Bras de fer politique autour

Un sujet délicat arrive pour trois jours à l'Assemblée nationale. Elle examine le projet de loi sur « l'ouverture à la concurrence des jeux d'argent en ligne ». Jusqu'à présent, les paris sportifs, les paris hippiques et le poker étaient sous les monopoles de la Française des Jeux et du PMU. Le calendrier est serré. Le gouvernement a promis aux nouveaux opérateurs un début des réjouissances pour la prochaine Coupe du monde de football en juin 2010. Jusqu'ici, les discussions et les querelles avaient porté sur des aspects techniques du texte. Quelle fiscalité?? Quels jeux ouvrir à la concurrence?? Quel contrôle??Autant de questions auxquelles le ministre du Budget, Éric Woerth, a répondu avec en vue la préservation des recettes fiscales de l'État, qui touche 5 milliards d'euros par an grâce aux jeux. Certes, le ministre n'a cessé ces derniers mois d'assurer que l'ouverture du marché était le meilleur moyen de lutter contre les sites illégaux, de combattre le blanchiment d'argent et la corruption. Mais ses arguments n'avaient pas été débattus dans la mesure où l'ouverture du marché à la concurrence résultait d'une injonction européenne.Début septembre, l'arrêt Santa Casa de la Cour de justice des Communautés européennes, qui autorise chaque Ét at à agir comme bon lui semble en matière de jeux et, le cas échéant, à conserver ses monopoles si des raisons impérieuses s'imposent, change la donne. Au niveau politique du moins. Depuis, la gauche demande le retrait pur et simple du texte. Même le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, Jean-François Copé, a mis hier « deux bémols » au texte?: « la question du contrôle des circuits de financement, et la question de l'addiction au jeu, sujet de société majeur ».Tentant de devancer la critique, Éric Woerth s'est rendu hier en présence de journalistes au centre médical « addiction aux jeux » de l'hôpital Marmottan à Paris. Il a ensuite participé à une table ronde où étaient conviés nombre de psychiatres, psychologues, chercheurs? De son côté, la gauche rappelle dans ses amendements que « c'est bien l'ordre public et social qui a présidé à l'institution de monopoles concernant les jeux ». Elle craint que l'ouverture ne conduise « inévitablement à des dérives » en exposant les plus vulnérables, mais aussi en mettant en danger « l'éthique des compétitions sportives ».opinion publiquePour le gouvernement, peu menacé par la gauche à l'Assemblée nationale, le danger pourrait venir d'une opinion publique jusqu'ici restée à l'écart. Depuis longtemps, télés et radios ont glorifié ces joueurs de poker qui faisaient fortune en ligne. Mais on peut entendre ces jours-ci sur les ondes des témoignages d'individus qui ont perdu leur emploi, leur femme?Il faut dire que la France ne dispose d'aucune statistique sur le sujet. Le gouvernement a lancé une étude épidémiologique, dont les résultats seront connus dans deux ans. Dans une étude publiée l'an dernier, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) note que « pour les résidents du Nevada, la légalisation des jeux a apporté des bénéfices économiques, de nouveaux emplois, mais également des coûts sociaux ». En France, une étude de l'association SOS Joueurs montre qu'une proportion majoritaire de joueurs a été confrontée au surendettement. En Grande-Bretagne, le taux de joueurs victimes d'addiction est resté stable à 0,6 % en dix ans, malgré l'ouverture des jeux en lignes. Mais les Britanniques notent que leurs milliers de boutiques de paris existaient bien avant Internet.
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