Télécoms : le gouvernement et les opérateurs face au défi de la « fibre pour tous »

Malgré la crise sanitaire, le vaste chantier du déploiement de la fibre se porte bien. L’inquiétude est pourtant déjà de mise concernant le raccordement de 2 millions de foyers situés dans les territoires les plus isolés ou difficiles d’accès.
Pierre Manière
Pour apporter l'Internet à très haut débit à tous les Français, la fédération InfraNum, qui rassemble les industriels des télécoms, recommande la création d’un « service universel de la fibre », soit « un fonds de péréquation pour assurer la vie du réseau, sur le modèle de l’énergie ».
Pour apporter l'Internet à très haut débit à tous les Français, la fédération InfraNum, qui rassemble les industriels des télécoms, recommande la création d’un « service universel de la fibre », soit « un fonds de péréquation pour assurer la vie du réseau, sur le modèle de l’énergie ». (Crédits : ALESSANDRO BIANCHI)

En matière de télécoms, c'est l'une des grandes promesses d'Emmanuel Macron. Pendant la crise du coronavirus, qui a démontré l'importance, pour les Français, de disposer d'une bonne connexion Internet, le chef de l'Etat a fait de la « fibre pour tous » un objectif à l'horizon 2025. Ce n'est pas une mince affaire. Certes, le plan France Très haut débit, qui vise à apporter une connexion Internet ultra-rapide à tous les Français d'ici à 2022, est sur de bons rails. Selon une étude publiée ce mardi par InfraNum, qui rassemble les industriels de la fibre, le déploiement de cette technologie s'intensifie. Cette année, 6,2 millions de locaux supplémentaires devraient être raccordés. Un record. Tous les acteurs des télécoms et le gouvernement s'en félicitent, d'autant que ce résultat a été obtenu en pleine crise sanitaire. L'étude d'InfraNum estime ainsi qu'en 2022, 36,2 millions de locaux seront raccordés, sur un total de 42,7 millions.

Selon ces projections, il faudra encore apporter la fibre à 6,5 millions de foyers entre 2023 et 2025. Or selon InfraNum, 2,1 millions de locaux suscitent l'inquiétude du secteur. Et pour cause, il s'agit ici de raccordement longs, complexes, situés dans des territoires isolés ou difficilement accessibles. D'un point de vue technique, rien n'empêche d'apporter la fibre à ces foyers... Mais cela coûte très cher. Dans le cadre du plan de relance, le gouvernement a déjà débloqué une enveloppe de 150 millions d'euros pour effectuer ces raccordements. Mais cette manne apparaît très insuffisante. Délégué général adjoint d'InfraNum, Julien Delmouly souligne que ces prises vont coûter « deux à trois fois plus cher » que celles des réseaux déployés par les collectivités dans les campagnes, dont le prix s'élève « en moyenne à 1.500 euros » l'unité. Si l'on part du principe que ces raccordements difficiles vont chacun coûter 3.000 euros, la facture totale s'élève à 6,3 milliards d'euros ! Un montant astronomique au regard du coût total du plan France Très haut débit, qui avoisine aujourd'hui les 30 milliards d'euros. Pour atteindre le « 100% fibre », InfraNum recommande ainsi la création d'un « service universel de la fibre », soit « un fonds de péréquation pour assurer la vie du réseau, sur le modèle de l'énergie ».

La qualité de service, priorité des priorités

En parallèle, l'exécutif est confronté à un autre défi. De nombreux raccordements à la fibre ne se déroulent pas correctement. « 20% d'entre eux se soldent par un échec », constate Julien Delmouly. Le problème n'est pas nouveau, mais semble s'enliser depuis quelques mois. Beaucoup de ces échecs proviennent du fait que certains sous-traitants, chargés par les opérateurs de réaliser les derniers branchements, ne travaillent pas dans les règles de l'art. Mal payés et sous pression, ils effectuent leurs tâches à la va-vite, semant la pagaille dans les installations. Résultats, certains clients peinent à être raccordés. D'autres sont soudainement débranchés.

Alors que certains opérateurs estiment parfois que ces problèmes sont la conséquence du déploiement rapide de la fibre, le gouvernement et l'Arcep, le régulateur des télécoms, tapent du poing sur table. « La situation actuelle n'est pas satisfaisante, et c'est un euphémisme de le dire », a déclaré ce mardi Cédric O, le secrétaire d'Etat en charge des télécoms, lors d'une conférence organisée ce mardi par InfraNum, l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca) et la Banque des territoires. « On peut comprendre qu'il y ait un échauffement parce qu'on n'a jamais déployé aussi vite, mais il faut résoudre le problème, a-t-il poursuivi. Les opérateurs ont pris des engagements, et ils doivent les respecter. » Le ministre s'est même montré menaçant, laissant entendre que des sanctions pourraient tomber « si on ne voit pas les chiffres s'améliorer ». Même son de cloche pour Laure de La Raudière, la présidente de l'Arcep. « L'année 2021 doit être l'année de la qualité de service sur la fibre », a lancé la patronne du gendarme des télécoms. « Le déploiement ne doit pas se faire au détriment de la qualité de service », a-t-elle insisté, renvoyant, comme Cédric O, les opérateurs à leurs responsabilités.

Pierre Manière

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Commentaires 3
à écrit le 12/05/2021 à 23:10
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J'ai proposé une idée pour déployer la fibre optique plus rapide et moins coûteux à monsieur Cédric :secrétaire d'état au numérique et à madame: Laure de la Raudiere : Présidente de l'arcep. J'est pas aucun réponse.

à écrit le 12/05/2021 à 9:03
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j'ai la solution et ca ne coutera rien a personne, comme on aime en france il suffit de forcer free a faire les travaux puis de mettre a titre quasi gratuit les reseaux a dispo des concurrents l'arcep independante sera d'accord, et vu leurs marges...

à écrit le 11/05/2021 à 20:07
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Mon ADSL déjà cher en cuivre me convient très bien .Surtout que les connexions sont mutualisés . Pourquoi payer cher ,un produit qui n'apporte rien de plus et qui sera difficile à réparer en cas de problème ,les délais pour récupérer le flux vont ...

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