Le nouveau consensus de Davos

ÉDITO. La 50e édition du World Economic Forum, qui a choisi pour thème « Parties prenantes pour un monde cohésif et soutenable », propose une ouverture en forme de confrontation entre l'ancien et le nouveau monde: mais entre Donald Trump, le président américain perclus de certitudes, et Greta Thunberg, l'égérie verte ultraradicalisée, sera-t-il possible de trouver un juste milieu? Par Philippe Mabille, directeur de la Rédaction.
Philippe Mabille
(Crédits : Reuters)

Détesté par les uns, parce ce qu'il incarne l'ancien monde et l'égoïsme des milliardaires, ignoré superbement par les autres, qui ne savent rien de ce mystérieux sommet qui enferme chaque année durant quatre jours le nec plus ultra des dirigeants du monde dans une petite station suisse des Grisons, au pied de la montagne magique de Thomas Mann, Davos est pourtant à un tournant de son histoire. Une longue histoire engagée il y a cinquante ans par son fondateur, un professeur de management, Klaus Schwab, qui, dès les années 1970, alors que régnait la guerre froide, que la Chine ne s'était pas encore éveillée, avait eu l'intuition que le capitalisme ne pourrait surmonter ses contradictions qu'en s'ouvrant à ses « parties prenantes » : salariés, clients, fournisseurs et société civile.

Entre « la prophète de l'apocalypse » et « l'apôtre de la démondialisation »

Ce capitalisme partenarial, longtemps éclipsé par le capitalisme actionnarial cher à Milton Friedman - le seul but de l'entreprise est le profit et la satisfaction des actionnaires -, est en train de revenir à la mode, par la grande porte, à l'orée des années 2020, à la faveur des changements tectoniques observés depuis le début du XXIe siècle. Pour sa 50e édition, le World Economic Forum a choisi pour thème « Parties prenantes pour un monde cohésif et soutenable », ce qui démontre une volonté de coller au nouvel air du temps.

En offrant aux 2. 800 participants une ouverture en forme de confrontation, à distance, entre l'ancien et le nouveau monde, entre Donald Trump, le président américain perclus de certitudes, venu à Davos parler essentiellement à ses électeurs de novembre prochain, et Greta Thunberg, l'égérie verte ultraradicalisée, pour qui « rien n'a été fait » en faveur du climat, on se dit qu'il doit bien y avoir un juste milieu à trouver entre « la prophète de l'apocalypse » et « l'apôtre de la démondialisation ».

Sous la pression des consommateurs, des clients, et même des talents

Pour les entreprises, qui participent toujours en masse au Forum économique parce que c'est une plateforme unique de dialogue mondial, le nouveau consensus de Davos est devenu une feuille de route. Sous la pression des consommateurs, des clients, et même des talents qu'elles veulent recruter, et désormais sous celle des actionnaires, les multinationales ont compris l'urgence d'accélérer leur transition vers un monde plus inclusif et plus durable et à faire en sorte qu'il ne s'agisse pas que d'un artifice de communication. Toutes les entreprises participant à Davos ont reçu une lettre leur demandant de s'engager à ne plus émettre de CO2 d'ici à 2050. Certains, comme Bill Gates de Microsoft, affirment vouloir être carbon neutral dès 2030.

Une prise de conscience de la gravité des enjeux

Certes, les écologistes et les ONG continueront à parler d'hypocrisie alors que Greta Thunberg persiste à les accuser d'inaction, son seul thermomètre étant de « stopper immédiatement » toutes les consommations d'énergies fossiles. Alors que l'image du capitalisme est plus dégradée que jamais, que les populismes gagnent du terrain et que les révoltes type « gilets jaunes » se mondialisent, les élites mondiales ont compris qu'elles n'ont plus vraiment d'autre choix que d'agir pour réduire les inégalités et contre le réchauffement climatique. Pour passer à l'échelle, on passe dans une nouvelle ère : les Big Four de l'audit travaillent à un plan visant à standardiser la façon dont les multinationales contribuent à la réalisation des 17 objectifs de développement durable de l'ONU.

Et la finance s'y met aussi : présent à Davos, Larry Fink, le PDG de BlackRock (voir notre dernier numéro) menace de ne plus investir dans les entreprises tirant plus de 25% de leurs revenus de la production de charbon. Encore une goutte d'eau dans l'océan, mais clairement, un changement d'époque, avec la prise de conscience de la gravité des enjeux. C'est sans doute une bonne nouvelle mais en s'affichant green et vegan, Davos en est presque devenu... chiant.

Philippe Mabille

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Commentaires 6
à écrit le 26/01/2020 à 8:22
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Ouais ! Mais il ne faudra pas encore attendre 50 ans pour que ce capitalisme" partenarial" souhaitable pour ce fondateur voit enfin le jour, car ce sera trop tard. Et bien avt 50 ans du reste !! Bien sûr, M Mabille ne peut pas s'exprimer en ces term...

à écrit le 25/01/2020 à 14:16
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Saura-t-on un jour qui est derrière Greta Thunberg ?

à écrit le 25/01/2020 à 11:54
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Je le répète, puisue mon commentaire de 9h30 n'est pas passé. "monde cohésif", c'est quoi ce jargon ? Quelle crédibilité accorder à des gens qui s'expriment dans un pareil galimatias ? Et cela hors de l'empreinte carbone de ce type d'évènement ....

à écrit le 25/01/2020 à 11:45
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C'est au collège, donc je ne vous dis pas quand par pudeur, que j'ai appris cette histoire de trop de CO2 dans l'air du fait de la pollution générée par l'activité humaine, si depuis le temps nos dirigeants économiques et donc politiques avaient voul...

à écrit le 25/01/2020 à 9:31
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"monde cohésif" : c'est quoi ce jargon ? Quelle crédibilité accorder à des gens qui s'expriment avec un pareil galimatias ? Et cela hors de l'empreinte carbone de ce type d'évènement ...

à écrit le 25/01/2020 à 9:00
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On peut toujours discourir sur le sujet mais tant que l'on restera dans une "politique de l'offre" adjointe a son indispensable "publicité", nous ne noterons aucune évolution!

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