès maintenant », explique Michel Didier.

Baisser les émissions sans désindustrialiser

Bonne élève, la France tire son épingle du jeu grâce à la part importante du nucléaire dans son mix énergétique. Ses émissions diminuent ainsi depuis 1990. Mais 90% de cette réduction tient au secteur industriel. Or, ces dernières années ont été marquées par une forte désindustrialisation de l'Hexagone. Selon Rexecode entre 20 et 25% de la baisse des émissions pourrait ainsi être associée à ce phénomène. Le reste serait le résultat des efforts des industriels en matière d'efficacité énergétique.

« Si la baisse des émissions s'effectue au prix d'une désindustrialisation c'est un problème. Il faut renforcer la capacité de baisse des émissions à capacité industrielle donnée », pointe Michel Didier.

Reste que les efforts de la France en matière de réduction de ses émissions auront un impact très limité sur la trajectoire des émissions mondiales. « Au-delà des efforts intérieurs, il faut réduire notre empreinte carbone », a insisté le président de l'institut. Celle-ci a augmenté ces dernières années et est en grande partie liée aux produits importés que nous consommons. L'empreinte carbone d'un produit fabriqué en Chine sera ainsi deux à trois fois supérieure à celle d'un produit fabriqué en France.

Des technologies pour le climat pour une production bas carbone

Une taxe carbone aux frontières pourrait répondre à cette problématique, mais son instauration relève d'une décision européenne. En attendant, Michel Didier plaide pour une politique de l'offre pour le climat : « Il faut une concentration de nos investissements sur les avancées technologiques et industrielles pour assurer une production bas carbone sur notre territoire », explique-t-il.

Dans un second temps, ce savoir-faire pourrait aussi s'exporter à l'étranger afin de permettre aux autres pays de réduire leurs propres émissions. « Il y a une très forte compétition à l'international sur la technologie pour le climat. La Chine s'y met à fond, notamment sur l'hydrogène. Il faut donc garder nos atouts et les renforcer », insiste Michel Didier.

Quelles seraient ces technologies pour le climat ? L'institut cite le nucléaire du futur, les technologies numériques en lien avec la gestion de l'énergie et notamment l'intelligence artificielle. Mais aussi les pompes à chaleur, l'hydrogène, la capture et la séquestration du carbone. « C'est une technologie qui, pour l'instant, se développe peu mais en France nous avons plusieurs démonstrateurs qui peuvent être prometteurs », souligne Raphaël Trotignon.

Juliette Raynal

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Commentaires 5
à écrit le 26/01/2021 à 11:03
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Le CO² est fonction de la consommation qui est faite donc n'achetez plus rien! Surtout ce qui vient d'ailleurs!

à écrit le 26/01/2021 à 6:31
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Reduire la quantité de CO2 mondial surtout en chine et aux usa. Supprimer totalement le charbon mondial. Filtrer l'air et developper le nucléaire sur et durable. Securiser tout. Demarrer l'EPR de Flamanville et faire des choses coherents et structur...

à écrit le 25/01/2021 à 18:51
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Vive les accords de Paris qui donnent un permis de polluer à l'Asie pour moins consommer en Europe... ou la promotion du génocide de l'occident en voie d'extinction sur la planète.

à écrit le 25/01/2021 à 14:43
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Bref! Quelle satisfaction! Une fois que l'on auras réussit pour notre pomme, il faudra s'occuper de celle des autres!

à écrit le 25/01/2021 à 12:02
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Les comptables ne sauveront pas la planète, les gens non plus, tant que les propriétaires de capitaux et d'outils de production seront dévorés par leur pathologique cupidité l'espèce humaine sera menacée.

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