Meredith, l'analyste people

Par Jérôme Marin, correspondant à New York
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À Wall Street, Meredith Whitney a plus d'ennemis que d'amis, plus de détracteurs que d'admirateurs... Nombreux sont ceux qui s'agacent devant la réussite d'une « analyste de seconde zone », arrivée dans la profession par la petite porte avec un simple « bachelor's degree » en histoire - décroché tout de même dans la prestigieuse université de Brown. Avant le 31 octobre 2007, Meredith Whitney était une simple analyste « action » chez un modeste courtier, Oppenheimer & Co. Mais, ce jour-là, elle publie une note sur Citigroup qui va faire l'effet d'une bombe. Elle prédit que la banque - mal gérée selon elle - devra soit lever jusqu'à 30 milliards de dollars de capital par cession d'actifs ou réduction de dividende, soit faire faillite. Le lendemain, l'action s'effondre de 7 %, entraînant avec elle la plupart des grands indices. « De nombreux analystes ont expliqué que mes doutes étaient exagérés, ou que mes calculs étaient faux, ce qui, pour un analyste, est la pire des insultes », expliquera-t-elle plus tard. Quatre jours après, le PDG de Citigroup démissionne et trois mois plus tard, le groupe réduit son dividende de 40 %. Coup de chance, pour les uns, géniale intuition pour les autres, peu importe, elle a eu raison (même si ses affirmations étaient largement des suppositions). Sa réputation est donc faite ; elle devient « l'analyste qui fait trembler Wall Street ». « Elle a exprimé haut et fort une opinion qui s'est avérée beaucoup plus séditieuse pour l'ordre social ; elle disait que les banquiers de Wall Street étaient idiots », résume le romancier Michael Lewis, dans son best-seller « le Casse du siècle ». Depuis, Meredith est devenue une star des plateaux de télévision, s'offre la une du magazine « Fortune », se hisse parmi les 50 femmes les plus influentes des États-Unis, selon le même magazine. « Je travaille dans un secteur dominé par les hommes », aime-t-elle souligner comme pour rejeter dans les cordes toutes les critiques qui lui sont adressées. Il faut dire que Meredith Whitney détonne au pays des analystes financiers. Elle n'hésite pas à utiliser son image et à se mettre en scène, posant par exemple pour les photographes avec son mari, un ancien catcheur professionnel. Elle cultive son statut de vedette, inaccessible et limitant désormais ses interventions. Ses détracteurs répliqueront qu'elle essaie surtout de cacher ses faiblesses. Ils s'amusent à rappeler que deux tiers des recommandations de sa nouvelle société se sont jusqu'à présent révélées erronées. « Mes conseils sont basés sur du long terme », a-t-elle récemment répondu sur CNBC. Surfant sur sa notoriété, Meredith Whitney est désormais à la tête de sa propre firme depuis le début de l'année. Et elle souhaite s'attaquer à l'oligopole des agences de notation, Standard and Poor's et Moody's en tête. Rien de moins ! « Notre système est transparent et notre crédibilité bien meilleure sur les produits structurés, les obligations d'entreprises et les obligations municipales », affirme-t-elle en pleine page du « Financial Times ». Et quand on lui fait remarquer que son modèle économique est identique à celui de ses prestigieux concurrents - modèle remis en cause en raison des risques de conflits d'intérêts -, la réponse fuse, sans appel : « Ce modèle a bien marché pendant des années ! »

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