Télécoms : en Inde, un marché du mobile en ébullition

Deuxième marché du monde pour les télécoms, l’Inde affiche un dynamisme saisissant sur le segment de la téléphonie mobile. Les clients affichent une grande appétence pour la 5G, qui n’a été lancée qu’en août 2022. Gros plan sur un secteur qui a connu maints bouleversements ces dernières années.
Pierre Manière
Des utilisateurs de smartphones à Bombay, le 4 janvier 2023.
Des utilisateurs de smartphones à Bombay, le 4 janvier 2023. (Crédits : Reuters)

Les Indiens sont friands de téléphonie mobile. Et cette appétence, particulièrement forte, ne se dément pas avec l'arrivée de la 5G. Lancée tardivement dans le pays, en août 2022, cette technologie avait déjà séduit 10 millions d'abonnés à la fin de cette même année. D'après une récente étude de l'équipementier télécoms suédois Ericsson, la 5G représentera « 57 % des abonnements mobiles du pays d'ici fin 2028 ». C'est-à-dire environ 627 millions de clients, au regard des 1,1 milliard d'utilisateurs de téléphonie mobile dans le pays. A en croire Ericsson, l'Inde n'est rien de moins que « la région du monde en plus forte croissance » sur le créneau de la 5G. Le pays est, pour rappel, le deuxième marché du globe pour les télécoms, derrière la Chine.

Pourquoi cette appétence ? D'abord parce que les smartphones sont le canal privilégié, et de loin, pour se connecter à Internet. D'après une note de la Direction générale du Trésor publiée le mois dernier, 96% des 821 millions d'utilisateurs de téléphones mobiles accèdent à Internet via ce moyen. La consommation de données, elle, a presque été multipliée par quatre entre 2018 et 2022, à 14,4 exaoctets, relève l'administration française. En outre, le prix des données mobiles est peu élevé. « L'Inde est aujourd'hui le cinquième pays [le moins cher, Ndlr] en termes de coût des données mobiles », évalué à 17 centimes de dollars le gigaoctet, relève la direction générale du Trésor. Les Indiens sont ainsi devenus de grands consommateurs de services en ligne. « L'Inde compte le plus grand nombre d'utilisateurs au monde de messagerie instantanée Whatsapp (plus de 535 millions) et de la plateforme Youtube (plus de 467 millions) », constate la direction générale du Trésor.

L'arrivée fracassante de Jio

Ce dynamisme du marché indien du mobile doit beaucoup à l'arrivée de Jio. En 2016, ce nouvel arrivant et propriété de Mukesh Ambani, la première fortune d'Inde, décide de casser allègrement les prix pour essorer la concurrence. Cette initiative, qui n'est pas sans rappeler celle de Free Mobile en France en 2012, a provoqué un séisme sur le marché. Cette guerre des prix a largement affaibli les opérateurs en place, déjà confrontés à une situation critique en raison des redevances particulièrement élevées dont ils ont dû s'acquitter pour obtenir leurs fréquences 2G et 3G.

Depuis 1999, l'exécutif a décidé de calculer ces frais en fonction des revenus globaux des opérateurs. Ce qui a fait hurler ces derniers, qui appelaient à ce que leurs redevances soient liées à leurs seuls revenus des télécoms. Après une longue bataille juridique, la Cour suprême a donné raison, à l'automne 2020, à l'exécutif. Bharti Airtel et Vi, les numéros deux et trois sur le marché, se sont, alors, retrouvés avec des ardoises colossales, de respectivement 5,3 et 7 milliards de dollars.

Consolidation du marché

La guerre des prix lancée par Jio est, dans ce contexte, venue aggraver les difficultés financières de la concurrence. Certains opérateurs ont fait faillite, les autres ont tenté de se marier pour garder la tête hors de l'eau. Le marché, qui comptait neuf acteurs privés, n'en possède plus que trois, auquel il faut rajouter l'opérateur public BSNL. La percée de Jio a été phénoménale. Aujourd'hui, l'opérateur détient une part de marché de 52%, contre 30% pour Bharti Airtel, 14% pour Vi, et 3% pour BSNL.

Jio n'a pas cessé son offensive. Ce sont en grande partie ses investissements qui permettent à l'Inde de déployer la 5G sans traîner. Lors du lancement de cette technologie dans le pays, en août 2022, Mukesh Ambani a indiqué que son opérateur consacrerait l'équivalent de 25 milliards d'euros dans ce nouveau réseau. « Nous sommes déterminés à faire de l'Inde la plus grande économie portée par les données au monde, même devant la Chine et les Etats-Unis », a-t-il déclaré. Longtemps en retard en matière de téléphonie mobile, l'Inde fait, quoi qu'il en soit, son retard à toute vitesse.

Pierre Manière

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Commentaire 1
à écrit le 12/01/2024 à 9:04
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Dépendant uniquement de l'évolution des salaires, or si c'est comme le phénomène chinois, pendant que leurs salaires augmentaient peu, les nôtres en europe baissaient. S'ils pouvaient y aller mollo cette fois en Inde ce ne serait pas du luxe les sala...

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