John Daane (Altera) imagine quelques points de résistance dans le marasme ambiant


John Daane est le directeur général d'Altera, un spécialiste des puces logiques programmables. Ces circuits prennent des parts de marché aux circuits spécifiques. Ils résistent pendant la crise.


John Daane






 







 

 





 

 






Depuis la bulle Internet de la fin des années quatre-vingt dix, la croissance de l'industrie des semi-conducteurs est provenue des applications grand public. Les téléphones, les consoles de jeux, les télévisions et les multiples objets pouvant se connecter entre eux ont tiré le marché. John Daane, le directeur général d'Altera pense que ce marché va être durablement atteint, particulièrement aux Etats-Unis. « Les américains ont profité de la bulle immobilière qui leur a permis d'emprunter en gageant leur logement, explique-t-il. Ce phénomène est terminé et les américains vont devoir épargner à l'image de ce qui se pratique en Asie. Cela va déprimer le marché de l'électronique grand public. On continuera à vendre des appareils, notamment dans les pays asiatiques mais les prix moyens de vente seront moins élevés ». D'où une répercussion sur l'ensemble de la chaîne des puces électroniques.


Cela dit, sur les quatre grands marchés de l'électronique (Industrie, communications, informatique et stockage de données, produits grands public et téléphone portables), l'industrie et les communications devraient être moins impactées par la crise. « L'industrie devrait moins investir en capacité de production, conçoit John Daane, mais ce segment comporte aussi les applications militaires. Or l'armement et les systèmes de combat devraient consommer de plus en plus de puces dans les années à venir ». Dans les communications, le filaire est un peu en berne mais le cellulaire continue à progresser, notamment en Chine avec la mise en œuvre des réseaux de troisième génération. L'informatique est pénalisée par la prudence des entreprises, voire leurs économies sur les plans d'investissements et la montée en puissance des netbooks, qui contiennent une électronique sensiblement moins onéreuse que les notebooks.


La baisse du marché en 2009 ? John Daane l'envisage comprise entre 25% et 30%. Il estime que l'industrie des semi-conducteurs subit un repositionnement fondamental avec une baisse de chiffre d'affaires qui ne sera pas remplacé rapidement. Il anticipe une croissance lente, comprise entre 1% et 5% pour l'ensemble du marché.


Dans ce contexte, les concepteurs de puces logiques programmables comme Altera et Xilinx, les deux leaders du marché, devraient tirer leur épingle du jeu. En revanche, les autres entreprises, positionnées sur les circuits spécifiques (ASICs) ou circuits standardisés (ASSP) devraient souffrir et faire l'objet de concentration.





Pour comprendre la situation, il faut savoir que les circuits spécifiques sont relativement onéreux à produire. Les coûts de recherche et de développement peuvent aller de 10 à 50 millions de dollars. Les ASICs sont optimisés pour des taches bien précises comme le fonctionnement d'une console de jeux ou d'un smartphone mais il faut être sûr d'en vendre beaucoup pour amortir les coûts de développement. « Il faut compter 30 millions de dollars de frais de développement pour mettre au point un circuit spécifique avec un pas d'écartement de 90 nanomètres, note John Daane. Comme les frais de recherche de l'industrie représentent 20% du chiffre d'affaires, il faut réaliser des ventes de 150 millions de dollars avec ce circuit. Si votre coût moyen de vente est de 10 dollars, vous devez en vendre 15 millions d'unités. S'il est de 20 dollars, vous devez en vendre 7,5 millions. Or, peu de marchés sont capables d'absorber un tel volume », sauf dans les téléphones portables. Et plus on réduit dans le pas d'écartement, plus cela coûte cher. Qu'en est-il alors de la loi de Moore, qui prévoit, à prix de vente constant, un doublement de la puissance des puces tous les 12 ou 18 mois ? « En théorie, elle existe toujours, assure John Daane. Mais elle coûte de plus en cher à mettre en œuvre ».


A l'inverse, les puces logiques programmables sont, comme leur nom l'indique, programmables pour plusieurs applications. Leur architecture permet une mutualisation sur plusieurs industries. On les trouve un peu partout, dans les équipements de télécommunications, dans certains produits industriels, dans les armements et dans des produits d'électronique grand public à diffusion limitée (les vidéos projecteurs). « Chez Altera, aucun client ne nous fournira 150 millions de dollars de chiffre d'affaires par an pour une de nos puces, souligne John Daane. Mais nous pouvons vendre la même puce à plusieurs clients ». Ces derniers peuvent la programmer comme ils l'entendent. Et ce n'est pas tout. « Nous ne dépendons pas d'une nouvelle application grand public pour croître, poursuit le directeur général d'Altera. Nous pouvons simplement poursuivre nos gains de parts de marché en remplaçant les circuits spécifiques dans les applications industrielles, militaires ou de télécommunications ». Et de préciser que son chiffre d'affaires dans les télécommunications a augmenté sur un rythme annuel composé de 11,5% depuis cinq ans alors que ses clients du secteur n'ont enregistré qu'une croissance moyenne composée de 5,5% sur la même période. La différence ? Le gain de part de marché.


Cette tendance devrait s'accélérer car les puces logiques programmables ont pu se positionner sur les nouvelles techniques de fabrication (pas d'écartement de 40 nanomètres) alors que les circuits spécifiques et standard ont pris du retard. « Grâce à cette avance technologique, 88% des ASICs peuvent être remplacés par des puces logiques programmables, assure John Daane. Nous visons un marché de 10 milliards de dollars pris sur les 24 milliards de dollars des ASICs ». Bien sûr, les concepteurs d'ASICs ne sont pas d'accord avec cette vision. En 2008, Altera a réalisé un chiffre d'affaires de 1,37 milliards de dollars (+8%) et dégagé un bénéfice net de 359,7 millions (+24%). La société envisage un repli de 15% à 20% de son volume d'affaires pour son  premier trimestre fiscal 2009.



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