Comment l'état français court après l'argent frais

C'est l'inflation. Non pas celle des prix, mais celle des émissions de dette par les États. L'an prochain, ils emprunteront sur les marchés des sommes record. Déjà, l'État fédéral américain a prévu de lever 550 milliards de dollars entre octobre et décembre 2008. Du jamais vu. En Europe aussi, le volume d'emprunts explose. Dans une étude récente, Morgan Stanley estime que les États de la zone euro solliciteront le marché obligataire à hauteur de 631 milliards d'euros en 2008, puis 765 milliards en 2009. Une hausse de 20 %, liée bien sûr à l'envolée des déficits budgétaires, sous l'effet de la récession qui frappe les économies occidentales. nouvelles ressourcesPour la France, l'augmentation du besoin de financement atteindrait même 24 % d'une année sur l'autre, à 154 milliards d'euros pour 2009. Une somme servant à couvrir, non seulement le déficit budgétaire prévu à hauteur de 57,6 milliards d'euros (un record), le remboursement des emprunts arrivant à échéance, et de nouveaux besoins, nés d'une volonté sarkozyenne de voir l'État intervenir tous azimuts : ainsi, le fonds « souverain » destiné à soutenir l'industrie française, dont Nicolas Sarkozy annoncera ce matin les modalités, sera-t-il financé pour une grande part au moyen de l'émission d'une dette supplémentaire.« Pour l'instant, ces appels au marché ne posent pas problème », estime Éric Chaney, responsable des études économiques du groupe Axa. « Pour emprunter aujourd'hui, mieux vaut être un État qu'une banque ou une entreprise? » Mais, poursuit-il, « si la crise est durable, les marchés deviendront sélectifs, y compris sur la dette souveraine » (celle émise par les États). Autrement dit, si l'administration américaine trouve toujours prêteur, certains pays auront quelque peine à rassembler toutes les sommes nécessaires au financement de leurs déficits. « Voilà pourquoi l'idée s'impose d'aller chercher de l'argent tous azimuts, y compris par la vente d'actifs », affirme Éric Chaney.La France est représentative de cette tendance : le gouvernement met tout en ?uvre pour trouver de nouvelles ressources. En utilisant les recettes traditionnelles. Bercy aimerait bien augmenter le montant des cessions de parts d'entreprise détenues par l'État. Mais le marché boursier se prête-il à ce genre d'opérations de « privatisation » ? En 2008, ces recettes seraient inférieures à 1 milliard d'euros, contre 5 milliards prévus.les profits convoitésLe gouvernement lorgne, du coup, les profits des grandes entreprises dont il a encore la tutelle. Il demande ainsi des acomptes sur dividende à EDF et France Télécom, à hauteur de 2 milliards d'euros (voir ci-contre). Et il racle tous les fonds de tiroir de la Caisse des dépôts. Celle-ci devient une vraie vache à lait, se substituant à l'État pour soutenir les PME en mal de financement. Cela occasionne notamment une réaffectation des fonds gérés par la Caisse, issus des livrets d'épargne. Quelle sera la prochaine source de financement ? L'imagination des hauts fonctionnaires de Bercy a rarement été aussi grande.Ivan Best
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