Déploiement de la fibre : la filière alerte encore sur la rémunération des sous-traitants

La fédération InfraNum, qui rassemble le gratin des télécoms françaises, appelle les Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free à mieux payer leurs sous-traitants, et notamment ceux en charge du raccordement des abonnés à la fibre. Sans cela, « il est illusoire d’espérer améliorer le niveau de qualité » des réseaux, avertit Philippe Le Grand, son président.
Pierre Manière
Un technicien raccorde des abonnés à la fibre.
Un technicien raccorde des abonnés à la fibre. (Crédits : Mégalis Bretagne)

Ce mardi, le Sénat a voté à l'unanimité une proposition de loi visant à en finir avec les malfaçons qui pullulent depuis des années sur les réseaux de fibre. Le texte entend mettre la pression sur la filière pour améliorer la qualité des raccordements des clients. Beaucoup se plaignent de pannes ou de coupures à répétition après le passage de techniciens indélicats, ne travaillant pas dans les règles de l'art. Cette proposition de loi vise notamment à doter l'Arcep, le régulateur des télécoms, de nouveaux pouvoirs afin de contrôler la qualité des réseaux, et au besoin de sanctionner les opérateurs.

Au sein de la filière, beaucoup espèrent que cette mesure, si elle voit le jour, incitera les Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free à réviser à la hausse leurs tarifs à l'égard de leurs sous-traitants, et en particulier ceux qui raccordent les abonnés à la fibre. Leur travail fait parfois - et à juste titre - l'objet de fortes critiques. Mais beaucoup de ces sous-traitants se disent aussi asphyxiés par les tarifs, jugés bien trop bas, des opérateurs, lesquels plombent leur activité et, in fine, la qualité des interventions.

« Le modèle économique reste fragile »

Le sujet n'est pas nouveau. Mais il est devenu électrique depuis plus d'un an, sur fond d'inflation galopante après la crise du Covid-19 et la guerre en Ukraine. Le dossier est si sensible qu'InfraNum, l'influente fédération des industriels des télécoms, a tenu à l'évoquer noir sur blanc dans un récent communiqué commun avec la Fédération française des télécoms (FFT), le lobby des grands opérateurs nationaux. Dans cette missive publiée le 25 avril dernier, InfraNum estime que l'insuffisante rémunération des sous-traitants des Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free constitue « le nœud du problème » concernant les malfaçons sur les réseaux de fibre. « La fragilité du modèle économique des raccordements reste encore réelle », alerte Philippe Le Grand, le président de la fédération. D'après lui, « il est illusoire d'espérer améliorer le niveau de qualité » des réseaux de fibre sans geste fort des opérateurs.

Interrogé par La Tribune, Philippe Le Grand enfonce le clou :

« Je confirme que les tensions sur la chaîne de sous-traitance sont toujours très élevées, s'inquiète-t-il. Ce sont les sous-traitants de rang 2 [les sous-traitants des sous-traitants des opérateurs, Ndlr] qui en pâtissent le plus. Ils ne sont pas assez payés. Certaines mettent la clé sous la porte. On peut faire tous les discours qu'on veut sur la qualité des raccordements. Mais si la rémunération ne suit pas, ça ne marchera jamais. »

Des reconversions dans l'énergie

Ce problème en crée d'autres. Beaucoup de sous-traitants claquent la porte aux télécoms pour travailler dans le secteur de l'énergie. Certains se reconvertissent dans l'installation de bornes de recharge pour voitures électriques ou de panneaux solaires. L'explication est simple : « les télécoms payent moins que l'énergie », se désole Philippe Le Grand. Une récente étude du cabinet Katalyse souligne qu'un tiers des entreprises des télécoms envisage « de se diversifier sur des activités autres que celles relatives aux infrastructures numériques ». Ce mouvement a de quoi inquiéter la filière, dans la mesure où le déploiement de la fibre, qui est censé s'achever fin 2025, nécessite encore beaucoup de main d'œuvre.

Parmi les grands opérateurs nationaux, Orange avait fait l'objet de sévères critiques après avoir révisé à la baisse, au printemps 2022, certains de ses tarifs à l'égard de ses sous-traitants. Le numéro un français des télécoms s'est (un peu) rattrapé en augmentant, quelques mois plus tard, ses prix de 2,2%. Mais pas de quoi, visiblement, satisfaire les sous-traitants, qui espèrent aussi que SFR, Bouygues Telecom et Free mettront la main au portefeuille.

Pierre Manière

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Commentaires 4
à écrit le 16/05/2023 à 15:10
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Nous avons créé une application qui répond a toutes les problématiques de déploiement et de SAV concernant la fibre, malheureusement nous sommes renvoyé entre les opérateurs et l'Arcep, en attendant rien avance.

à écrit le 04/05/2023 à 11:52
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Toujours pas regle ce pb de telephonie ? Les zones blanches ? Meme en.payant ca continue de merder.

à écrit le 03/05/2023 à 20:16
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Mais oui c'est ça!!!!!! La solution tolérante !!! De gauche donc!!! Des forfaits gratuits en tout illimité paye par personne rembourses en cmu à 2 euros, c'est ça l'avenir avec des milliards d'investissement Mais pourquoi la gauche n'y a pas pensé...

à écrit le 03/05/2023 à 19:25
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L'idée défendue depuis une trentaine d'années qui voudrait que le privé fait mieux que les services publiques trouve ici ses limites et encore l'arcep a fait la sourde oreille depuis déjà 2 ou 3 ans devant les alertes à répétitions des utilisateurs ...

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