Assureurs  : pourquoi vous désolidariser de nos retraites  ?

OPINION. Le projet de loi instituant un système universel de retraite a pris du retard en raison de la crise sanitaire. Les assureurs ont choisi de moment pour remettre en cause les règles de répartition du financement des retraites des agents généraux d'assurance en vigueur depuis 1952. Un signal inquiétant pour la profession... et pour tous nos concitoyens. Par Sylvain de Nombel, Président de la caisse de retraite des agents généraux d’assurance Cavamac (*).
(Crédits : DR)

Les agents généraux d'assurance sont un peu les médecins généralistes de l'assurance, ils ont un lien de proximité et de confiance avec les Français et les entreprises confrontés à une problématique d'assurance.

Ils sont le visage humain et rassurant d'un secteur parfois incompris, on l'a vu ces derniers mois avec des compagnies d'assurances confrontées par temps de la Covid à la détresse de restaurateurs à la perte d'exploitation intenable, ou encore à la grogne de millions d'automobilistes attendant un geste sur leurs primes alors que leurs véhicules étaient restés au parking pour cause de confinements successifs.

Après des années de forte concentration à l'initiative des compagnies d'assurances et de réduction de nos effectifs, le modèle économique de l'agent général d'assurance est maintenant stabilisé avec 12.000 femmes et hommes particulièrement performants alors que de nouveaux acteurs ont émergé, bancassureurs ou pure players.

L'élection présidentielle sera l'occasion pour tous les candidats de se positionner sur l'avenir des retraites en France. Le projet de loi instituant un système universel de retraite, soumis dès 2020 au Parlement sous le régime procédural accéléré, a depuis marqué le pas pour cause de pandémie mondiale, les pouvoirs publics étant prioritairement mobilisés par l'urgence sanitaire et le déploiement du « Quoi qu'il en coûte » théorisé par le président de la République pour accompagner les salariés et les entreprises dans la crise.

C'est curieusement le moment choisi par les assureurs pour envisager de quitter sur la pointe des pieds les règles de répartition du financement des retraites des agents généraux d'assurance telles qu'elles existent depuis 1952 et, finalement, mettre en grave danger un régime sain et géré en bon père de famille. En clair, pour les assureurs, peu importent les 12.000 actifs travaillant aux côtés des compagnies d'assurances, peu importent les 28.000 retraités, dont près de 9.000 pensions de réversion, ou peu importent encore les 8,5 milliards de droits constitués. Il faut changer !

Conséquence : à défaut d'un retour vers une position raisonnable, voire responsable, les agents généraux d'assurances auraient le choix entre une augmentation de plus de 50% de leurs cotisations ou une baisse du tiers de leurs pensions de retraite.

Cela, le gouvernement ne peut pas le permettre, alors que le projet de loi « Retraites » prévoyait justement de pérenniser la contribution conventionnelle historique des compagnies d'assurances à nos retraites, dans une juste répartition du financement de notre régime entre agents généraux d'assurances et compagnies d'assurances.

Cela, les compagnies d'assurances ne peuvent pas se le permettre, qui auraient recours, en même temps, à un réseau de terrain d'agents généraux d'assurances entrant plutôt tardivement dans la profession, à 40 ans, et leur dire :

"Le secteur de l'assurance c'est l'avenir, mais vos retraites on s'en lave les mains..."

Cette incohérence ne manquerait pas de poser un problème d'attractivité insoluble à AXA, Allianz, MMA, Aviva, GAN, Generali, Swiss Life, etc. On le sait, les compagnies d'assurances militent pour le développement en France d'une part plus dynamique des retraites par capitalisation. La mésaventure des agents généraux d'assurances signe la tentation du basculement vers un modèle qui n'est pas conforme au pacte social français.

Ce serait venir ajouter à la double peine pesant déjà sur les agents généraux d'assurances qui, avec un taux représentant près du quart de leurs revenus, ont le niveau de cotisation le plus élevé avec les personnels navigants... mais parmi les moins rentables parmi les retraités français : 1 euro de retraite coûte 20 euros dans le régime universel, un peu plus de 25,5 euros pour notre profession.

