Les acteurs immobiliers du Grand Paris se mettent enfin au vert

Lors du Mipim, les décideurs publics et les opérateurs privés ont présenté des solutions pour essayer de « verdir » le chantier du Grand Paris.
César Armand
Valérie Pécresse, président du conseil régional d'Île-de-France, a confirmé le plan Vert visant à créer davantage d'espaces verts dans la région.
Valérie Pécresse, président du conseil régional d'Île-de-France, a confirmé le plan Vert visant à créer davantage d'espaces verts dans la région. (Crédits : iStock)

« Il n'y a pas de plan B car il n'y a pas de planète B. » C'est lors de la Semaine du climat en septembre 2014 que l'ex-secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a prononcé cette phrase. Presque cinq ans plus tard, le Sud-Coréen était l'invité d'honneur du Mipim 2019, expliquant aux élus et aux professionnels de l'immobilier que « les villes durables et résilientes sont la clé pour transformer le monde pour le meilleur ». Les métropoles seraient-elles en retard ?

La veille de ce grand raout était posée la « première pierre » du premier site du premier concours "Inventons la métropole du Grand Paris". À la frontière de Pierrefitte et de Stains (Seine-Saint-Denis), la foncière Atland construit 25.000 m² en ossature bois, dont 5.000 d'espaces verts, notamment pour Engie Lab Crigen. Outre les bureaux, le centre de R&D du groupe abritera des laboratoires et des halls d'essais pour les énergies renouvelables et l'hydrogène. Comme à son habitude, le président (LR) de la métropole Patrick Ollier s'est félicité que « la transition énergétique soit le fondement même du cahier des charges » de cet appel à projets.

« Inventons la métropole, c'est très positif, mais cela ne vaut pas instrument de planification », constate en revanche Nicolas Buchoud, président du Cercle Grand Paris de l'Investissement durable. « Cela reste des projets et rien ne dit qu'il y ait des effets d'entraînement vertueux. » Spécialisée dans le bois, l'architecte Alice Mucchielli remarque, elle aussi, « une vraie volonté politique sur la transition écologique », mais regrette que « le résultat ne [soit] pas toujours au rendez-vous ».

« De nos échanges avec la filière, nous remarquons que cette volonté fait face à deux problématiques majeures : un manque de savoir et un manque de volonté des décisionnaires », pointe la cadre de Graam Architecture.

Construire en bois suppose effectivement une rigueur constructive indispensable à la maîtrise des dépenses. Spécialisé dans les constructions en bois massif lamellé croisé (CLT) Woodeum Résidentiel, également lauréat du premier concours "Inventons la métropole" avec un projet de résidences porte de Vanves, reste prudent avant de déclencher les opérations.

« L'étude d'impact sera terminée dans le courant du mois de mai, de telle sorte que le permis de construire de l'opération puisse être déposé dès cet été, afin que nous soyons en mesure de lancer les travaux au début de l'année prochaine », avance son président Julien Pemezec.

Quid d'Arboretum, un projet de 126.000 m² de bureaux à La Défense ? « Les démolitions sont terminées, on engage les travaux d'aménagement », déclare Philippe Zivkovic, le président de WO2, la filiale de Woodeum consacrée à l'immobilier d'entreprise.

Le plan Vert enclenché en Île-de-France

À Cannes, l'aire urbaine la plus riche de France et d'Europe avait monté sa propre tente, qui abritait à la fois la région, la MGP, la capitale, les départements et les aménageurs, réunis autour du thème de cette édition « l'immobilier durable et responsable ». Dès le premier jour du Mipim, Valérie Pécresse, la présidente (LR) du conseil régional, y a confirmé le plan Vert visant à produire davantage d'espaces verts en Île-de-France.

« À terme, tous les Franciliens pourront accéder à un espace vert de proximité à moins de 15 minutes à pied de chez eux », a-t-elle promis.

« Nous devons promouvoir ces actions et agir sur le cadre législatif et réglementaire pour créer un cadre favorable à la transition écologique », lui a répondu le préfet Julien Charles, secrétaire général de la préfecture régionale.

Sans attendre une énième refonte des procédures, Thierry Lajoie, le directeur général de Grand Paris Aménagement, mise sur la méthode partenariale. « On n'attend plus de nous qu'on vende notre sol, mais qu'on apporte des services qui accroissent l'efficacité et la qualité de vie », estime-t-il.

