En direct de la COP28 avec Bertrand Piccard : «Jour 1 : déjà une bonne chose de faite ? »

LES TOPS ET LES FLOPS DE LA COP. Bertrand Piccard, président de la Fondation Solar Impulse, psychiatre et explorateur, auteur du premier tour du monde en ballon (1999) puis en avion solaire (2015-2016), tient durant cette quinzaine en direct de la COP28 à Dubaï aux Emirats Arabes Unis, une chronique de ce nouveau rendez-vous crucial pour l'avenir de notre planète.
Bertrand Piccard et John Kerry, ambassadeur du président des États-Unis pour le climat.
Bertrand Piccard et John Kerry, ambassadeur du président des États-Unis pour le climat. (Crédits : DR)

L'an dernier, à Sharm-El Sheik, l'histoire des indemnisations fut brandie par les pays du Sud comme une condition préalable à l'acceptation de l'ordre du jour, mais elle n'accoucha que d'une souris. Cette fois, le Président Al Jaber l'a expédiée en un tour de main. Au milieu des points de procédure courante, dans la torpeur générale qui m'avait endormi moi aussi, aucune opposition ne se manifesta et le principe tant attendu de ce fond fut accepté, à la surprise générale.

À moins que ce ne soit grâce à une diplomatie préalable méticuleuse. L'audience, visiblement bluffée que ça passe si facilement, se leva pour offrir une standing-ovation.

Regardons plus loin

C'est la première grosse nouvelle tombée lors de cette COP28 de Dubaï : la création d'un « fonds pertes et dommages » géré par la Banque Mondiale, officialisant la contribution des pays développés vers le sud global pour aider à se confronter aux effets du changement climatique.

Souvent considéré comme secondaire, voire pire, ce que les anglophones appellent Loss and Damage Fund fut longtemps mentionné, discuté, mais jamais rien de concret ne vit le jour dans les COP précédentes. L'hébergement par la Banque Mondiale de ce fonds avait suscité de vifs débats - la question semble tranchée en confiant à l'institution la gestion du fonds pour une période intérimaire de 4 ans.

Enthousiasme général ici à Dubaï et dans les médias internationaux. C'est effectivement une bonne nouvelle, un acte nécessaire pour les pays du Sud, déjà impactés de plein fouet par la crise climatique alors même qu'ils n'y ont que si peu contribué. Il suffit de regarder les trajectoires démographiques pour comprendre que ce qui se décide aujourd'hui dans ces pays impactera fortement le monde de demain. Ainsi, il est impératif d'avoir le Sud à bord de l'action climatique. Et l'accord historique sur le Loss and Damage Fund, en ce premier jour de COP, est une étape clé dans cette direction.

Mais si c'est certainement une bonne chose de faite, est-ce véritablement une chose bien faite?

En discutant avec mon équipe, une de mes collaboratrices a commenté la nouvelle en déclarant « c'est mignon ». Cette réflexion, qui peut paraître surprenante, est liée à deux aspects. Tout d'abord la somme promise à l'heure d'écrire ces lignes, 460 millions de dollars, est une goutte d'eau, tant par rapport aux besoins (estimés à au moins 100 milliards par an) qu'au regard des 4.000 milliards de dollars de revenus nets engrangés par les compagnies pétrolières et gazières l'an dernier. Où qu'en comparaison, si l'on parle d'argent public, des 1.300 milliards de dollars qui, selon le FMI, servent a subventionné les énergies fossiles chaque année dans le monde.

Au-delà de la question du volume se pose aussi celle de la nature des annonces promises : ces fonds seraient-ils décaissés sous forme de dons ? De prêts concessionnels ? S'agit-il de financements additionnels ou de réallocations ? Quel calendrier associé pour les décaissements ?

Si l'on veut passer du symbole à l'impact, la clé est que ces fonds permettent d'enclencher une certaine dynamique dans le déploiement de solutions propres et rentables, au profit des populations vulnérables. Il n'y a pas de raison pour que l'accès à l'énergie propre des petits agriculteurs ne se traduise pas aussi en une meilleure productivité et au final à un progrès socio-économique. Il n'y a pas de raison de ne pas s'assurer que la mise en œuvre des fonds soit réalisée de manière transparente.

Nous devons absolument coupler ces « fonds pertes et dommages » à un plan concret de mise en place de solutions propres, et des énergies renouvelables notamment. Ne pas le faire, c'est comme annoncer un fonds dépourvu de vrais moyens: c'est « mignon » oui, mais ça ne fait pas avancer la situation face aux défis croissants auxquels font face ces pays.

Bertrand Piccard sera à la COP pour :

  • Présenter « Le Nouveau Narratif Climatique », une nouvelle manière, pour les décideurs politiques et économiques, de présenter l'action environnementale, avec l'objectif de convaincre les opposants et autres récalcitrants à la transition écologique et énergétique.
  • Rencontrer ces mêmes leaders politiques et économiques pour pousser le message selon lequel la transition n'est pas seulement bénéfique pour la planète, mais aussi pour l'économie des entreprises, la qualité de vie et les portefeuilles des citoyens.
  • Mettre en avant les solutions efficientes labellisées par la Fondation Solar Impulse à travers discours, rencontres et autres débats tenus sur place. Le déploiement de ces solutions pouvant être une contribution clé aux objectifs climatiques internationaux de renforcement de l'efficience.
  • Il s'exprimera lors du World Leaders Summit face aux chefs d'états de toute la planète lors des premiers jours de la COP28

La Fondation Solar Impulse sera présente :

  • Le 6 décembre, au pavillon UNFCC (Climate Action Zone), pavillon Benelux, pour une soirée en partenariat avec l'UNFCCC, autour du Nouveau Narratif Climatique.
  • Pendant 2 jours à l'espace expositions de l'organisateur UNFCCC, le 8 et le 9 décembre, où elle présentera ses activités aux visiteurs.
  • Pendant 2 semaines à travers la participation à des panels, débats, interviews média et autres évènements politiques et économiques.

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Commentaire 1
à écrit le 02/12/2023 à 10:23
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