Les menaces sur le réseau ferré étaient connues dès 2007

Les actes de malveillance survenus le week-end dernier sur le réseau ferroviaire « auraient pu être évités », explique à « La Tribune » le criminologue Xavier Raufer, auteur d'un rapport sur les risques de sabotages et d'attentats sur les rails français. Datée de mars 2007, cette étude, intitulée « Réseau Ferré de France : une approche globale des dangers et menaces », et dont « La Tribune » s'est procuré un exemplaire, n'a jamais fait l'objet de communication publique par son commanditaire Réseau Ferré de France (RFF), gestionnaire des voies. « Mon rapport est resté dans les cartons, certainement parce que le rail français est une grosse machine qui avance wlentement », estime Xavier Raufer.Pourtant, ce dernier établissait déjà un diagnostic faisant état de « risques concrets et imminents » sur le réseau. « Ma principale recommandation visait à inciter les différents acteurs de la sécurité des voies (RFF, la SNCF, et, depuis 2006, l'Établissement public de sécurité ferroviaire ? EPSF ?) à se doter d'un véritable procédé leur permettant d'agir sur la menace. » C'est-à-dire rechercher et observer les individus susceptibles de fomenter des actes de malveillances, voire des attentats. « Ce qui est faisable à condition de volonté et de moyens », assure Xavier Raufer. Ainsi, selon lui, « la France a fait le plus gros » : empêcher un attentat du type de celui de Madrid, en 2004, sur le territoire national. « Mais, pour la question de simples sabotages, le réseau ne s'est pas donné les moyens d'agir », assure l'expert.Selon son rapport, la politique de la SNCF répond insuffisamment au problème de la sécurité. Ainsi, la vidéosurveillance n'est pas à la hauteur de cet enjeu. Quand bien même le président de la SNCF, Guillaume Pepy, a annoncé que le renforcement de ce système de vidéo ferait partie d'un nouveau plan, en réponse à la série d'actes de sabotages du week-end dernier (voir encadré). Pour Xavier Raufer, « il sera toujours impossible de surveiller les 32.000 km de voies françaises ! ». Selon ce dernier, « les derniers incidents enregistrés ont été préparés durant de longues semaines, pas forcément par des cheminots ». Si la plainte a été transmise au parquet antiterroriste de Paris, le criminologue préfère y voir « certainement l'action d'une petite criminalit頻.Dans son rapport, le criminologue?craignait déjà des sabotages, voire des attentats « visant les voies (rails, triages, aiguillages, etc.) », ainsi que des « sabotages physiques (coupures de câbles, etc.) ». Il remarquait que, au vu de la sécurisation croissante des aéroports et des avions, les TGV sont plus exposés. Entre 1997 et 2000, 52 des 196 attentats dans les transports terrestres ont visé dans le monde les réseaux ferroviaires. De tels risques ne peuvent être pris à la légère, estime le criminologue qui dénonce « un décalage certain entre les dangers réels et proches et la sûreté et la sécurité, vues aujourd'hui par le monde ferroviaire ».D'ailleurs, les actes intervenus ces derniers jours ont des précédents, reconnaît la SNCF, qui cite notamment, l'an dernier, « des câbles électriques qui ont brûlé, dans le sud de la France puis sur la ligne du TGV Nord, ainsi que des incendies sur les voies, lors d'un mouvement social ». Mais, selon l'entreprise, « les enquêtes diligentées à ce jour n'ont pas abouti ». Le même flou entoure le dossier du groupuscule baptisé AZF qui, en 2004, exigeait 4 millions d'euros sous peine de faire exploser des bombes sur les voies.À la lumière des nouveaux actes de malveillance, aux origines pour l'instant inconnues, les préconisations du rapport Raufer seront-elles enfin entendues ? Le criminologue conseillait notamment d'établir un « système de veille et d'alerte », au sein de RFF ou sous-traité à des experts reconnus. En tout état de cause, il préconisait de monter une véritable cellule de crise au sein de RFF « en lien permanent avec les acteurs cruciaux (police, gendarmerie, services spéciaux) ». Xavier Raufer proposait la refonte de la politique concernant les 700 points et réseaux sensibles (référencés en 2007), avec une « vérification des antécédents des personnels ayant accès aux données confidentielles permettant de commettre un sabotage » ainsi que leur « identification systématique ».Pascal Junghans et Marine Relinger
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