Rajendra Pachauri, le patron contesté des climatologues

Rajendra Pachauri est « un leader compétent et visionnaire » : ce soutien retentissant apporté hier lors de l'ouverture du sommet par le Premier ministre indien, Manmohan Singh, appuyé dans la journée par le Premier ministre de Norvège ou son homologue du Québec, a dû aller droit au coeur de l'intéressé. Car Pachauri, qui préside le groupe d'experts sur l'évolution du climat de l'ONU, est l'objet depuis plusieurs semaines d'attaques violentes face auxquelles il apparaissait jusqu'ici bien seul.Ce sémillant quasi septuagénaire avait plutôt l'habitude d'être traité en superstar. Immédiatement reconnaissable dans les médias à ses cheveux mi-longs et à sa barbe fournie, il y prêchait inlassablement en faveur de la lutte contre les changements climatiques. Une cause dont il est quasiment le seul héraut de haut niveau en Inde. « C'est un peu notre Nicolas Hulot », relève un expert français... Son prestige personnel était encore rehaussé par le Nobel de la paix décerné en 2007 conjointement à Al Gore et au groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), qu'il avait reçu au nom de l'organisme de l'ONU.L'affaire des glaciersMais aujourd'hui, l'apôtre de l'environnement fait face à une campagne très organisée. La presse conservatrice britannique, « Telegraph » en tête, met en cause le GIEC, Pachauri et Teri, l'institut qu'il dirige. Tout y passe. Pachauri donne des conseils sur l'environnement à certains groupes industriels et financiers : on l'accuse de conflits d'intérêts. Les journaux britanniques s'interrogent sur ses rémunérations, mettent en cause sa résidence dans un quartier chic de Delhi, etc. Sa formation d'ingénieur, et non de scientifique de l'environnement, est décriée. Surtout, les critiques se déchainent contre certaines erreurs relevées dans les travaux du GIEC, en particulier la prévision d'une disparition des glaciers de l'Himalaya d'ici 2035, qui s'est avérée non fondée sur des données réelles.Défense maladroiteEn réponse à cette offensive, le champion indien de l'environnement dénonce les lobbies industriels et financiers qui redoutent des dispositions contraignantes de protection du climat et qui sont prêts à tout pour saper les efforts du GIEC. Il a beau expliquer qu'il est normal que Teri collabore avec l'industrie et qu'il n'en tire aucun bénéfice personnel, sa défense apparaît parfois maladroite, par exemple quand il affirme que la crédibilité du GIEC a été « améliorée » par le fait de reconnaître ses erreurs sur les glaciers... Et sa ligne de défense avait jusqu'ici été sérieusement affaiblie par l'attitude du ministre de l'Environnement, Jairam Ramesh, qui enfonçait avec délectation le patron du GIEC, avec qui il a de sérieuses divergences de vues.Réunis pour débattre des suites du sommet de Copenhague, largement perçu ici comme un échec, les grands de ce monde ont manifestement jugé qu'il fallait sauver le soldat Pachauri : la défense de l'environnement ne peut se permettre de perdre un de ses porte-parole les plus éminents.
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