Jean-Luc Moudenc : "Sur le climat, je suis optimiste car la prise de conscience est générale"

[ #COP21 ] À quelques semaines de la COP21, l'Association des maires des grandes villes de France organise, le 23 septembre, une journée de conférences sur le thème de la transition énergétique. Pour le maire de Toulouse, la mise en place des politiques de lutte contre le réchauffement climatique se heurte à des impératifs économiques.
Jean-Luc Moudenc maire de Toulouse et président de l’Association des maires de grandes villes de France (AMGVF)

LA TRIBUNE - L'AMGVF que vous présidez organise la 15e édition de la Conférence des villes, sur le thème de la transition énergétique. Quelles annonces prévoyez-vous ?

JEAN-LUC MOUDENC - Il n'y aura pas d'annonce. Cette journée est une journée de réflexion et d'échanges avec des experts, des élus, des représentants du gouvernement et des entrepreneurs.

Quels sont les risques du réchauffement climatique pour les habitants des villes ?

Ce sont principalement des risques pour la santé, avec la multiplication des maladies cardiovasculaires, de l'asthme, des allergies. Ce sont les plus fragiles, les enfants notamment, qui sont les plus exposés à cela, même si nous n'avons pas de chiffres précis.

La loi sur la transition énergétique prévoit qu'en 2020 les constructions devront toutes être à énergie positive. Est-ce un défi réaliste ?

Il y a trois défis à relever pour les maires et présidents de métropoles. Le premier est de travailler sur le patrimoine ancien (1,5 million m2 à Toulouse) pour le réorienter, énergétiquement parlant, vers quelque chose de plus économe et écologique. C'est, me semble-t-il, le défi le plus difficile à relever. Il va falloir mettre en place des plans volontaristes sur le long terme. Ensuite, il y a le bâti neuf : construire des bâtiments à énergie positive ne me semble pas être le plus difficile. Enfin, il y a un effort à faire en direction des ménages, pour qu'ils rénovent leurs logements, installent des compteurs électriques intelligents.

Comment les maires vont-ils financer ces actions ?

Tout cela est évidemment soumis à des aléas financiers. Les budgets sont difficiles à trouver et devront faire l'objet d'arbitrages.

À Toulouse par exemple, quels arbitrages allez-vous faire ?

Je souhaite imprimer une volonté. On ne pourra pas tout faire en un coup de baguette magique. Je pense néanmoins que le plus facile à mettre en place sera la construction de bâtiments à énergie positive. En ce qui concerne l'ancien, la ligne « entretien » du budget annuel pourrait servir à transformer le modèle énergétique de notre patrimoine.

Quel est le budget de Toulouse consacré à la lutte contre le réchauffement climatique ?

Nous avons à Toulouse un budget de 1,5 milliard d'euros d'investissements jusqu'en 2020. Deux cent cinquante millions sont fléchés développement durable (transports et habitat, principalement). La future troisième ligne de métro, si elle se fait, pourra rentrer dans ce budget, car les 200 000 utilisateurs potentiels laisseront leur voiture pour l'utiliser. Le métro est le transport en commun le plus performant.

Les transports en commun sont-ils toujours prioritaires ?

Depuis quinze ans, les transports en commun dans les agglomérations ont clairement bénéficié d'une priorisation des crédits. Trois quarts des investissements en matière de mobilité vont aux transports en commun et aux modes doux. Mais la démographie continue d'augmenter et les besoins en déplacements croissent. Il y a encore une nécessité de développer les infrastructures, et les moyens dont nous avons disposé depuis trente ans s'épuisent.

Comment vous déplacez-vous ?

Quand je suis en voiture, je propose à mes collègues de faire du covoiturage pour ne pas être seul dans le véhicule. Je suis un grand adepte du métro et parfois du bus. Tout dépend du temps dont je dispose.

Avec la loi NOTRe, les Régions seront chargées de la planification des actions climat et les intercommunalités devront les mettre en oeuvre. Comment cela va-t-il s'articuler concrètement ?

La loi NOTRe, en date du 7 août, indique en effet que les intercommunalités seront les seules responsables pour mettre en place le « plan énergie territorial ». Il va falloir préciser l'articulation des deux démarches et voir comment les objectifs régionaux seront traduits par les intercommunalités. Nous devrons dialoguer et je suis assez optimiste car la prise de conscience est générale. La COP21 va nous obliger à progresser et à améliorer nos façons de faire.

La COP21 peut-elle être un échec ?

À chaque fois qu'il y a un grand événement avec autant d'attente, il y a la crainte d'un échec, ce qui est normal au regard de l'échec du sommet de Copenhague en 2009. Néanmoins, je pense que la prise de conscience sur la préservation de l'environnement progresse dans tous les pays, même ceux qui étaient hermétiques à ce genre de préoccupations auparavant. Il y a de l'espoir.

Êtes-vous favorable à la gratuité des transports pendant la COP21 (comme l'a demandé Anne Hidalgo), financée par le gouvernement ?

Oui, si le gouvernement a des crédits à débloquer pour cela... Selon un sondage Odoxa pour iTélé, à la question de savoir s'ils « se sentent concernés par la COP21 »,

52 % des sondés disent ignorer de quoi il s'agit. Qu'est-ce que cela vous inspire ?

Cela ne m'étonne pas du tout. Le nom de COP21 est un mauvais nom, que seuls les experts et les spécialistes comprennent. C'est une erreur de communication et ce n'est pas pédagogique. C'est tout le problème avec les questions d'environnement : il ne faut pas en faire des problématiques technocratiques.

Vous avez à Toulouse un plan de réduction des gaz à effet de serre qui court de 2005 à 2020. Quel est le bilan en 2015 ?

Je n'ai pas de bilan chiffré. Mais je relève que ce plan est consensuel et propose une vision à long terme. Aucune alternance politique n'a enrayé la machine et c'est bien d'avoir pu se mettre d'accord, au-delà des divergences politiques, sur les objectifs : - 20 % de gaz à effet de serre, + 20 % d'efficacité énergétique et porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale.

Paris, Strasbourg, Bordeaux et Lyon ainsi que des villes européennes (Rome, Bruxelles, Athènes, Madrid, Lisbonne) vont lancer des appels d'offres en commun pour l'achat de fournitures à faible teneur en carbone. Toulouse pourrait y participer ?

J'y serais très favorable. Nous le faisons déjà avec Tisséo [syndicat mixte des transports en commun de Toulouse, ndlr] lors d'appels d'offres pour des bus ou des rames de métro. Nous nous associons avec des villes qui ont le même système de type « val » que nous [totalement automatique, ndlr] : Lille ou Rennes. Cela nous permet de faire des économies et il serait intéressant de le mettre en place dans d'autres domaines.

Pour acheter de l'électricité verte par exemple ?

Il faut voir si cela est possible techniquement.

Qu'est ce qui est le plus efficace pour lutter contre le réchauffement climatique : les pouvoirs publics ou les initiatives citoyennes et alternatives (covoiturage, circuits courts...) ?

Les deux sont indispensables. Les pouvoirs publics doivent donner l'exemple et provoquer un effet d'entraînement. Il est très sain qu'un mouvement citoyen s'approprie ces enjeux-là.

Commentaire 1
à écrit le 29/09/2015 à 20:07
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Si l'environnement est admis par tous, alors tous les transports urbains devraient être à l'énergie propre. Ainsi que tous les transports de marchandises urbains. Ainsi que tous les bobos qui vont vendre leurs 4x4 ou similaires et opter pour des éner...

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