Football : Luis Enrique n’est pas facile à aimer

Impopulaire en Espagne, l’entraîneur compte sur le PSG pour redorer son blason. La réussite passe par la Ligue des champions, dès mercredi au Parc des Princes contre la Real Sociedad.
L’entraîneur du PSG lors de la rencontre de Ligue des champions à Dortmund (Allemagne), le 13 décembre.
L’entraîneur du PSG lors de la rencontre de Ligue des champions à Dortmund (Allemagne), le 13 décembre. (Crédits : PRESSE SPORTS)

Il est très divertissant de parcourir un top 10 des déclarations les plus pimentées de Luis Enrique. On en trouve beaucoup car le technicien asturien, 53 ans, parle sans filtre depuis toujours. « Je me fiche de ce qu'on dit sur moi, je ne peux rien contrôler donc je profite à ma façon », a-t-il expliqué. Le public français découvre sa communication parfois abrasive depuis qu'il a succédé à Christophe Galtier sur le banc du Paris Saint-Germain cet été. Omar da Fonseca, spécialiste du football espagnol pour beIN Sports, prend en exemple ses conférences de presse. « Il y a deux attitudes possibles : la séduction ou l'indifférence. J'ai l'impression qu'il n'en a rien à faire. Est-ce naturel ou se force-t-il à montrer ce visage-là ? »

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Il y a un an, dans un rare élan de sincérité, l'entraîneur avait donné un indice au micro de SER Gijón, une radio de sa ville natale : « Je suis très passionné au travail et, quand j'ai fini, je me coupe du brouhaha ambiant et je fais ce qui me plaît. » Il a participé à un Ironman et au marathon des Sables, six jours d'effort dans les dunes du Sahara. Débattre de football ne l'intéresse pas, surtout s'il a l'impression d'avoir à se justifier devant des journalistes qui, d'après lui, n'ont pas les éléments nécessaires.

Les idées émises par l'extérieur ne l'influencent jamais

Le psychologue Joaquín Valdés

Le psychologue Joaquín Valdés collabore avec lui depuis ses débuts d'entraî-
neur, en 2008, avec la réserve du FC Barcelone. « Sa caractéristique principale, c'est que les idées émises par l'extérieur ne l'influencent jamais », a constaté ce soutien essentiel de Luis Enrique lors du deuil de sa fille de 9 ans.

Péremptoire, l'entraîneur sait « quoi faire » et « comment le faire ». Tant pis s'il avance à contre-courant. La plupart des sélectionneurs rechignent à convoquer des joueurs peu utilisés en club ? Lui n'y accordait « pas une importance démesurée » pendant son mandat à la tête de la Roja (2018-2022). Avant l'Euro 2021, il retient 24 joueurs sur 26 autorisés. Tollé de l'autre côté des Pyrénées, où le puissant éditorialiste Tomás Roncero parle d'un « veto du peuple » devant le nombre de réactions courroucées. Pire, le sélectionneur écarte Sergio Ramos, totem national, et ne retient aucun joueur du Real Madrid. « Je ne suis anti rien », se défend l'accusé. L'épisode rappelle un bon mot de l'ancien président du Barça Joan Gaspart - « ma mère et celle de Luis Enrique étaient les plus populaires au stade Bernabéu » - à propos du transfert de l'attaquant du Real vers l'ennemi blaugrana en 1996, jamais pardonné. Sourd aux critiques, Luis Enrique hisse l'Espagne dans le dernier carré.

Épanoui dans l'affrontement, il suscite à nouveau l'hostilité de la presse, qu'il surnomme « la vermine et les vautours », en court-circuitant la communication pendant la Coupe du monde 2022. Le soir, gros écouteurs sur les oreilles, il répond en direct aux questions posées sur la plateforme Twitch - des échanges parfois désopilants. Après un début en fanfare, la sélection espagnole s'effondre, victime de ses adversaires et de son propre dogmatisme - le tiki-taka façon handball, le recours à un faux numéro 9. Ce qui a marché avec brio à Barcelone (2014-2017) grâce au génie d'Iniesta, de Xavi et de la MSN, reste une exception. L'élimination par le Maroc en 8e de finale lui est fatale. Au retour du Qatar, seulement 13 % de ses compatriotes jugeront qu'il a fait du bon travail, d'après un sondage publié par Marca. Soutenir publiquement l'ancien président de la Fédération, Luis Rubiales, mis au ban après son baiser forcé à la championne du monde Jennifer Hermoso, n'a rien arrangé.

Rêve d'Angleterre

Un rare réconfort est venu de ses joueurs, pour qui Luis Enrique a « créé une famille à partir d'une idée », d'après l'ancien attaquant parisien Pablo Sarabia. Le polyvalent Carlos Soler l'a remercié pour « sa confiance et sa proximité » et l'a retrouvé avec plaisir au PSG. Ce club que Luis Enrique avait martyrisé en 2017, le soir de la remontada, l'a convaincu de tenter une deuxième expérience à l'étranger, après l'AS Rome (2013-2014).

Lui rêvait surtout de Premier League, il s'était même mis à lire les journaux anglais. S'il y travaille un jour, il marchera dans les pas d'Unai Emery, Thomas Tuchel et Mauricio Pochettino, qui ont tous rebondi outre-Manche après leur séjour parisien. Il a un brillant palmarès à faire valoir - une Ligue des champions (2015), dix titres au total - mais plusieurs compatriotes ont désormais une cote plus élevée : Mikel Arteta (Arsenal), Andoni Iraola (Bournemouth) et Xabi Alonso (Bayer Leverkusen), annoncé comme le successeur de Jürgen Klopp à Liverpool. De même en Espagne, où les amateurs n'ont d'yeux que pour le Gérone de Míchel et la Real Sociedad d'Imanol Alguacil, qui lui rend visite au Parc des Princes mercredi en 8e de finale aller de la Ligue des champions.

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Commentaire 1
à écrit le 11/02/2024 à 8:27
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Face à l'hypocrisie des questions posées par les journalistes c'est la meilleure posture.

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