Rachat d'Activision Blizzard : comment Microsoft a convaincu Bruxelles

Bloqué le mois dernier par le régulateur britannique, le rachat d'Activision Blizzard par Microsoft a été validé par la Commission européenne. Le géant du jeu vidéo obtient ainsi un appui de poids pour valider la plus grande transaction de son histoire (68,7 milliards de dollars), alors qu'il attend encore d'autres avis, dont celui essentiel du régulateur américain.
Enfin une victoire pour Microsoft dans sa tentative de rachat d'Activision Blizzard.
Enfin une victoire pour Microsoft dans sa tentative de rachat d'Activision Blizzard. (Crédits : DADO RUVIC)

C'est une bouffée d'air pour Microsoft, dans le viseur des régulateurs de la concurrence pour son offre de rachat de l'éditeur Activision Blizzard à hauteur de 68,7 milliards de dollars, signée début 2022. La Commission européenne a validé ce lundi l'opération financière (la plus grande de l'histoire de la tech), estimant que les garanties présentées par l'entreprise étaient suffisantes pour maintenir une concurrence juste.

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Cette décision s'oppose à celle émise le mois dernier par le régulateur britannique, la Competition and Markets Authority (CMA), qui a bloqué le rachat sous couvert de pratiques anticoncurrentielles sur le marché du cloud gaming. Microsoft, qui a immédiatement fait appel de la décision britannique, attend également les résultats d'autres enquêtes dont celles des régulateurs chinois, sud-coréen, ou encore américain. L'acquisition du catalogue prestigieux d'Activision Blizzard (World of Warcraft, Call of Duty, Diablo, Candy Crush...) ferait de lui le numéro 3 du marché du jeu vidéo derrière Sony et Tencent.

Garanties suffisantes pour l'Union européenne

Pour la Commission européenne, Microsoft ne serait « pas en capacité de causer du tort à ses concurrents », tant sur le marché des consoles, que sur celui des abonnements multijeux en ligne. Par exemple, elle estime que l'entreprise n'a aucun intérêt à arrêter de distribuer Call of Duty à son concurrent Sony, constructeur de la Playstation. Et pour cause : il y a quatre Playstation 5 pour chaque Xbox One [la console de Microsoft, ndlr] sur le marché européen. D'ailleurs, la commission précise que quand bien même Microsoft jouerait la carte de l'exclusivité, ce serait « insuffisant pour affecter le marché des consoles de jeu. »

Sa principale inquiétude portait donc sur le marché du cloud gaming, le jeu vidéo accessible par le biais d'une plateforme sans avoir besoin de télécharger de contenu. Microsoft en est le large leader -entre 60 et 70% de part de marché- avec son offre Xbox Game Pass qui a convaincu plus de 25 millions d'abonnées. Une potentielle exclusivité sur les titres très populaires d'Activision Blizzard renforcerait sa position.

Pour montrer patte blanche, l'entreprise a donc passé les derniers mois à signer des partenariats de cloud gaming avec plusieurs grands acteurs du marché dont Nintendo, Nvidia ou encore Ubitus. Ces derniers ont obtenu une licence gratuite leur garantissant l'accès au catalogue de jeux de Microsoft (et donc à ceux d'Activision Blizzard en cas de validation du rachat) sur leur propre plateforme de cloud gaming pour les dix prochaines années. Concrètement, Microsoft renonce de fait à l'exclusivité des titres sur le Xbox Game Pass. « Cet engagement répond entièrement aux inquiétudes relatives à concurrence identifiées par la Commission et représente une amélioration significative pour le cloud gaming comparé à la situation actuelle », écrit le régulateur.

Le cloud gaming, une goutte d'eau dans la transaction

Si Microsoft n'a pas hésité à céder aux exigences des régulateurs, c'est aussi parce que le marché du cloud gaming reste très faible par rapport au marché global du jeu vidéo. Certes, selon le cabinet Newzoo, il pourrait atteindre 8,17 milliards de dollars en 2025, soit un montant plus que triplé par rapport à 2022 (2,38 milliards de dollars). Mais il reste encore embryonnaire dans un marché mondial du jeu vidéo estimé à plus de 300 milliards de dollars par le cabinet de conseil Accenture. « La décision de blocage des régulateurs pourrait affecter légèrement la volonté de Microsoft d'investir dans son service mais l'acquisition n'était pas une condition préalable à la présence des jeux d'Activision sur son Game Pass », estimait le mois dernier Tom Wijman, analyste chez Newzoo, après le blocage de la transaction par la CMA.

Microsoft est actuellement le numéro 4 mondial du marché du jeu vidéo, et Activision le numéro 6. Le géant californien a bâti son empire dans l'industrie du jeu vidéo grâce sa Xbox, l'une des trois consoles de salon du marché avec la PlayStation de Sony et la Switch de Nintendo. Ce n'est qu'après qu'il a développé le Game Pass, une offre d'abonnement (à une dizaine d'euros) qui permet de jouer à une centaine de jeux depuis la Xbox ou un PC, à la seule condition d'avoir une bonne connexion internet. L'acquisition d'un éditeur comme Activision Blizzard relève donc d'une croissance verticale et non horizontale. Autrement dit, Microsoft n'achète pas un de ses concurrents.

Validé par l'Union européenne, le futur de la transaction est désormais (entre autres) dans les mains de la Federal Trade Commission, le régulateur américain, qui a lancé son enquête anticoncurrentielle fin 2022.

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Commentaire 1
à écrit le 16/05/2023 à 7:29
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Décision très étonnante quand on connait le passif de Microsoft dans l'abus de position dominante; l'art de "bundle" un produit avec un autre plus répandu est dans son ADN : Internet Explorer ou Windows Media Player avec Windows, plus récemment Teams...

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