C'est un signal inquiétant pour tous nos concitoyens, signal auquel tous les responsables politiques doivent prêter attention. Les agents généraux d'assurances ne sont en effet pas des nantis, que l'on viendrait mettre au pas : notre âge de départ à taux plein est à 67 ans, pour une pension moyenne annuelle en droits propres de 17.352 euros, soit 1.446 euros bruts mensuels, elle est en moyenne de 1.503 euros bruts mensuels pour les Français.

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Commentaires 12
à écrit le 15/06/2021 à 17:06
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Les agents d'assurance réalisent que les compagnies les considèrent comme une variable d'ajustement financier. C'est finalement comme nous, simple client lambda tondu un peu plus chaque année. Une nouvelle version de l'arroseur arrosé en quelque sort...

à écrit le 15/06/2021 à 16:18
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12 000 actifs, 28 000 retraités. Pas etonnant que le systeme s ecroule : il y a 2 fois plus de retraites que d actifs ! Et je suppose que l age moyen des 12 000 actifs est elevé ce qui signifie que ca va encore empirer. Reste la question a savoir q...

à écrit le 14/06/2021 à 9:58
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Vous devriez organiser en septembre ou octobre une grande manifestation des AGA dans les principales villes de France, à laquelle participerait à coup sur, une majorité d'agents en exercice et de retraités. Il faudrait s'assurer que les médias de la ...

à écrit le 13/06/2021 à 15:52
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Ce coup de poignard dans le dos de leurs mandataires confirme s’il en est besoin leur désengagement progressif et leur desolidarisation des agents économiques pour engranger toujours plus de profits La Finance prends le dessus sur l assurance Exe...

à écrit le 11/06/2021 à 16:24
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Flouer leurs agents généraux, par nature exclusifs, à l'heure où la déshumanisation des relations commerciales montrent leurs évidentes limites, reviendrait à signifier aux clients eux-mêmes des compagnies, qu'elles sont incapables de tenir leurs eng...

à écrit le 10/06/2021 à 10:49
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Une question : comment le syndicat de la profession a t -il pu signer un accord sur le financement des retraites des agents généraux qui expire en 2021 ? Le co-financement de nos retraites devrait être statutaire et ne pas pouvoir être remis en cause...

à écrit le 10/06/2021 à 7:15
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Il faut ajouter mon cher président, que depuis le 1er janvier de cette année une retenue de 8'30% nous est imposée au titre de la C.S.G. sur la totalité de nos pensions !!!!!!! Mesure arbitraire appliquée par le gouvernement par decret du 4/12/2020, ...

à écrit le 09/06/2021 à 16:14
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Pour avoir donné 43 ans d'activité à ma compagnie d'Assurance le Groupe AXA, dont 28 ans en tant que cadre salarié, et cadre sup (5 ans de Direction de réseau), puis 15 ans en tant qu' AGA, Je me sens totalement trahi face à cet ABANDON des CIES, et...

à écrit le 09/06/2021 à 15:40
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Je touche actuellement en retraite moins de 20% de mes revenus d'activité, puisque la retraite est plafonnée. J'ai donc cotisé un maximum pour une retraite que j'ai accepté puisque c'était la règle. Je suis profondément choqué que l'on veuille chang...

à écrit le 09/06/2021 à 14:28
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Je trouve complètement anormal le comportement des compagnies ,mais leur façon d agir n est pas d aujourd’hui .Ils ne sont pas corrects,mais veulent une exclusivité .Il y aurait beaucoup de chose à dire .je m arrête la .

à écrit le 09/06/2021 à 14:14
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Ayant cotisé pendant près de 40 ans au plafond pour une retraite dont le montant est sans commune mesure avec mes revenus d'activité , je suis profondément choqué par la position des compagnies d'Assurances et suis prêt à me battre auprès de CAVAM...

le 09/06/2021 à 15:51
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Ceci est inacceptable, contraire à tout principe. Actifs et retraités : faisons bloc; mais les actifs peuvent peser plus que les retraités par des actions : Pourquoi pas une grève sine die des Affaires Nouvelles? Puisque la crainte évoquée est la spo...

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