Matignon veut gouverner de plus près la recherche

Un conseil de plus dans le monde de la recherche et de l'enseignement supérieur ? Le Premier ministre a installé vendredi le Haut Conseil de la science et de la technologie (HCST). Rappellant que « les lois récentes sur la recherche en 2006 et sur les universités en 2007 ont ouvert une nouvelle ère pour l'enseignement supérieur et la recherche », François Fillon a jugé nécessaire d'appuyer l'action du gouvernement sur « une expertise scientifique solide et visionnaire ». A fortiori au moment où la France « choisit d'investir massivement dans la connaissance ». Certes.Mais en fait, un premier HCST avait déjà été installé, en septembre 2006, par Jacques Chirac. Créé par la loi de programme pour la recherche de 2006 en remplacement du Conseil national de la science, il était placé jusque là auprès du président de la République. Dan le cadre de la réforme de l'État, un décret de mars 2009 l'a placé auprès du Premier ministre et révisé ses missions et sa composition. "Vrai besoin de coordination"De là à y voir le signe d'une reprise en main par Matignon du dossier recherche, trusté jusqu'alors par l'Élysée... François Fillon a préféré évoquer le besoin d'« échange direct entre ce conseil et Matignon » et, en réponse à un « vrai besoin de coordination interministérielle », d'un « fonctionnement au plus près des ministres ». De l'avis du président du HCST, le climatologue Jean Jouzel (directeur de recherche au CEA et déjà membre du HCST ancienne mouture), les liens entre le conseil et l'Élysée s'étaient distendus. Désormais placé auprès de Matignon et hébergé par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, le nouveau conseil peut espérer être plus opérationnel. Il pourra d'ailleurs être sollicité sur les priorités nationales en matière de recherche, la stratégie de la France aux niveaux européen et international, l'organisation du système de la recherche, les relations entre recherche et entreprises ou grandes écoles et universités. Et restera attaché aux aspects touchant aux sciences humaines et sociales, a tenu à préciser Jean Jouzel, au lendemain de la remise des premiers travaux du conseil pour le développement des humanités et des sciences sociales (CDHSS). Le HCST attendu au tournantAutant dire que ses avis seront très attendus sur des sujets aussi sensibles et prompts à réactiver la grogne des chercheurs. Reste à savoir quelles suites leur donnera le gouvernement, les avis du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT), restant souvent lettre morte (tel celui demandant en juin dernier des modifications majeures du décret réformant le CNRS).Prérogative nouvelle cependant, le HCST pourra, outre les saisines de Matignon ou ministérielles, s'auto-saisir, a souligné Jean Jouzel. L'impossibilité d'auto-saisine et de publicité de ses travaux (il publiera désormais un rapport annuel) étaient de fait reprochée à l'ancienne instance, taxée de manque d'indépendance vis-à-vis du pouvoir. Selon Jean Jouzel, sa composition « plus équilibrée entre monde académique et non académique » (on compte plus de représentants de la R&D privée) est aussi un atout : « Recherche fondamentale et innovation ne sont pas antinomiques. Je suis profondément attaché à la première mais la seconde est indispensable, notamment sur les questions de réchauffement climatique », confie-t-il. Il n'est à cet égard pas étonnant que Valérie Pécresse ait insisté pour qu'il accepte, en tant que climatologue de renom et membre du Giec (Groupement intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat), la présidence du HCST.
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