La réalité augmentée en pleine crise de "hype"

Malgré les progrès technologiques, le grand public boude toujours la réalité augmentée, qui semble mieux adaptée au BtoB. La faute au "cycle du hype" ?
Sylvain Rolland
Les Google Glass, brièvement commercialisées, n'ont pas séduit le grand public, pas encore prêt pour la réalité augmentée. Les entreprises, elles, s'y mettent de plus en plus.

Souvenez-vous : les Google Glass devaient changer nos vies. Dotées d'une caméra intégrée, d'un micro, d'un pavé tactile sur l'une de ses branches, de mini-écrans, d'écouteurs et d'un accès à internet par Wi-Fi ou Bluetooth, ces lunettes à la pointe de la technologie devaient permettre à l'homo modernicus d'entrer de plein pied dans le XXIe siècle, celui où même les hommes sont des objets connectés comme les autres.

Sur le papier, quelle révolution ! Avec les Google Glass, chacun peut téléphoner, projeter un plan interactif devant soi, faire une recherche sur Internet, le tout en marchant dans la rue. Google y a investi des centaines de millions de dollars... avant de mettre le projet en sommeil depuis l'an dernier. Trop chères (la première version a été brièvement commercialisée pour 1.499 dollars), trop encombrantes, peu d'applications... les Google Glass ont fait "pschiit". Le grand public n'était pas prêt.

Une technologie qui promet monts et merveilles...

Depuis qu'on a décrété, il y a environ cinq ans, que la réalité augmentée serait "the next big thing", l'explosion de ce secteur se fait toujours attendre. Ce qui n'empêche pas les experts et projectivistes de lui prédire des lendemains qui chantent.

En avril dernier, le cabinet Digi Capital estimait même qu'en 2020, le marché mondial de la réalité augmentée pèsera 120 milliards de dollars dans le monde. Et Xerfi note, dans une étude publiée ce vendredi, que la France pourrait se tailler la part du lion dans ce secteur où, miracle, l'Hexagone est en avance. L'institut a même identifié une trentaine de jeunes pousses "à fort potentiel" dans le pays, dégageant à elles seules 50 millions d'euros de chiffres d'affaires en 2014.

...mais qui semble plus adaptée au BtoB

Alors, qu'est-ce qui cloche aujourd'hui ? Pourquoi chacun ne se promène-t-il pas dans la rue avec son casque de réalité augmentée, n'est pas équipé d'une télévision 3D ou d'un smartphone avec capteur 3D?

Xerfi tente une réponse : la réalité augmentée est bel et bien une révolution... mais surtout pour les entreprises. "La baisse des coûts des technologies permettra aux entreprises clientes de dégager des gains de productivité en mettant en place des dispositifs innovants comme les lunettes de réalité augmentée", écrivent les spécialistes.

De nombreuses sociétés font déjà appel à cette technologie. Dans la santé, le tourisme, le bâtiment ou le marketing, de plus en plus d'entreprises estiment que la réalité augmentée peut stimuler les ventes et s'imposer comme un vecteur de communication. Airbus et Accenture, par exemple, utilisent des lunettes de réalité augmentée dans le cadre de l'installation des sièges passagers. Même Microsoft, qui pensait à l'origine toucher le grand public avec son casque de réalité augmentée, HoloLens, le destine désormais surtout aux entreprises.

Explosion dans le bâtiment

L'exemple du bâtiment illustre parfaitement à quel point la réalité augmentée peut contribuer à la transformation digitale d'un secteur. "Le marché de la réalité augmentée se cherche toujours mais il est en train de trouver un modèle économique dans le bâtiment", estime Valérie Cottereau, la présidente de la PME rennaise Artefacto.

L'entreprise a conçu un logiciel permettant de visualiser en 3D et en temps réel un bâtiment encore en projet. Alors que son chiffre d'affaires oscillait autour d'1,5 million d'euros depuis des années, il a explosé depuis deux ans et demi, passant à 3 millions d'euros en 2014.

