L’acte II manqué de Macron

ÉDITO. La violence politique qui s'aggrave avec la réforme des retraites se nourrit d'un procès en illégitimité, avec des actions de plus en plus radicales qui inquiètent d'autant plus le pouvoir qu'il n'en voit pas venir la fin. Par Philippe Mabille, directeur de la Rédaction.
Philippe Mabille
Le gouvernement a fait exploser en vol son acte II avec une réforme des retraites qui reste et restera contestée.
Le gouvernement a fait exploser en vol son acte II avec une réforme des retraites qui reste et restera contestée. (Crédits : POOL)

Pour clore la séquence du Grand débat national et éteindre, autant que faire se pouvait, la séquence « gilets jaunes », Emmanuel Macron avait lui-même évoqué, l'an dernier, lors d'une de ses trop rares conférences de presse ouvertes, l'entrée dans un acte II du quinquennat. Un nouveau chapitre de son mandat, plus délibératif, plus horizontal, placé sous le signe de l'apaisement des fractures sociales et territoriales. Le chef de l'État, fan de théâtre, a pu mesurer récemment au Théâtre des Bouffes du Nord, à Paris, l'échec de cette stratégie. Lors de la manifestation dite de la « retraite aux flambeaux », le 23 janvier, quelques hurluberlus ont aussi défilé en portant sa tête (en carton-pâte) au bout d'une pique, pendant que d'autres ont affiché une banderole rebaptisant « place de la guillotine » la place de la Concorde.

Figure du roi

Emmanuel Macron, comme il l'avait théorisé dans son entretien avec l'hebdo Le Un en 2015, se trouve pris à son propre jeu, lui qui avait affirmé alors que « la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique » (une critique assez transparente de son prédécesseur François Hollande...).

« Cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort », avait-il expliqué.

En fait si, un peu quand même. Apparemment, cet imaginaire demeure dans certains esprits sans doute légèrement dérangés, mais déterminés à rejeter la figure du roi qu'Emmanuel Macron a voulu réinstaller au cœur de la République.

Cette violence politique qui s'aggrave avec la réforme des retraites se nourrit d'un procès en illégitimité, avec des actions de plus en plus radicales qui inquiètent d'autant plus le pouvoir qu'il n'en voit pas venir la fin. Entendre Emmanuel Macron botter en touche d'un « Allez-y en dictature, vous verrez ! » n'y change pas grand-chose : la question n'est pas de savoir si Emmanuel Macron a mis en marche une dictature à coups de répression policière des manifestations, mais qu'a-t-il fait pour répondre à la crise démocratique et à la défiance entre le peuple et ses élites ? Ni la promesse - non tenue - de référendum, ni la réforme - démagogique et déjà mort-née - de l'Ena n'y ont rien changé.

Le dégagisme guette

Le gouvernement a fait exploser en vol son acte II avec une réforme des retraites qui reste et restera contestée. Qu'importe de savoir si celle-ci est, au moins dans les intentions affichées, la plus redistributive jamais proposée. Rien n'y fait : trop complexe, financièrement fragile comme le dit l'avis destructeur rendu par le Conseil d'État, la plus haute juridiction administrative, sur le projet de loi présenté par Édouard Philippe le 24 janvier, cette réforme dont le vote au Parlement sera un chemin de croix, est en mauvaise posture.

Dernier signe de fragilité, le départ de plus en plus bruyant des personnalités les plus disruptives du parti qui a permis au chef de l'État de conquérir l'Élysée. Le refus de Cédric Villani, sacrifié pour sauver le soldat Griveaux, alors que s'installe à Paris un match gauche-droite Hidalgo/Dati, est une gifle pour Emmanuel Macron. D'autant que s'y ajoute la défection de figures de la rénovation de la vie politique, telle la députée de l'étranger Paula Forteza, qui rejoint Cédric Villani et la quinzaine de parlementaires qui ont déjà quitté le groupe en dénonçant un parti « verrouillé » qui « récompense les amitiés ». Pas très « nouveau monde » tout cela.

