
Il n'est pas si courant qu'une entreprise qui écope d'une énorme amende voit son cours de Bourse grimper en flèche ! Le titre d'Ericsson était pourtant en forte hausse de 4%, à 60 couronnes, ce vendredi en début d'après-midi, à la Bourse de Stockholm, dans le sillage de l'annonce d'une importante sanction financière. La veille, le géant suédois des équipements télécoms s'est fendu d'un communiqué à 22h30. Dans cette missive tardive, il affirme avoir conclu un deal avec le Département américain de la justice concernant ses malversations en Irak entre 2011 et 2019. Celui-ci prévoit qu'Ericsson s'acquitte d'une amende de 206 millions de dollars en échange d'un abandon des poursuites. De quoi soulager les investisseurs, dont certains redoutaient, probablement, une sanction plus importante...
Tous avaient, en effet, en mémoire l'amende de 1 milliard de dollars qu'Ericsson avait écopé en 2019. A l'époque, le groupe suédois avait dû signer cet énorme chèque à la justice américaine dans le cadre d'un accord de poursuites différées (DPA), afin de mettre un terme à plusieurs enquêtes pour des faits de corruption à Djibouti, en Chine, au Vietnam, en Indonésie et au Koweït.
« De nombreux comportements répréhensibles »
Dans le cas présent, le Département américain de la justice reprochait à Ericsson, qui a levé le voile en février 2022 sur des malversations en Irak, de ne pas l' avoir informé, et ainsi d'avoir violé l'accord DPA de 2019. A l'époque, Ericsson avait rendu publiques les conclusions d'une enquête interne où il a fait état « de nombreux comportements répréhensibles » dans ce pays de la part de ses employés, vendeurs et fournisseurs. Ce champion mondial des infrastructures de réseaux mobiles a suspecté, en particulier, ses troupes d'avoir versé des pots-de-vin à l'Etat islamique afin de contourner les douanes irakiennes. L'équipementier précise que son enquête « n'a pas permis de conclure qu'Ericsson avait effectué ou était responsable de paiements à une organisation terroriste ».
Grâce à son arrangement avec la justice américaine, Ericsson veut tourner cette page sombre. « Cela nous permet de nous concentrer sur l'exécution de notre stratégie », affirme Börje Ekholm, le PDG de l'équipementier. Le dirigeant affirme avoir « tiré les leçons » de sa « mauvaise conduite » dans plusieurs pays, en mettant désormais « l'intégrité » au cœur de la « culture » du groupe.
Un contexte économique difficile
L'état-major de l'équipementier suédois ne cache pas sa satisfaction d'avoir réglé cette affaire. Il a, à vrai dire, d'autres chats à fouetter. Ses affaires souffrent dans un contexte économique difficile. Ses résultats de 2022, publiés fin janvier, en témoignent. Si son chiffre d'affaires a progressé de 17% à 271 milliards de couronnes (plus de 24 milliards d'euros), son bénéfice net a lui-même dégringolé de 17%, à 19,1 milliards de couronnes (1,7 milliard d'euros). Un mois plus tard, Ericsson a annoncé de nouvelles mesures visant à réduire ses coûts, en supprimant 8,500 postes sur ses 100.000 collaborateurs à travers le monde.
Comme ses rivaux Nokia ou Huawei, Ericsson est aujourd'hui confronté à une forte inflation. « Tous les coûts des composants ont augmenté », nous expliquait Franck Bouétard, le patron d'Ericsson France, ce lundi au Mobile World Congress de Barcelone. En parallèle, Ericsson a décidé, au regard du contexte géopolitique, de relocaliser à grands frais sa production d'équipements de réseaux mobiles. Désormais, le géant suédois des télécoms les fabrique en Estonie et en Pologne plutôt qu'en Chine. Ses équipements pour le marché américain sont, eux, produits aux Texas.
En outre, Ericsson s'attend à un exercice 2023 difficile. L'inflation et la hausse des coûts de l'énergie pèsent sur les finances des opérateurs télécoms, lesquels, d'après le groupe suédois, devraient réduire leurs investissements dans les réseaux, et notamment dans la 5G. Ce dont Ericsson pâtira mécaniquement.
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