Télécoms : l’Arcep entérine la hausse du prix du dégroupage, au grand dam des opérateurs alternatifs

Le gendarme des télécoms a adopté, ce lundi, les nouvelles règles qui encadreront le marché de l’Internet fixe pour les cinq prochaines années. L’autorité n’a pas révisé l’augmentation du prix du dégroupage, le tarif auquel Orange loue son réseau cuivre aux opérateurs alternatifs, malgré les critiques de la Commission européenne. Très en colère, SFR, Bouygues Telecom et Free envisagent de saisir le Conseil d’Etat.
Pierre Manière
Laure de La Raudière, la présidente de l'Arcep.
Laure de La Raudière, la présidente de l'Arcep. (Crédits : DR)

Comme prévu, l'Arcep a campé sur ses positions. Le gendarme des télécoms a adopté, lundi soir, les nouvelles règles qui encadreront le marché de l'Internet fixe en France pour la période 2024-2028. Celles-ci sont particulièrement structurantes pour le secteur : cette régulation doit accompagner la bascule du réseau cuivre (ADSL) vers la fibre, la nouvelle infrastructure de référence pour se connecter à Internet dans les prochaines décennies. Malgré les inquiétudes de l'Autorité de la concurrence, conjuguées aux vives critiques de la Commission européenne à l'égard de ce texte, l'institution présidée par Laure de La Raudière n'a pas fondamentalement revu sa copie.

La mesure la plus importante de cette nouvelle réglementation concerne la hausse du tarif du dégroupage. Il s'agit du prix payé par les opérateurs alternatifs (SFR, Bouygues Telecom et Free) pour accéder au réseau cuivre d'Orange. L'Arcep ouvre la voie à de fortes augmentations dans les territoires où la fibre est disponible, afin d'inciter les clients à passer à la fibre, et les opérateurs à privilégier cette nouvelle technologie. Au bout du bout, Orange sera même libéré de cette obligation tarifaire.

SFR, Bouygues Telecom et Free très remontés

Fin novembre, la Commission européenne a fortement critiqué ce projet. A l'instar de l'Autorité de la concurrence avant elle, Bruxelles a évoqué le risque que cette réglementation déstabilise le marché, en offrant une « rente » à Orange. Elle a notamment déploré la durée de l'augmentation du prix du dégroupage (« jusqu'à six ans »dans les campagnes et les territoires peu peuplés. Ces craintes de la Commission européenne rejoignent celles de SFR, Bouygues Telecom et Free, depuis longtemps très, très remontés contre cette nouvelle régulation. A leurs yeux, l'Arcep déroule le tapis rouge à Orange pour leur faire les poches.

L'autorité a toutefois pris en compte certaines inquiétudes de Bruxelles. L'Arcep compte contrôler plus attentivement le calendrier de fermeture du réseau cuivre d'Orange dans les zones fibrées, afin que la période d'augmentation du prix du dégroupage ne soit pas plus longue que prévu. En outre, l'autorité va mettre en place un « système de pénalités de retard »« En cas de retard, Orange sera tenu de rembourser à l'opérateur lésé les sommes indûment perçues, avec des intérêts », précise l'institution à La Tribune.

« L'Arcep n'a pas tenu compte de grand-chose »

Pas de quoi, cependant, calmer la colère des opérateurs alternatifs. A La Tribune, l'un d'eux regrette que l'Arcep « n'a pas tenu compte de grand-chose ». Tous ont désormais la possibilité d'attaquer la nouvelle régulation de l'Arcep au Conseil d'Etat. « Il est un peu trop tôt, mais oui, nous l'étudions », affirme un autre concurrent d'Orange. Un troisième, lui, salue « l'ajout d'un mécanisme de remboursement ». Mais il déplore que l'Arcep permette toujours à l'opérateur historique d'augmenter fortement le tarif du dégroupage dans les zones moyennement denses et rurales, qui ne sont pas soumises à un préavis de deux ans pour la fermeture du réseau cuivre. Il s'agit, d'après cet acteur, d'« un relâchement trop précoce » de l'obligation tarifaire d'Orange. En conséquence, « il est très probable que les trois alternatifs attaquent », renchérit-il.

Orange, de son côté, ne cache pas sa satisfaction. « Les rajouts [de l'Arcep à son texte] tiennent compte de l'avis de la Commission européenne, mais les hausses de tarifs sont toujours là », constate une source proche du leader français des télécoms. Les passes d'armes concernant cette nouvelle réglementation ne sont, probablement, pas terminées.

Pierre Manière

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.