La barre fatidique des 289 députés qui fixe la majorité n'est plus si loin. Une fronde ? Non, Sire, une révolte des déçu.e.s du macronisme. Beaucoup s'interrogent désormais sur sa capacité à se représenter en 2022. L'entrée en campagne de Marine Le Pen, mais aussi de Ségolène Royal, montrent que le dégagisme qui a frappé François Hollande pourrait se retourner contre son instigateur.

Philippe Mabille

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Commentaires 28
à écrit le 07/02/2020 à 6:35
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à écrit le 06/02/2020 à 9:27
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Non acte réussit !!! Sont but était d'avantager ceux qui ont de l'argent! Et lorsque les 5% des plus pauvres voit diminuer de plus de 250 euros leurs revenus et que les plus riche 5% gagnent 2500 euros, disons que cela montre comment le média auss...

à écrit le 05/02/2020 à 18:23
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L'antimacronisme ambiant masque la réalité, à savoir une augmentation des revenus des ménages sans précédent de 2008.

à écrit le 05/02/2020 à 17:34
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Macron ne fait qu'expérimenter le retour social de boomerang de ses actes institutionnels, qui sont violents. Depuis qu'il est au pouvoir la quasi totalité des lois sont votées en procédure d'urgence, sans tenir aucun compte des (contre)- proposit...

le 05/02/2020 à 18:25
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Vous décrivez là quelqu'un qui a été élu sur un programme et qui tient à le respecter. Cela nous change des précédents qui changeaient au gré du vent et de la réaction des syndicats ou qui arrondissaient tellement les angles comme vous dites que leur...

le 05/02/2020 à 19:46
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@Tototiti Macron n' avait pas de programme, il avait les GOPE de l' UE ou feuille de route de Bruxelles ; 20 Mn mais pas que, "Présidentielle: Pas de programme Macron? On a cherché les propositions du candidat" ! Un vide, sidéral qua...

le 05/02/2020 à 21:55
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Non je décris quelqu'un qui est fondamentalement trop incertain de lui-même pour accepter que ses propositions soient soumises au filtre de la démocratie parlementaire. Alors il se réfugie derrière un programme assez fictif. En ce qui concerne le...

le 06/02/2020 à 9:32
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Le mot autoritariste est exactement cela , un point sur la définition en rapport avec son discours pour mieux comprendre! "Le terme autoritarisme peut désigner aussi bien un comportement que le mode de fonctionnement d'une structure politique. L'...

le 10/02/2020 à 19:47
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C'est simplement que Macron et son entourage sont englués dans une idéologie dans laquelle seule la finance internationale et quelques riches ont droit de prospérer . il a une idéologie destructrice de ce qui fait les sociétés harmonieuses . Il détru...

à écrit le 05/02/2020 à 17:26
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Depuis le début du quinquennat, les ménages les plus pauvres de l’Hexagone sont les grands perdants de la politique fiscale menée par la présidence Macron. C’est que décrit une note publiée mercredi 5 février par l’Observatoire des conjonctures écono...

le 05/02/2020 à 18:45
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Plus de 50 % des ménages ne paient pas l'impôt sur le revenu. Quand on baisse les impôts, il ne profite qu'à ceux qui les paient. C'est une évidence.

à écrit le 05/02/2020 à 16:34
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L'acte 2 n'est pas manqué!Bons chiffres économiques:chomage en baisse,meilleure croissance d'europe,dette par rapport au pib en baisse.2022 se jouera sur l'économis,donc sur le bilan actuel positif

le 05/02/2020 à 18:34
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la baisse du chomage est une escroquerie statistique, par des radiations massives. La réforme des retraites est aussi une escroquerie, qui ne profitera qu'aux financiers. On sort les plus faibles du système, on les retrouvera à la rue.

à écrit le 05/02/2020 à 16:28
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Pas le peuple français, pas les élus locaux, pas le sénat... restent quelques députés macronistes. Majoritaire initialement avec 310 députés LREM, la formation a déjà été quittée officiellement par 10 député(e)s. Ajoutons Villani qui sera suivi pa...

