Les nouvelles mobilités aériennes décollent

Taxis volants, livraison par drones… loin de la science-fiction, ces nouveaux modes de transport de passagers ou de colis sont désormais expérimentés en France. Leurs promesses et leurs risques ont été décortiqués lors d’une table ronde qui s’est déroulée le 8 février à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris, dans le cadre du premier Forum de l’AIT (Agence de l’innovation pour les transports).
(Crédits : Gautier Salles/Unsplash)

Cap sur 2024. « Notre objectif est d'être les premiers au monde à pouvoir déployer un réseau des Vtol à Paris pour les Jeux olympiques de 2024. C'est une première mondiale », lance Solène Le Bris, cheffe de projet mobilités aériennes avancées au sein du groupe ADP. Les véhicules Vtol - acronyme anglais de Vertical Take-off and Landing (décollage et atterrissage verticaux), 100 % électriques, autrement dit, des « taxis volants » - qu'entend faire décoller le groupe aéroportuaire, en partenariat avec la RATP, sont produits par Volocopter, seul constructeur « qui pourrait être certifié à cette échéance courte », précise-t-elle. Et ils s'intégreront dans un réseau de trois lignes et cinq vertiports, ces zones de décollage et d'atterrissage des Vtol - dont quatre sur les aéroports de Charles-de-Gaulle et du Bourget, ainsi que sur l'héliport de Paris et l'aérodrome de Saint-Cyr, et un vertiport urbain, quai d'Austerlitz.

Pour cette nouvelle forme de mobilité aérienne, ADP envisage également le transport d'urgence. « Nous travaillons avec l'AP-HP pour identifier les meilleurs cas d'usage à développer et ce, dès 2024. Cette nouvelle mobilité pourrait nous permettre de gagner en temps d'intervention », avance Solène Le Bris.

De fait, le moment est propice. « Il faut imaginer les taxis volants ou la mobilité aérienne comme une convergence d'un besoin sociétal de transport efficace et de progrès  technologiques, dans ce cas de la propulsion électrique et de l'automatisation », estime Joerg Peter Mueller, directeur du service mobilité aérienne urbaine chez Airbus. « Nous avons imaginé un service de mobilité future pour développer une nouvelle filière en ville mais aussi pour faire avancer la technologie à faible émission de CO₂, poursuit-il. En outre, économiquement, cela fait sens aussi parce que nous allons offrir un service abordable et accessible à un plus grand nombre de personnes. »

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Après les deux premiers démonstrateurs, le constructeur en est à la troisième génération de ces véhicules. « Il va voler l'année prochaine. Ce sera un prototype, il ne sera pas produit en série, mais nous allons avancer vite sur la deuxième partie de la décennie », indique ce responsable.

Rallier des lieux isolés

Autre forme d'engins volants, les drones, expérimentés par le Groupe La Poste, en partenariat avec la start-up Atechsys, pour la livraison de colis en lieux isolés. Deux lignes ont été ouvertes : en 2016, dans le Var, pour des colis à une pépinière d'entreprises située sur un terrain isolé, et en 2019, à côté de Grenoble, pour desservir un petit village de montagne. « L'idée est de décharger nos livreurs de la partie la moins rentable et parfois la plus dangereuse de leurs livraisons, indique Philippe Cassan, directeur de programme drones au sein du Groupe La Poste. Lorsqu'ils font en camion leurs tournées au fond des vallées, ils sont souvent obligés de faire un aller-retour de 40 min pour livrer un ou deux colis dans un village, alors qu'un drone le fait en quelques minutes. » L'objectif de ces initiatives ? « Nous avions besoin de toucher du doigt la faisabilité et l'utilisation de ces nouveaux systèmes et de voir comment ils pourraient s'insérer dans nos processus métiers sur le terrain », dit-il. D'autres lignes pilotes pourraient être expérimentées, pour observer « les difficultés et l'intérêt », dit-il, et, un jour, à un horizon plus lointain, ouvrir la voie à des cas d'usage en ville.

Pour ce faire, encore faudrait-il relever quelques défis. Les autorisations à obtenir, d'abord, compte tenu du niveau de sécurité à respecter, mais également la fiabilité et les coûts...

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Le défi de l'acceptabilité

Qu'il s'agisse de drones ou de Vtol, reste aussi à rassurer la société civile. « On parle de milliards de mouvements de drones dans le futur et d'un nombre considérable d'objets volants dans le ciel », s'inquiète ainsi Dominique Lazarski, présidente de UECNA, une ONG européenne qui regroupe les riverains d'aéroports. Accidents potentiels, vie privée... les craintes sont fortes. « Avec l'intensification des mouvements, il y aura probablement un rejet des populations au bout d'un moment », avance-t-elle. « L'idée est de certifier les appareils au même niveau de sécurité que les hélicoptères actuels. Il y a une volonté d'avoir un niveau très élevé, rétorque Thierry Allain, directeur de programme innovation à la Direction générale de l'aviation civile (DGAC). De même, pour les vertiports, il y a des normes à respecter et il faudra regarder les routes, les sites de pose d'urgence, l'intégration dans les systèmes de navigation aérienne... ». Reste qu'au-delà d'un niveau de certification élevé et de la question de la soutenabilité économique, « l'acceptation sociale est un enjeu fondamental pour ces nouveaux moyens (de mobilité) », admet-il.

Pour sa part, Solène Le Bris se montre optimiste sur les Vtol. « Nous avons fait des enquêtes auprès des Franciliens et 74 % des personnes interrogées avaient une attitude positive sur cette nouvelle mobilité aérienne », dit-elle. En outre, « nous avons réalisé une campagne acoustique en mars sur notre site expérimental de Pontoise, reproduisant un décollage, un atterrissage et un survol à 25 et 50 m. Et 86 % des personnes présentes étaient agréablement surprises du faible niveau sonore des Vtol », assure-t-elle. Dans tous les cas, 2024 sera l'occasion de tester ces nouveaux engins au plus près des citoyens.

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Commentaires 3
à écrit le 20/03/2023 à 16:05
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OK mais pas au dessus de mon jardin..

à écrit le 19/03/2023 à 9:15
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Coût énergétique d'un trajet en vtol par rapport a un déplacement au sol? Est ce bien raisonnable? S'il faut que de l'énergie "propre" il y en aura pas assez pour tous les usages aux sol, alors ça en plus... On est bien loin de la modération frugalit...

à écrit le 15/03/2023 à 9:52
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1 drone de temps en.temps pour une mission exceptionnelle, urgente et utile, pourquoi pas, mais un ciel sature de drones venant s'ajouter aux autres aéronefs : Non.

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