Préparer les bâtiments à l'essor du véhicule électrique  : un enjeu crucial

OPINION. La croissance rapide du parc de véhicules électriques pose la question de l'adaptation des infrastructures urbaines que ce soit en terme d'espace, ou encore de distribution et de consommation d'électricité. (*) Par Emmanuel François, co-fondateur et Président de la Smart Buildings Alliance
En Suisse, à Berne, à titre expérimental, les lampadaires sont utilisés comme points de recharge pour les voitures électriques.
En Suisse, à Berne, à titre expérimental, les lampadaires sont utilisés comme points de recharge pour les voitures électriques. (Crédits : Reuters)

Les villes sont le reflet des civilisations. Aujourd'hui, il est temps de les repenser car elles ne sont plus adaptées à notre société actuelle et ne répondent plus à ses enjeux.

Rappelons-nous, en 1900 à New York, un seul véhicule automobile parade au milieu des calèches. En 1913, soit seulement 13 ans plus tard, il n'y a plus un seul cheval à l'horizon. La calèche a très rapidement disparu de l'espace urbain. Le constat est frappant, l'évolution de l'Homme transforme la ville de demain. Notamment concernant la mobilité et le transport.

Aujourd'hui, beaucoup s'interrogent sur le délai que va prendre le passage du véhicule thermique à la mobilité électrique. On estime le nombre de véhicules électriques et hybrides rechargeables en circulation dans le monde à 145 millions d'unités d'ici à 2030. Des perspectives encourageantes qui prouvent le plein essor du véhicule électrique.

Le bâtiment de demain sera connecté aux nouvelles technologies, et il est nécessaire de le faire évoluer au risque de voir disparaître la ville intelligente. Et puisque l'évolution est toujours plus rapide, il est essentiel de prendre les bonnes décisions dès maintenant afin d'opérer cette transition numérique.

Le constat sans appel d'une société en pleine mutation

Les enjeux liés à la transformation accélérée de nos modes de vie sont multiples. Les villes ont un rôle majeur à jouer pour relever les défis sociétaux, environnementaux, sanitaires et économiques auxquels nous faisons face aujourd'hui. Avec l'apogée des mobilités douces, le développement des Nouveaux Véhicules Électriques Individuels ou encore la croissance de l'autopartage, les usages de la mobilité évoluent. Il est désormais indispensable que les bâtiments soient prêts, qu'ils disposent d'infrastructures de recharge adaptées et soient à même de gérer à tout instant la recharge des véhicules en harmonie avec leurs besoins énergétiques globaux. En effet, en passant du thermique à l'électrique, la mobilité devient grandement dépendante des bâtiments au point d'en être un équipement connecté au même titre que d'autres. Alors que la voiture thermique a progressivement occupé 50 % de l'espace urbain, la mobilité électrique sera beaucoup plus liée aux bâtiments. Nous devrions d'autre part assister à une baisse très sensible du nombre de véhicules du fait de l'autopartage et de nouveaux usages autour de la mobilité du fait du numérique. Passer d'un taux d'utilisation des véhicules de 5% de leur temps à 50 % n'est plus une chimère et est fortement souhaitable.

Les ventes de véhicules électriques ont marqué une inflexion forte en 2020. En France, le parc approche les 1 million de véhicules, avec une tendance à au minimum 5 millions en 2030. Cette massification rapide du marché exige une massification rapide de l'infrastructure de recharge.

L'enjeu des infrastructures de recharge dans les bâtiments

La majeure partie du temps, un véhicule électrique est stationné au domicile ou au travail, lieux de recharge plébiscités. Il faut donc consacrer un effort important à développer des infrastructures publiques de recharge, essentiel pour donner confiance aux utilisateurs de pouvoir se charger partout.

C'est donc dans les parkings des bâtiments que doit être déployée la plus grande partie des points de recharge. La capacité des bâtiments, résidentiels ou tertiaires, à mettre à disposition une infrastructure de recharge performante, pour toute l'électro-mobilité, est un enjeu crucial.