à écrit le 05/02/2020 à 13:02
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que l'acte II de macron qui était raté, ce ne serait pas encore très grave. Mais le mal-élu et incompétent élyséen s'est fait une spécialité des ratages et des échecs. Comme il l'avait d'ailleurs déjà prouvé en étant sinistre de l'économie... D'aille...

à écrit le 05/02/2020 à 11:46
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Il possède la haine de l'homme fragile, fragile puisque mal élu par une minorité, fragile parce qu'il n'a pas été élu pour lui même mais par dégagisme des autres, fragile car il vient d'un milieu social qui ne connaît rien d'autre que le sien (de mil...

à écrit le 05/02/2020 à 11:21
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En termes de procés en illégitimité il pourrait être pour Macron une réalité incontestable puisqu'il s'autorise de dire que la France n'est pas souveraine, (prétendant que l'UE- qui elle ne l'est pas…le serait pour elle) alors que l'article 2 de la c...

le 06/02/2020 à 9:42
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le problème est aussi que la constitution devient caduc a partir du moment ou ses ministres s'en passent. Et lorsque l'on ne respecte plus les textes fondateurs, disons que forcément un autre régime est "en marche". Cela ressemble a un absolut...

à écrit le 05/02/2020 à 10:40
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pauvre france dire que j'ai voter pour lui ce sera la plus grosse bêtise de ma vie la prochaine fois je n'hesiterai plus entre macron et le pen plus jamais macron et je sais pour l'entendre sur les marchés beaucoup sont comme moi.....et le coup du de...

à écrit le 05/02/2020 à 9:38
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L'acte II est surtout le constat des ravages du nombrilisme et des égos démesurés ! Le " j'ai (on a ... ) toujours raison car c'était dans mon programme (...ou pas ! ) " ; est une insulte a la démocratie , contrairement a ce qui se passe ...

à écrit le 05/02/2020 à 9:17
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LE pire est que si les gens savaient qu'il faisait tout cela, à savoir tout casser sans rien reconstruire de perenne ils le suivraient dans ce nihilisme jusqu’au-boutiste. Ce qui ne passe pas c'est qu'il travaille pour la finance européenne alors...

le 05/02/2020 à 9:42
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Le soupçon d'une certaine connivence entre le macronisme LREM et la direction du RN ne peut être écarté, expliquant ainsi la déclaration anticipé de Marine a se présenter a l'élection présidentielle et la résolution future de ses déboires économiques...

le 06/02/2020 à 8:56
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LREM et RN ont exactement la même vision oligarchique de l'économie, attendre quoi que ce soit du RN c'est être d'une crédulité sans nom mais les médias ne font que fabriquer des gens crédules en masse, de moins en moins heureusement quand même. ...

le 06/02/2020 à 9:53
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Oui, car lorsque l'on se détache de sa responsabilité, que dans le même temps on s'approprie le pays, et surtout que l'on n'assume pas, le en même temps est une manière d'y parvenir, seul la violence est ensuite la réponse. Lorsque l'on n'a pas d'...

à écrit le 05/02/2020 à 9:01
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Le profil psychologique de Macron est quand même atypique, voire inquiétant...Que peut on espèrer d'empathie, d'humanité non feinte d'un homme jeune, sans enfants qui vit avec une femme qui approche les 70 ans? Rien d'autre que de la froideur pour de...

le 05/02/2020 à 9:39
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....tout a fait d'accord !

le 05/02/2020 à 10:22
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Mitterrand a ruiné la France et l'empathique Jacques Chirac, l'a laissé couler. Ne parlons pas de Sarkozy (Lybie) et du catastrophique Hollande. Les français ont besoins d'empathie dans leur vie quotidienne mais pas ils ne doivent pas l'attendre du...

le 05/02/2020 à 19:01
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Si je comprends bien Il faut acheter un gros nounours au peuple Français pour noël prochain. Le problème d'aujourd'hui, c'est celui d'hier qui s'empire car depuis 40 ans, nous faisons tout pour que rien ne change et en bon peuple schizophrène, nous n...

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