AeroliansParis, 198 hectares entre Le Bourget et Paris-Roissy Charles-de-Gaulle, accueillera ainsi des stations de services multi-énergies et un service de veille sur la qualité de l'air et la biodiversité. L'aménageur de Paris Saclay, Philippe Van de Maele, travaille, lui, sur une production localisée d'énergies renouvelables : un réseau d'échange d'eau et de froid, de la géothermie complétée par de l'énergie fatale, 30% des toitures réservés aux panneaux photovoltaïques, l'utilisation de la biomasse issue des terres agricoles à proximité...

Le salon a par ailleurs été l'occasion de lancer des consultations pour la vente des charges foncières du Village olympique. Nicolas Ferrand, président de la société de livraison des ouvrages olympiques, vise en effet le zéro carbone. En l'absence d'Anne Hidalgo, son adjoint Jean-Louis Missika y a réitéré son opposition au béton, « ce que le diesel est à l'automobile ». Dans la salle, les professionnels rient jaune. La directrice générale de la foncière Gecina, Méka Brunel, présidente du conseil de développement de la métropole du Grand Paris, résume leur sentiment :

« Au début, quand on nous demande davantage d'économie circulaire dans nos constructions, nous râlons un peu ; puis nous réalisons que nous pouvons faire des choses exceptionnelles. En tant que professionnelle de l'immobilier, je me dois de donner une qualité de vie dans cette ville-monde. »

Même les banquiers s'y mettent, créant de jeunes pousses au service de la ville intelligente. Le responsable de la direction immobilière et « sponsor du Grand Paris » de la Société Générale Éric Groven avait amarré un yacht dans la marina pour présenter la startup « La Ville E+ » pour co-construire la Smart City de demain.

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La gare impossible de Paris La Défense

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Grand Paris Express

[Le Grand Paris Express est nécessaire pour attirer toujours plus d'investisseurs dans le quartier d'affaire. Crédits : Agence Wilmotte]

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200 mois ! Ce chiffre gigantesque, apparu début mars dans Le Canard enchaîné correspondrait au temps de construction de la gare de La Défense du Grand Paris Express (GPE). « Je suis inquiet », s'émeut Éric Cesari, maire-adjoint (LR) de Courbevoie et vice-président de la métropole du Grand Paris (MGP) chargé de l'immobilier d'entreprise. « Nous n'avons pas beaucoup d'informations directes. C'est un calendrier totalement insupportable. Cela bloque la boucle. »

Comme l'ensemble des parties prenantes de la région Île-de-France, cet élu local mise sur le GPE pour attirer toujours plus d'investisseurs dans le quartier d'affaires.

« Comment imaginer qu'il fonctionne sans cette gare ? s'interroge-t-il. Or, c'est un moyen de créer du développement économique, de nous mettre au niveau des capitales mondiales. On court le 100 mètres avec un boulet au pied si les annonces pour l'attractivité ne sont pas suivies d'effets ! »

Le président de la Société du Grand Paris (SGP) Thierry Dallard, qui construit le super-métro, assure que l'établissement public d'État avait « alerté fin 2017 début 2018 ses instances de gouvernance sur le fait que cette gare était particulièrement complexe sur le plan technique et nécessitait des investigations complémentaires ». Il promet de présenter « une piste concrète » d'ici à l'automne pour tenir la date de 2030, échéance de livraison de la ligne 15 Ouest.

« Je pense qu'on va y arriver, insiste-t-il. Plusieurs solutions sont examinées. Il sera important de privilégier un emplacement à même de préserver l'interconnexion avec le RER A ».

Le co-directeur de l'aménagement de Paris La Défense, Olivier Schoentjes, confirme travailler avec ses équipes à « une solution alternative, qui permettrait de modifier l'implantation » de la gare. Un « dialogue étroit » a été noué, assure-t-il encore. En attendant, la SGP, qui a émis le 12 mars un deuxième green bond d'une valeur de 2 milliards d'euros, présentera d'ici à fin avril un « planning détaillé » sur les appels d'offres de génie civil afin de « donner plus de visibilité à tous les acteurs des territoires ». Un planning que les responsables politiques comme les chefs d'entreprise du BTP attendent avec la plus grande impatience.

César Armand

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