"Il y a deux ans, certains nous regardaient encore avec des gros yeux lorsqu'on leur présentait notre logiciel 3D, raconte Valérie Cottereau. Aujourd'hui, non seulement l'effet « whaou » est passé, mais les constructeurs ont intégré les gains de productivité et de qualité permis par la réalité augmentée. Même les constructeurs de maisons individuelles commencent à s'y mettre. Quand on aura dépassé les derniers verrous technologiques, ça va exploser encore plus".

Problème d'image auprès du grand public

Si l'industrie et les services BtoB se convertissent peu à peu, le grand public est à la traîne. Seul le marché des jeux vidéos tire son épingle du jeu. Les géants de l'électronique grand public, comme Microsoft ou Sony, lanceront leur casque de réalité augmentée dès la fin de l'année pour démocratiser cette technologie auprès des particuliers. Avec de bonnes chances de succès à la clé.

Car à la différence des Google Glass, les gamers perçoivent l'intérêt de la réalité augmentée pour améliorer l'expérience de jeu. Ce qui n'est pas le cas avec les Google Glass. Trop intrusives, les lunettes de la firme californienne font peur. Elles interrogent sur le respect de la vie privée et sur le traitement des données à l'ère du big data et de la surveillance généralisée.

En fait, la réalité augmentée souffre toujours d'un problème d'image. Dans la perception du grand public, il s'agit surtout de gadgets à faible valeur ajoutée, et non d'une innovation disruptive. Le succès très modéré des télévisions 3D le prouve. Pas de chance: les interrogations sur l'impact de la télé 3D sur la santé, notamment celle des enfants et des adolescents, ralentissent encore son développement.

Et si la réalité augmentée était en plein "creux de la désillusion" dans le "cycle du hype" ?

Mais tout ceci ne devrait pas durer. Selon le cabinet Gartner, la réalité augmentée vit en ce moment une crise passagère, liée à des attentes trop haut placées. Après l'euphorie de la découverte vient toujours la déception, en attendant que la technologie rencontre sa réalité industrielle.

Les experts de Gartner appellent cela le "cycle du hype". Un peu comme les psychologues parlent des cinq phases du deuil (déni, colère, marchandage, dépression, acceptation), Gartner établit que chaque innovation technologique passe par cinq étapes avant d'être adoptée par tous.

La première est intitulée "Technology Trigger" ou "déclenchement technologique". L'émergence d'une innovation qui pourrait être révolutionnaire déclenche l'intérêt de la presse et donc, du grand public. C'est le cas, actuellement, des robots intelligents, de l'homme bionique ou de l'impression 3D d'organes.

La deuxième phase, dite "Peak of inflated expectations" ou «pic des attentes démesurées", représente l'apogée de ce fantasme collectif. Quelques premiers succès ont laissé penser que l'explosion est pour bientôt. C'est le cas actuellement pour les voitures autonomes, la traduction en direct ou l'Internet des objets. Cette phase ne dure pas longtemps.. puisque l'enthousiasme retombe tel un soufflet. C'est le "creux de la désillusion" ou "through of disillusionment". Il s'agit de la troisième phase, celle dans laquelle se trouve aujourd'hui la réalité augmentée et virtuelle, ainsi que l'impression 3D grand public.

Heureusement, la vie d'une technologie est faite de rebondissements. Après la désillusion vient alors la "pente de l'illumination". La technologie et ses bénéfices sont mieux compris. Des produits de seconde ou de troisième génération, mieux conçus, débarquent et rencontrent un certain succès. De plus en plus d'entreprises se convertissent à la technologie en question, même si certains n'y croient toujours pas. C'est le cas actuellement de l'impression 3D pour les entreprises et du contrôle gestuel.

Enfin, la cinquième et dernière phase est celle du "plateau de productivité" (plateau of productivity). Des années après son irruption, la technologie commence à être adoptée par le grand public. Les dernières innovations à avoir atteint ce plateau sont le PC et les tablettes à stylet.

Selon Gartner, la réalité augmentée devrait encore patienter entre 5 et 10 ans avant d'atteindre ce stade tant espéré. Encore un exemple qui montre que la patience est une vertu cardinale en économie.

* « La réalité augmentée et virtuelle ne sera pas l'eldorado de la high tech à court terme », Xerfi,110 pages, 28 août 2015.

