Quand une fouine s'immisce dans le débat politique sud-coréen

Une émission radio diffusée via Internet ravit les Coréens, notamment les jeunes.
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"Nous louons notre président qui aime le peuple. Notre président aime les agriculteurs et les ouvriers. Cependant, même s'il est sud-coréen, l'amour de notre président n'est destiné qu'aux agriculteurs et aux ouvriers... américains. Chers américains, merci de convaincre notre président de s'intéresser aux Sud-Coréens !"

La critique - qui vise l'accord de libre-échange signé avec les Etats-Unis - est tirée du podcast  "Je suis une fouine". Satirique, méchante et drôle, cette émission diffusée uniquement sur Internet et "dédiée à Sa Grandeur, notre président" connaît un succès phénoménal auprès de Sud-Coréens peu habitués à une telle liberté de ton.

Le paysage médiatique sud-coréen est en effet composé en majorité de médias conservateurs et proches du pouvoir. Les trois principaux quotidiens, tous conservateurs, ont d'ailleurs reçu l'autorisation de créer trois chaînes de télévision généralistes, inaugurées hier, une décision qui a provoqué la colère d'une opposition inquiète du manque de pluralité de l'information.

Dans ce contexte, les podcasts hilarants et irrespectueux de  "Je suis une fouine" sont accueillis comme une bouffée d'air frais par des jeunes Sud-Coréens fâchés par les décisions économiques de leur gouvernement. Chaque "podcast" est téléchargé par plus de 2 millions d'auditeurs, rien que sur la plateforme iTunes. Selon le quotidien Korea Times, 6 millions de Sud-Coréens (sur une population de 49 millions) écouteraient l'émission.

Le "podcast" réunit quatre commentateurs politiques qui multiplient les remarques acerbes et parfois grossières... ainsi que des révélations ensuite reprises par l'ensemble de la presse coréenne. Lors de la campagne pour la municipalité de Séoul, les quatre complices révèlent ainsi que la candidate de la majorité fréquente un institut de soins de beauté dont l'adhésion coûte 66 000 euros par an. La candidate a perdu les élections.

"Aujourd'hui, la voix d'une seule personne peut balayer tous les autres médias, si elle a un bon message et si elle utilise la bonne plateforme", se félicite Kim Ou-joon, le créateur de l'émission. Lui et ses trois complices font depuis peu l'objet d'une procédure judiciaire pour diffamation. Mais il n'en a cure : "au lieu d'attaquer le message, le gouvernement s'en prend au messager. En fait, cela nous fait plaisir : c'est l'occasion de donner l'exemple, et de montrer qu'il ne faut pas se laisser intimider."

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