Loi énergie-climat : le virage sur l'aile de Roland Lescure

Il y a quelques jours, le ministre de l’Energie et de l’Industrie, Roland Lescure, a fait savoir que la politique énergétique de la France ne passera pas par l'élaboration d'une loi, mais par un simple décret gouvernemental. L'idée : contourner le vote du Parlement, où les macronistes se trouvent en majorité relative. Pourtant, il y a quelques années, celui qui était alors président de la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale tenait un tout autre discours.
Marine Godelier
Intitulé « Le Parlement doit être en première ligne pour définir la politique énergétique », une tribune signée en 2018 par Roland Lescure et Gabriel Attal appelait à voter une « loi » tous les cinq ans afin de définir les objectifs du pays en termes de nucléaire, d'éolien ou encore de solaire et de biogaz, « et non un simple décret ».
Intitulé « Le Parlement doit être en première ligne pour définir la politique énergétique », une tribune signée en 2018 par Roland Lescure et Gabriel Attal appelait à voter une « loi » tous les cinq ans afin de définir les objectifs du pays en termes de nucléaire, d'éolien ou encore de solaire et de biogaz, « et non un simple décret ». (Crédits : © LAFARGUE RAPHAEL/ABACA)

Il n'y a pas que sur le nucléaire que les membres du gouvernement ont opéré un virage à 180°C. La marche à suivre afin d'élaborer le futur mix énergétique de la France a, elle aussi, fait l'objet de nombreux atermoiements. Y compris de la part du ministre de l'Energie et de l'Industrie, Roland Lescure : alors que ce dernier a fait savoir, début avril, qu'il ne souhaitait pas associer l'Assemblée nationale et le Sénat aux débats nationaux sur les objectifs à atteindre en matière d'éolien, de photovoltaïque, de nucléaire ou encore de biomasse, il défendait l'inverse avant de rejoindre l'exécutif.

« Nous regrettons que la représentation nationale, le Parlement, ne soit pas réellement saisie sur le fond, à travers la rédaction d'une loi, face à des enjeux aussi stratégiques que ceux que pose la Programmation énergie climat pour l'avenir énergétique de notre pays ». La phrase pourrait sortir tout droit d'un communiqué rédigé par l'opposition, et pourtant : elle provient d'une tribune publiée en 2018 dans Le Monde, signée à l'époque par Roland Lescure, alors député LREM et président de la commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale. Le même, donc, qui vient d'acter sa décision d'esquiver le vote d'une loi au Parlement pour tracer l'avenir énergétique de la France d'ici à 2035, préférant recourir à un simple décret gouvernemental.

Un texte également signé par Gabriel Attal

Intitulé « Le Parlement doit être en première ligne pour définir la politique énergétique » et rédigé par les ex-députés macronistes Jean-Charles Colas-Roy et Anthony Cellier, le texte appelait à voter une « loi » tous les cinq ans afin de définir les objectifs du pays en termes de nucléaire, d'éolien ou encore de solaire et de biogaz, « et non un simple décret ».

« Le Parlement devrait pouvoir se saisir, par la rédaction d'une loi-cadre, du grand débat de réactualisation sur l'avenir énergétique de la France. Une commission de suivi devrait contrôler la bonne application de la loi et le respect des engagements pris », ajoutait encore la tribune, également apposé de la signature d'un certain Gabriel Attal, à ce moment porte-parole de La République en marche.

Près d'un an après sa publication, ce processus était d'ailleurs devenu obligatoire : en novembre 2019, plutôt que de se contenter d'un simple véhicule réglementaire, l'Etat s'était engagé à se doter d'une loi de programmation Energie-Climat avant le 31 juillet 2023 ; une disposition alors votée par les macronistes...et réaffirmée par Emmanuel Macron lui-même.

Offensive des sénateurs LR

Seulement voilà : l'échéance passée, celle-ci est restée lettre morte. Et pour cause, l'exécutif ne parvenait plus à apaiser le débat entre anti-nucléaires et anti-renouvelables. Se trouvant en majorité relative au Parlement, il craignait qu'aucune voie de passage ne se dessine. « Il y a déjà eu un débat public important », justifiait ainsi Roland Lescure dans les colonnes du Figaro, le 10 avril dernier, afin d'expliquer ce contournement des instances représentatives.

En 2018 pourtant, la fameuse tribune affirmait que le fait d'auditionner « les ONG, les syndicats, les associations de professionnels, les industriels du gaz, ceux de l'électricité et les représentants des énergies renouvelables » n'était « pas suffisant ».

Une chose est sûre : après ce revirement, ni les députés, ni les sénateurs ne comptent rester les bras croisés. Selon nos informations, le groupe LR au Sénat finalise actuellement une proposition de loi sur la trajectoire énergétique de la France dans les cinq prochaines années pour « mettre le gouvernement au pied du mur ». Le texte devrait être présenté d'ici aux tout prochains jours.

Lire aussiÉnergie : le gouvernement contourne le Sénat, les Républicains contre-attaquent

Marine Godelier

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Commentaires 3
à écrit le 28/04/2024 à 8:12
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Ce n'est pourtant pas très compliqué à comprendre : il faut une loi ...et en même temps, il ne faut pas de loi. De toute façon quand on a déjà fait demi-tour sur le fond, qu'elle importance de s’embarrasser de la forme. Bon, le problème, c'est qu'on...

à écrit le 28/04/2024 à 6:51
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Le RN au pouvoir supprimera ce catastrophique malus écologique qui est la raison principale de la paupérisation du parc automobile français. Et c’est une des raisons de voter massivement pour lui.

à écrit le 27/04/2024 à 8:37
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Ils ne sont portés par une idéologie quelconque seulement par la feuille de route des marchés financiers qui par définition ne pensent qu'à court terme et donc peuvent faire changer brutalement les discours et actes de leurs larbins politiciens à tou...

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