Marketing internet : l'IP tracking est-il légal ?

Puisque de grandes compagnies l\'utilisent, l\'IP tracking ne peut pas être interdit, pourrait-on croire. Pourtant, si la technique visant à traiter les internautes différement en fonction de leur profil sont avérés par l\'enquête que diligentent la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), plusieurs lois françaises s\'y opposeraient.Les internautes sont tout d\'abord protégés par le Code de la consommation, qui interdit toute pratique commerciale susceptible d\'altérer le comportement du consommateur « normalement informé et raisonnablement attentif et avisé ». Faire croire faussement à une diminution de la disponibilité du bien ou du service constituerait sans doute un tel manque de loyauté, voire une pratique commerciale trompeuse, explique Céline Avignon, avocate spécialiste du marketing électronique. Les entreprises rivales pourraient d\'ailleurs elles aussi contester ce moyen de concurrence illicite et l\'avantage déloyal qui en découle.Un consentement improbable mais obligatoireSi l\'IP tracking est réalisé grâce à l\'installation de cookies sur l\'ordinateur du consommateur, un autre texte s\'applique : l\'article 32 II de la loi informatique et libertés qui impose, avec quelques exceptions très restreintes, d\'informer préalablement l\'internaute et d\'obtenir son accord. Les éventuelles clauses d\'information ou de consentement insérées dans les conditions d\'accès au site ne suffiraient pas à remplir cette obligation légale, considère Maître Avignon.Plus généralement, comme l\'a récemment confirmé la Commission européenne, l\'adresse IP est une donnée à caractère personnel. En France, collecter et traiter ce genre d\'informations implique l\'obligation de respecter l\'intégralité de la loi informatique et libertés de 78, qui impose non seulement de recueillir le consentement explicite du consommateur, mais aussi de déclarer à la Cnil les finalités, la durée de conservation des données etc. « A l\'évidence, personne n\'accepterait l\'installation de cookies ou le traitement de ses données personnelles afin de payer plus cher ! », remarque Céline Avignon.Faire valoir d\'éventuelles discriminations semblerait en revanche être plus difficile. Tant le Code pénal que la loi spécifique de 2008 ne répriment que les discriminations fondées sur des critères très précis, comme l\'appartenance à une ethnie ou l\'âge, peu susceptibles d\'être retenus contre ces méthodes très courantes de segmentation comportementale.Un arsenal répressif suffisant... quand la loi française s\'appliqueSi la Cnil et la DGCCRF concluaient à l\'utilisation de techniques illicites, elles pourraient donc engager des actions contre les entreprises qui y recourent. Au-delà des sanctions pénales prévues pour les violations de la loi informatique et libertés ou du Code de la consommation, la Cnil pourrait aussi mettre en demeure les entreprises de cesser la pratique voire prononcer un avertissement à leur encontre et publier sa délibération.En rejetant deux amendements au projet de loi relatif à la consommation qui visaient à renforcer la lutte contre l\'IP tracking, l\'Assemblée nationale semble avoir elle aussi considéré que l\'arsenal répressif existant suffisait. Pour que la loi française s\'applique, il faudra néanmoins soit que le site s\'adresse explicitement à un public français, soit que les données personnelles soient traitées en France, soit que l\'un des moyens de traitement des données se trouve dans l\'Hexagone. Dans les autres cas, l\'IP tracking passerait effectivement entre les mailles de la loi.>> LIRE AUSSI : Internet : les prix fixés à la tête du client, ça existe. Et ça s\'appelle l\'IP Tracking
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