Coupe du monde de rugby : Galthié par ceux qui l’inspirent

Sur la route de la Coupe du monde, le sélectionneur s’est rapproché de « grands témoins ». Ils dressent son portrait.
Le 14 septembre au stade Pierre-Mauroy de Villeneuve d’Ascq (Nord).
Le 14 septembre au stade Pierre-Mauroy de Villeneuve d’Ascq (Nord). (Crédits : latribune.fr)

Pour un être compliqué à accoucher, Fabien Galthié peut vite s'épancher avec un inconnu. L'astronaute Jean-François Clervoy l'a expérimenté lorsqu'il a été convié au Centre national du rugby de Marcoussis en novembre 2022.

« Sans que je lui pose de question, il m'a parlé de son parcours, de ses échecs, de son sens, de l'engagement très fort qui fait qu'il ne savait pas forcément respecter les règles, relate l'ingénieur aux trois vols spatiaux. Sans tabou ni esbroufe, il m'expliquait qui il était. Très à l'aise, comme si on se connaissait depuis longtemps. »

Clervoy fait partie de la vingtaine de « grands témoins » ayant partagé le quotidien des Bleus depuis la prise de fonction de Galthié, il y a quatre ans. Des personnalités « inspirantes » venues échanger sur leur parcours d'artiste, d'entrepreneur, d'intellectuel, de militaire, de sportif, de cabossé de la vie... De notre chroniqueur Guy Savoy à Philippe Lucas en passant par Jean Dujardin ou Francis Cabrel. Des moments pour s'élever et respirer. « Fabien a toujours été curieux du monde », souligne Max Guazzini, qui l'a fait piger pour NRJ, l'a recruté comme demi de mêlée au Stade français (2001) avant de lancer la carrière d'entraîneur de cet ingénieur du rugby (2004).

« Il est très pointu sur son sport, mais très ouvert sur tout, abonde Laurent Tillie. Il a envie d'être une éponge, de prendre toutes les expériences pour créer sa propre formule. »

L'entraîneur des volleyeurs champions olympiques en 2021 s'était immergé quelques jours lors de la tournée estivale 2022 au Japon. Il avait été épaté par sa « maîtrise » :

« Faire venir des gens de l'extérieur, ce n'est pas nouveau, mais qu'il y ait une écoute et une adhésion totale comme c'était le cas, c'est révélateur d'une mainmise sur le groupe. »

Geeks et cotte de mailles

Avant le carton historique en Angleterre lors du dernier Tournoi des Six Nations, le handballeur multimédaillé Nikola Karabatic avait humé « la sérénité » que dégageait Galthié, son discours « assez travaillé » :

« Fabien prenait le temps avant de parler, faisait des pauses. Le staff encourage chacun à être soi-même, à l'aise et à fond en même temps. Il essaie d'apporter beaucoup de confiance. »

« Lui-même a toujours eu cette assurance », juge Max Guazzini, exemple à l'appui : à table, lors du stage au sein de la Légion étrangère début 2022, le sélectionneur avait asséné au général Lardet que son équipe allait « tout gagner ». Le Grand Chelem et une année parfaite avaient suivi.

C'est sur ce thème, la confiance, que le philosophe Charles Pépin a échangé avec les Bleus il y a un an et demi. Lui inverse la proposition : c'est parce que Galthié, 54 ans, est si habité et investi dans son rôle que sa foi infuse.

« Je l'ai aussi reçu dans mon émission sur France Inter cet été, dit-il. J'ai lu un texte autour de la question "Qu'est-ce qu'une belle équipe ?", et j'ai vu dans ses yeux qu'il pensait à la manière dont il pourrait l'utiliser. De fait, il l'a pris et l'a lu aux joueurs avant la Coupe du monde. Il est dans sa mission, il ne pense qu'à ça. Même quand il passe à la radio. »

Le navigateur Thomas Coville l'a connu avant, « dans le creux de la vague », comme lui. L'honnêteté de ce « mec complexe » l'a touché. Il a été l'un des premiers grands témoins de son rendez-vous avec la génération Dupont. De la construction d'une armée avec France 2023 à l'horizon - Galthié a depuis prolongé jusqu'en 2027.

« Il y a l'aspect physique, l'art de bousculer, mais aussi le travail sur la fragilité de chacun, indique le skippeur. Chaque joueur craint d'être le maillon faible, donc il les fait se révéler par une fragilité. Il fait ainsi de son groupe une cotte de mailles, il n'y a rien de plus indestructible. »

Comme s'il déroulait un plan

Son organisation avec des coachs spécialisés a rappelé à Nikola Karabatic « ce qui se fait dans le football américain ». Charles Pépin a, lui, été marqué par l'explosivité à l'entraînement, où tout est fait « 30 % plus vite » qu'en match. Par le « mélange d'humain et de datas », aussi. Pour Jean-François Clervoy, Galthié a « élevé le jeu à un niveau scientifique très pointu ».

« Pas parce qu'il a la science en lui, mais en s'entourant d'experts, de geeks, précise l'astronaute. Il ne sait pas ce qu'il va trouver, mais il est certain qu'il y a un truc à trouver. »

Comme s'il déroulait un plan tout en laissant une place pour l'imprévu.

Ce n'est sans doute pas un hasard si, en cette année de Coupe du monde en France, le surfeur Jérémy Florès, Nikola Karabatic, Didier Deschamps, Yannick Noah et Fabien Barthez, tous sacrés à la maison, se sont succédé dans le rôle de grand témoin. La qualification pour les quarts de finale officiellement en poche depuis vendredi et la belle victoire contre l'Italie (60-7), Fabien Galthié et ses Bleus peuvent encore rêver de les imiter.

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