Jusqu'à présent, le besoin dans le bâtiment était d'installer quelques points de recharge isolés. Désormais, il est de disposer d'une infrastructure adaptée en quantité et en services, qui ne correspond pas seulement à des prises de recharge, mais bien une infrastructure raccordée à celle de services du bâtiment. Pour répondre à ce besoin de recharge, le bâtiment doit donc disposer d'une infrastructure partagée, qui fournisse la possibilité de raccorder les multiples points de recharge, la puissance nécessaire, le pilotage de la puissance et l'intégration du réseau fédérateur du bâtiment. Ce déploiement devra être progressif pour anticiper le besoin tout en assurant la capacité de croissance, en optimisant les coûts et en restant ouvert aux évolutions technologiques.

Le temps est compté

Le temps est compté, car, comme le montrent les chiffres, la tendance en faveur de l'électrique ne peut que s'accélérer, or à 2 millions de véhicules électriques, parc qui devrait être atteint d'ici 3 ans et représentant une puissance équivalente à 15% de la production électrique française, le réseau ne sera plus à même d'encaisser des pics de consommation sans solutions numérique d'arbitrage énergétique à l'échelle des bâtiments et des quartiers.

A l'heure de la transition numérique, il n'est plus concevable de n'avoir encore qu'une approche très verticale des différentes problématiques. Multiplier les infrastructures et systèmes de pilotage par autant de thématiques concernées telles que la recharge des véhicules, l'efficacité énergétique, le comptage, la maintenance des ascenseurs, la sécurité, l'optimisation des espaces ou encore l'assistance aux personnes... est juste irrationnel et non durable avec très souvent des problématiques de ROI (retour sur investissement) qui contraint les donneurs d'ordre à lier l'investissement à un contrat de services long terme assorti parfois de subventions et qui obère toute possibilité d'avoir une approche globale à l'échelle du bâtiment et du quartier, prérequis incontournable pour évoluer vers la Smart City.

Cela ne pourra se faire qu'avec une prise de conscience des institutions pour accompagner les acteurs du secteur dans la mise en place de ce cadre et lever les freins qui subsistent.

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Commentaires 6
à écrit le 10/09/2021 à 10:40
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C'est ainsi que nous restons dans l'erreur d'une civilisation qui tourne autour de l'automobile et qui nous a mené là où nous sommes! Il serait plus raisonnable d'éviter tous déplacements inutiles, rapprocher la production de la consommation, éviter ...

à écrit le 10/09/2021 à 9:22
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Encore une erreur d'agencement qui tourne autour de l'automobile! C'est a cause d'elle que nous en sommes là! Et l'on s'enfonce...!

à écrit le 10/09/2021 à 9:13
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Bonjour, certes ces réflexions paraissent du bon sens pourtant malheureusement c'est une vision très réduite ! En effet c'est comme si vous regardiez seulement le sommet de l'iceberg sans voir ce qu'il cache dessous ! Deux Questions importantes avant...

à écrit le 09/09/2021 à 12:18
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Dans mon quartier de Seoul, toutes les lignes HT 80KV ont ete demontees au profit de lignes BT, pour precisement anticiper les equipements des particuliers equipes en solaire. Que du benef.

à écrit le 09/09/2021 à 11:39
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Quand il faut des prises différentes (et le système qui va derrière) entre une Peugeot et une Tesla, faut-il avoir les deux dans le parking ? Voire plus, y a pas que deux types de prises brevetées (continu, alternatif, haute ou basse tension, etc). ...

le 09/09/2021 à 13:42
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Et quand sera t'il de la facture d'électricité qui augmente de 10 a 20% tout les ans? Combien va couter de garder en charge ces voitures, combien coutera et tout les combien le remplacement des batterie et pire encore le ou les moteurs électriques?

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