Profits 2008  : la question du partage est à nouveau posée

La crise est bien là, mais elle n'a pas frappé toutes les entreprises avec la même violence. Voilà ce qui ressort de la première vague de résultats annuels publiée hier par les stars de l'économie française. Les pertes de PSA ont confirmé à quel point le marasme de l'automobile était profond, entraînant un vrai coup d'arrêt pour des fournisseurs comme ArcelorMittal. Ce dernier reste, certes, dans le vert pour l'ensemble de l'année 2008, mais avec une chute brutale au dernier trimestre.À l'opposé, Sanofi, Danone et Publicis ont plutôt rassuré. Et ce alors qu'on disait la consommation d'eaux minérales ou de yaourts flageolante ou bien la publicité carrément sinistrée depuis l'été dernier. Ces géants de la pharmacie, de l'alimentaire et de la pub, ont certes ressenti un coup de frein en fin d'année et 2009 est « une année où on ne sait pas très bien ce qui va se passer », a prévenu hier le PDG de Danone, Franck Riboud. Mais les chiffres d'affaires de ces trois groupes restent en hausse sensible et leurs profits demeurent très confortables.Cette même ligne de fracture devrait se retrouver aujourd'hui. Avec d'un côté Renault, sa marge opérationnelle divisée par deux ou trois, ses usines arrêtées plusieurs semaines en fin d'année dernière et ses milliers de salariés mis en chômage technique. Et de l'autre Total, pénalisé sans doute comme ses concurrents européens Shell ou BP par la dégringolade du baril de pétrole en fin d'année, mais qui devrait avoir engrangé de nouveaux profits historiques, estimés par les analystes entre 13 et 14 milliards d'euros.Face à ces chiffres, fruits d'une année 2008 fortement contrastée mais annoncés dans une conjoncture très noire, devrait se reposer la question du partage des bénéfices. Entre actionnaires, salariés ou même, pourquoi pas, consommateurs. Ainsi, Danone a promis hier aux actionnaires une hausse de 9 % du dividende, à 1,30 euro par action contre 1,20 l'an dernier. Mais les clients, eux, continueront de payer le prix fort pour les marques du géant français de l'agroalimentaire. Franck Riboud a, certes, tenté un effort et il se défend à sa façon : Danone avait lancé en septembre des « écopacks » de six yaourts au prix de 1 euro l'unité, mais cette initiative « n'a pas eu les résultats escomptés », a-t-il expliqué hier. Sur ce type de produit, il est vrai, les consommateurs privilégient plutôt les marques de distributeurs.Chez ArcelorMittal, ce sont les salariés qui s'estiment complètement méprisés et maltraités. La CFDT, par la voix de son délégué central Édouard Martin, dénonçait hier « la crise pour les salariés et les bénéfices pour les actionnaires ». Le sidérurgiste, qui a dépensé 7 milliards de dollars l'an dernier en dividendes et rachat d'actions, a décidé de diviser par deux le dividende versé au titre de l'année 2008, mais il a aussi prévu un durcissement du plan de 9.000 suppressions d'emplois annoncé en fin d'année dernière. Pour les salariés, le compte n'y est donc pas. Le groupe se sert de la crise « comme d'un effet d'aubaine pour dégraisser honteusement ses effectifs », commentait hier de son côté Michel Liebgott, député (PS) de Moselle et président du groupe d'études sidérurgie à l'Assemblée nationale.attention particulière Avec les résultats de Total dévoilés aujourd'hui, et dans une moindre mesure ceux d'EDF, le débat devrait encore être amplifié. Avec un kilowattheure en hausse régulière, l'électricien national est souvent attaqué sur ce sujet. Quant au pétrolier, ses profits suscitent presque chaque année protestations et envies de taxation. Avec la crise et des prix à la pompe toujours élevés, ce début 2009 ne devrait pas échapper à la règle. Total s'emploie d'ailleurs, depuis quelques jours, à désamorcer les critiques sur ses bénéfices record. En juin dernier, alors que le baril frôlait les 150 dollars, majorité et opposition s'étaient une nouvelle fois affrontées sur le sujet. À la demande de l'UMP, le gouvernement avait imposé un doublement de la prime à la cuve versée aux ménages modestes et financée en grande partie par Total. L'an dernier, le groupe a accru de 14 % les dividendes versés aux actionnaires. Ce matin, salariés, automobilistes mais aussi actionnaires seront très attentifs aux détails que fournira le groupe sur l'utilisation de ses très plantureux profits.
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