"Aujourd'hui, on dissuade fortement les Français d'épargner"

L'assurance vie n'avait pas besoin de ça. Sensible aux évolutions de fiscalité, ce placement, qui connaît depuis août 2011 des vagues de rachats et/ou de moindres versements, pourrait pâtir d'un alourdissement des prélèvements sociaux. Un possible relèvement de la CSG a été évoqué à l'issue de la conférence sociale et pourrait être de l'ordre de 3 points selon différents observateurs. Il pose la question d'une fiscalité de moins en moins supportable pour certains placements financiers comme l'assurance vie, mais aussi pour les livrets fiscalisés ou les comptes à terme (voir ci-dessous). Selon Le Canard enchaîné, le gouvernement envisagerait une hausse de 2% à 4% de la CSG. Sachant qu'une hausse de 1% peut générer 11 milliards d'euros de recettes par an pour l'Etat, et que la Cour des comptes avait estimé que 33 milliards d'euros devaient être récoltés en 2013. Le gouvernement annoncera ses propositions en matière de fiscalité début 2013.Taxer avant, pendant et aprèsDéjà, ce 1er juillet, les prélèvements sociaux atteignent 15,50%, dont 8.2% pour la seule CSG. Ils sont ainsi passés de 11% en 2008 à 12,10% puis 12,30 % en 2011, puis à 13,50% le 1er octobre 2011. En mars 2011, hors ISF et taxation des capitaux décès, la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) avait chiffré à plus de 5 milliards d'euros par an les recettes fiscales et sociales générées par l'assurance vie, dont 500 millions au titre de l'impôt sur le revenu et 4.6 milliards d'euros pour les prélèvements sociaux."L'épargne que les Français ont constituée doit être respectée. Ce n'est pas injuste d'avoir mis des économies de côté toute sa vie. Ce serait injuste de les taxer à tous les moments de la vie : avant, pendant et après", nous confiait Gérard Bekerman, président de l'Association française d'épargne et de retraite (AFER).Dans le même temps, le plafond du livret A est amené à être augmenté et risque d'engendrer des transferts d'épargne. François Hollande avait en effet promis pendant sa campagne de doubler le plafond du livret A et du LDD. Il semblerait que les pouvoirs publics s'orientent actuellement vers un relèvement progressif. Pierre Moscovici a ainsi annoncé début juillet que le doublement du plafond du Livret A sera mis en place "avec le rythme nécessaire".La Caisse des dépôts, transformateur d'épargneCe n'est pourtant pas faute de lobbying de la part des assureurs, qui militent pour la défense de l'épargne longue. La FFSA, peu avant les élections présidentielles, avait même organisé une conférence sur ce thème et signé un "Manifeste pour une politique d'épargne à long terme" avec son homologue italienne. Pour la FFSA : "Les perspectives de croissance sont faibles, l'emploi est fragilisé, les entreprises ont plus que jamais besoin de partenaires de long terme pour financer leur développement. Rien n'est possible sans l'épargne de long terme, condition de l'investissement productif durable."Mais l'assurance vie ne serait pas le seul placement touché par un relèvement de la CSG ; tous les placements fiscalisés seraient concernés.Pour Philippe Crevel, secrétaire général du Cercle des épargnants, "Aujourd'hui, on dissuade fortement les Français d'épargner. L'objectif est de relancer la consommation. Dans le même temps, on les encourage à aller vers le livret A et l'épargne courte. C'est donc la Caisse des dépôts qui va devoir devenir le transformateur de l'épargne française vers le financement de l'économie. Mais il n'est pas certain que l'épargne du livret A suffise à financer l'économie. D'autant plus qu'il y a une faible appétence, voire une défiance des Française à l'égard des placements en actions". A fin mai 2012, le livret A affiche un encours de 227.3 milliards d'euros, celui de l'assurance vie 1 375,6 milliards d'euros. Et le taux d'épargne des Français est un des plus élevés en Europe, à 17.1% selon l'Insee fin 2011, derrière l'Allemagne et la Belgique."On dit toujours que les revenus du capital sont moins taxés que les revenus du travail. Mais quelle est la démonstration réelle de cette égalité de traitement ? Parce qu'il y a eu un sérieux rattrapage concernant la taxation des revenus du capital...", conclut Philippe Crevel. Fiscalité de différents produits d'épargne financière (à compter du 1er juillet 2012)     Prélèvements sociaux Prélèvements fiscaux Prélèvement forfaitaire libératoire optionnel Remarques Livret A, LDD, livret jeune  0% 0%  0%  Plafonds: 15300€ (livret A), 1600€ (livret jeune), 6000€ (LDD) LEP  0% 0% 0%  Plafond: 7700€ Livrets ordinaires  15.5% 24% 39.5%   Assurance vie (détention < à 4 ans)  15.5% 35% 50.5%   Assurance vie (détention entre 4 et 8 ans)  15.5% 15% 30.5%   Assurance vie (détention > à 8 ans)  15.5% 7.5% 23%  Prélèvements sociaux au fil de l'eau, prélèvement libératoire optionnel et abattement de 4 600€ ou 9 200€ pour l'IR Compte à terme  15.5% 24% 39.5%   Actions (dividendes)  15.5% 21% 36.5%    Actions (plus-values)  15.5% 19% 34.5%    PEA (détention > à 5 ans)  15.5% 0% 15.5%  Plafond: 132000€  Pour aller plus loin :A lire dans La Tribune Hebdo de vendredi 13 juillet : "Les revenus du patrimoine et de l'épargne lourdement taxés"      
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