Lee Miller, tendre insolite

expo photosNew York, 1927. L'empereur de la presse, Condé Nast, vient de s'acheter un nouveau bolide. Et il compte bien en profiter. Sans se soucier des passants. Un accident avec une beauté froide est évité de justesse. Mais plutôt que de raccompagner la jeune fille chez elle, notre homme l'adresse à Edouard Steichen, l'?il de « Vogue ». Sans se douter qu'il lance la carrière d'une photographe majeure du XXe siècle. Car Lee Miller (1907-1977), la demoiselle en question, va vite s'imposer comme une grande photographe surréaliste, une subtile portraitiste et une extraordinaire reporter de guerre. Dommage que l'exposition incomplète que lui consacre le Jeu de Paume à Paris ne soit pas à la hauteur d'un tel destin. Trop sage balade au sein d'un vie qui ne l'était pas du tout. Si Lee Miller s'est frottée à la photographie dès son plus jeune âge, grâce à son père, il lui faut attendre Paris et sa rencontre avec Man Ray, dont elle devient la muse, pour donner la pleine mesure de son talent. À ses côtés, elle embrasse le surréalisme. Et n'a pas son pareil pour débusquer les éléments les plus insolites du quotidien. Mais l'hédoniste Lee vit aussi au rythme de ses amours. Et quitte Paris pour New York, avant de s'installer en Égypte aux côtés de son premier mari. De quoi lui inspirer une série de paysages d'une beauté à couper le souffle, dont l'un (« Moustiquaire déchirée sur l'horizon ») devait inspirer à Magritte son célèbre « Baiser » . photos de guerreC'est aussi pour un homme que Lee Miller rentre à Londres en 1939. Elle retravaille alors pour « Vogue », signe des photos de mode, profite de son temps libre pour photographier le Blitz et parvient à se faire accréditer auprès des troupes alliées. De ces photos de guerre, on retiendra surtout les images directes, brutes, uniques, des camps de concentration. Lee y laisse éclater sa haine des nazis, sa joie de les voir vaincus dans des portraits figurant d'anciens tortionnaires aux visages tuméfiés. Ces photos, essentielles, ne sont malheureusement pas présentées à Paris. Incompréhensible oubli.Yasmine Youssi« L'art de Lee Miller », au Jeu de Paume à Paris, 1, place de la Concorde, 75008 Paris. Tél. : 01.47.03.12.50. Jusqu'au 4 janvier.
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