Sylvain Rolland

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Commentaires 15
à écrit le 01/09/2015 à 14:27
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Quel torchon cet article ! Autant d'approximation et d'amalgame, j'en reste pantois

à écrit le 30/08/2015 à 22:11
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L'auteur mélange la réalité augmentée et la réalité virtuelle. Cette article semble avoir peu de crédibilité face à cette méconnaissance élémentaire de ces deux domaines. Il n'y a aucune crise puisque les deux technologies n'ont jamais été disponible...

à écrit le 30/08/2015 à 14:20
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Autant j'en comprends l'intérêt pour les entreprises, autant en dehors du jeu vidéo, si c'est juste pour nous saturer encore plus publicités (ce qui est l'objectif avoué et exprimé par les marketeurs depuis le départ), ce n'est même pas la peine d'y ...

le 31/08/2015 à 23:36
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Il y a beaucoup à faire en éducation avec une telle techno faire vivre des enfants le corps humain en réalité virtuelle est 1000 fois mieux et rapide et efficace qu une photo ou même un outil 3d sur pc... plein d exemples plein d usages que la seule ...

à écrit le 30/08/2015 à 3:29
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Internet est une mine d'or et une poubelle à la fois. Cette article fait partie des déchets à jeter directement. Realite augmentée et Realite virtuelle n'ont absolument rien à voir... L'auteur semble ne rien connaître au sujet malgré qu'il a...

à écrit le 29/08/2015 à 17:43
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Incroyable les commentaires haineux... il n'y a pas de confusion entre la réalité augmentée et virtuelle ! L'article parle de réalité augmentée, c'est visible de l'introduction à la fin. Y'a toujours des gens qui aiment critiquer pour rien...

le 29/08/2015 à 19:33
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Y a aucune haine. Biensur y a clairement confusion, rien que la photo est fausse : Oculus Rift.est de la réalité virtuelle.

le 29/08/2015 à 23:02
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Le titre de l'article et de la photo a été modifié depuis les commentaires ayant pointé du doigt cette confusion. Il y avait donc bien matière à critiquer !

le 30/08/2015 à 3:35
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"...Les géants de l'électronique grand public, comme Microsoft ou Sony, lanceront leur casque de réalité augmentée..." Depuis quand Sony s'est mis à la réalité augmentée ? Mais à part ca y a pas de "confusion entre Realite augmentée et Realite...

le 30/08/2015 à 8:20
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Leave Britney alone. Bouh ouh ouh :'(

à écrit le 29/08/2015 à 15:06
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Bonjour, Vous faites une confusion entre réalité augmentée et réalité virtuelle. Deux concepts qui n'ont aucun rapport et ne servent pas les même objectifs. La réalité augmentée servira effectivement beaucoup aux entreprises avant de se généraliser d...

à écrit le 29/08/2015 à 14:34
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Y a aucune crise. Le casque de réalité virtuelle de Valve (HTC Vive) par exemple n'est pas encore sorti pour ses jeux vidéos, il sortira en 2016. Et ça sera pour les jeux vidéos, rien à voir avec les google glass qui ne sont pas de la réalité virtuel...

à écrit le 29/08/2015 à 12:58
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Et bientôt les chômeurs pourront visualiser en 3D l'intérieur d'une ANPE pour s'y inscrire à distance, leurs enfants pourront découvrir ce qu'est une entreprise modélisée, chose qu'ils ne verront sans doute jamais de leur vie. Le gouvernement pourra ...

à écrit le 29/08/2015 à 11:43
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Avec cet article, on est pas loin de la dépêche AFP. L'auteur mélange tout et ne connaît apparemment pas le secteur. Le titre parle de réalité "virtuelle" quand l'article parle de réalité "augmentée", ce qui n'a strictement rien à voir puisqu'il s'...

le 29/08/2015 à 13:04
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LaTribune n'est pas un journal spécialisé. Ils font sans arrêt des approximations et leurs analyses sont souvent bancales et orientées, même quand elles traite de l'économie. Bref, tout ça pour dire qu'effectivement ce papier est vraiment médiocre...

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